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4ème congrès de haut niveau sur la paix et la sécurité: L'Afrique veut unir ses rangs pour peser plus

par Houari Saaïdia

  Hier, à l'ouverture du 4ème congrès de haut niveau sur la paix et la sécurité en Afrique, Ramtane Lamamra a dévoilé deux faits «négatifs» qui s'apparentent à de vrais maux pour le continent africain. A savoir : les risques qui pèsent sur l'unité même de l'UA et l'absence de cohérence -sur certains dossiers en tout cas- au sein du groupe A3 (les trois pays africains membres du Conseil de sécurité de l'ONU).

Les affirmations, à ce propos, du ministre algérien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, ne souffrent d'aucune ambiguïté. «Cette 4ème édition du séminaire d'Oran intervient à un moment sensible de l'histoire de notre organisation continentale. Aux nombreux défis à la paix et au développement économique et social de l'Afrique, s'ajoute celui lié à la préservation de l'unité et de la cohésion de l'Union africaine. En effet, si l'UA, porte-voix des peuples africains et de leurs aspirations, est aujourd'hui un partenaire fiable et crédible de la communauté internationale, c'est en grande partie grâce à sa cohésion et à l'unité de ses membres. La tentative vaine de division des rangs de l'UA lors du récent sommet afro-arabe de Malabo renseigne à la fois sur les menaces qui guettent notre organisation jusque dans son intégrité et sur la forte détermination des Etats membres à préserver la cohésion de notre organisation continentale. La réaffirmation par les pays africains, à Malabo comme auparavant à Kigali, des valeurs fondatrices du panafricanisme, atteste du haut degré de conscience et de maturité atteint par notre organisation et par ses institutions », a déclaré M. Lamamra lors de la cérémonie de coup d'envoi des travaux de cette 4ème session du congrès africain sur la paix et la sécurité qui se tient à Oran durant trois jours. «Il est clair que la préservation de cet acquis commun qu'est l'Union africaine, de ses valeurs et de ses institutions est à la fois une priorité et une responsabilité collective pour les peuples et les dirigeants africains. Le prochain sommet de l'UA sera, j'en suis convaincu, une occasion idoine de réaffirmer cette détermination et de réitérer ces constantes», a-t-il poursuivi. Ce n'est pas non plus en guise de thème «générique» que cette 4ème version du séminaire de haut rang sur la paix et la sécurité en Afrique s'est assigné le mot d'ordre d'«assister les membres africains entrant au Conseil de sécurité de l'ONU (l'Ethiopie prendra la place de l'Angola, qui verra son mandat biennal expirer en janvier 2017, pour intégrer le A3 aux côtés de l'Egypte et du Sénégal) à se préparer à l'examen des questions de paix et de sécurité sur le continent».

Tentatives de désunir l'UA, manque de cohérence au sein des A3

C'est plutôt l'objectif principal du rendez-vous d'Oran, et ce sur fond d'un constat peu reluisant sur le plan de la cohésion et l'unification des positions qui se rapportent aux conflits africains à l'ordre du jour du Conseil de sécurité des Nations unies, des pays africains membres non permanents de cet organe ayant pour mission principale le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Les éditions se succèdent, et les recommandations pour une seule et unique voix de l'Afrique au CSNU se réitèrent avec, mais dans la pratique «ça ne suit pas toujours», les intérêts individuels et les agissements individualistes l'emportant souvent sur l'intérêt commun et l'enjeu collectif de l'UA. «La 3ème édition du séminaire, tenue en décembre 2015, avait clairement recommandé à ce que les trois pays africains membres du Conseil de sécurité, les A3, coordonnent leur action et expriment les positions de l'Union africaine, notamment celles développées par le CPS (le Conseil de paix et de sécurité de l'UA : Ndlr), sur l'ensemble des questions examinées par le Conseil de sécurité. Un an après, nous devons reconnaître que beaucoup reste à faire dans ce domaine», reconnaît le MAE algérien qui propose à cet effet une réflexion profonde et un débat élargi, à la faveur de cette rencontre, «afin d'identifier les voies et moyens à même de redresser cette situation et d'ouvrir des perspectives prometteuses à l'action africaine collective de protection et de promotion des idéaux et des intérêts de l'Afrique».

Car, en définitive, ce n'est pas en continuant à se présenter en rangs dispersés devant l'organe institutionnel le plus puissant du monde, le cénacle où se fait et se défait l'équilibre et la marche du monde, le lieu où un simple veto peut régler ou enliser un conflit, que l'Afrique peut espérer rétablir un tant soit peu l'injustice historique commise à son encontre et pouvoir décrocher un jour un siège permanent au sein de ce club très select, à la composition restreinte, dont les décisions impactent le monde entier, mais dont la répartition des sièges est des plus inégalitaires.

Terrorisme et conflits armés : entre faiblesse des mécanismes de l'UA et chevauchement des actions

«Nous tenons ce 4ème séminaire de haut niveau à un moment où l'Afrique, notre continent, fait face à de multiples menaces à la paix, à la sécurité et la stabilité, notamment celle du terrorisme et extrémisme violent. Naturellement, cela nous contraints non seulement à renforcer et à adapter nos approches et nos stratégies, mais également nous devons renforcer davantage notre coopération et coordination pour être à la hauteur de ces défis», a souligné pour sa part Smail Chergui, commissaire à la paix et à la sécurité de l'UA. L'Afrique étant à la croisée de défis socioéconomiques et sécuritaires majeurs, face à l'urgence de la menace terroriste qui prospère sur la précarité sociale ambiante, l'UA a certes adopté un large éventail d'instruments juridiques et organisationnels pour endiguer son expansion sur le continent.

Cependant, à cette percée terroriste sans précédent, qui malmène les appareils sécuritaires étatiques, s'oppose la faiblesse des mécanismes élaborés par l'UA pour contrer la menace terroriste à l'échelle régionale et continentale. Mises à part quelques avancées que l'on peut apprécier, persistent encore de nombreuses carences qui relèguent l'institution panafricaine au rang de maillon faible de la coopération internationale contre le terrorisme. La nature transfrontalière de la menace exige une prise en charge du problème sur le plan continental. Mais celle-ci doit s'opérer de manière cohérente et coordonnée à travers l'élaboration d'une véritable stratégie antiterroriste. Aussi, la résolution des nombreuses pathologies qui affectent l'UA serait un atout dans cette bataille pour sortir l'Afrique du cercle vicieux de l'insécurité. Il existe des régions dans lesquelles plusieurs programmes poursuivant les mêmes objectifs sur le même domaine d'intervention se chevauchent pour contenir une même menace. La région du Sahel nous offre un exemple assez édifiant du phénomène de duplication des instruments de contre-terrorisme.

C'est ce qui ressort en premier lieu de plusieurs communications de hauts responsables africains au premier jour du congrès, dont on citera celles du MAE et de l'Intégration africaine du Tchad et, par ailleurs, président du Conseil exécutif de l'UA, Moussa Faki Mohamed, le MAE de l'Angola, George Chikot, le président du CPS, Kamara Osman Keh, le directeur exécutif de l'UNITAR, Nikhil Seth.