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Au moment où les locations flambent: Le marché de l'immobilier en baisse

par Mokhtaria Bensaâd

Si tous les indices prévoyaient une hausse des prix de l'immobilier en 2016, la tendance semble inversée tirant ce marché vers le bas. Le premier semestre de cette année a enregistré une baisse de 30% en matière de vente et d'achat par rapport à la même période de l'année dernière, au moment où les locations, pour la saison estivale, sont passées du simple au double et parfois même au triple dans les villes côtières du pays.

La période est propice donc pour l'achat d'un bien immobilier mais pour passer les vacances, il faut mettre la main à la poche. Cela reste un luxe pas encore accessible pour les petites bourses. Le marché qui a connu une flambée vertigineuse durant les années précédentes, vit depuis l'année dernière un blocage à cause des prix qui ont atteint un seuil inégalé donnant du fil à retordre aux agents immobiliers pour la vente ou l'achat d'un bien immobilier et aussi aux promoteurs immobiliers privés qui, pour certains, se sont retrouvés avec une mévente pour les projets de logements réalisés. Va-t-on vers une stabilisation durable du marché ? Les professionnels restent optimistes annonçant même une baisse continue des prix qui aura pour effet de stabiliser et réguler un marché, longtemps livré à la spéculation et à l'informel.

Les agents immobiliers à la rescousse des promoteurs

M. Abdelhakim Aouidet, président de la fédération nationale des agents immobiliers (FNAI), nous confie que les promoteurs immobiliers ont eu recours aux agences immobilières pour vendre leurs logements. Une nouvelle tendance, puisque habituellement le parc immobilier est vendu sur plan avant même la construction. Mais les temps ont changé et les professionnels ont compris que pour s'adapter aux mutations du marché de l'immobilier, il faut revoir les prix vers la baisse, sinon c'est la faillite. Pour M. Larbi Chemmam, promoteur immobilier et ancien président de l'Union nationale des promoteurs immobiliers (UNPI), cette situation a été positive dans le sens où une décantation s'est opérée dans le secteur pour ne laisser place qu'aux professionnels. « C'est une épreuve à passer et qui va ouvrir les portes aux vrais professionnels pour travailler. Dorénavant, ne peut être promoteur immobilier qui veut. Le métier a ses règles qui doivent être respectées ». Sur la baisse des prix et des ventes, le promoteur estime qu'il ne s'agit là que «d'une stabilisation du marché tout à fait normale après la courbe ascendante qu'il a prise en mettant en avant deux standards immobiliers, le LSP et le promotionnel, ignorant toutes les autres formules qui peuvent donner plus de choix aux demandeurs de logements et qui peuvent élargir la palette des prix. Si un promoteur a eu des soucis pour vendre, cela l'incite à revoir sa politique et à aller vers le professionnalisme». Cependant, ce professionnel de l'immobilier regrette que la location des biens n'ait pas la place qui lui revient. La société fonctionne plus avec l'esprit de la propriété et donne peu de place à la location. Chacun veut devenir propriétaire. « La location n'est pas rentable », estime M. Chammam, «et il n'existe pas encore une politique pour promouvoir la location. Ce qui est répandu actuellement est l'esprit d'une location pour avoir une source d'argent supplémentaire pour garantir une bonne retraite ».

Canaliser les transactions immobilières

Avec tous les programmes de logements réalisés ou en cours de réalisation, le déficit en termes de logements existe encore, selon le président de la FNAI, M. Abdelhakim Aouidet. Explication de ce professionnel. Le taux d'occupation du logement en Algérie est de 5 et 5.2% alors que la norme internationale est de 1.9 jusqu'à 2.2%. L'Algérie a donc pas mal de retard à rattraper dans ce sens et c'est ce qui explique, a souligné le président du FNAI, « l'effort à faire en matière de construction de logements en plus du programme des dix millions de logements destinés à l'habitation ».

Interrogé sur l'ampleur de la spéculation dans ce marché, accentuée par la multiplication des programmes de construction, cet agent immobilier estime que pour canaliser les transactions immobilières et lutter contre la spéculation dans ce marché florissant, la fédération a proposé d'impliquer les agences immobilières dans toute transaction de biens. « Les transactions immobilières doivent passer par l'agent immobilier. Un moyen de canaliser cette opération, d'inciter le client à la déclaration réelle du prix de la vente et de bancariser l'argent afin de renflouer les caisses de l'Etat. C'est aussi un moyen de responsabiliser les professionnels, les agents immobiliers, quelque 3.000, qui activent au niveau national », a expliqué M. Aouidet.

Ce dernier a plaidé pour le développement de la construction en mettant en place une politique sérieuse pour le logement et en facilitant la procédure administrative pour la construction.

La haute saison donne le tournis aux estivants

Chaque année, il faut s'y attendre. Durant la saison estivale, c'est la flambée des prix de location d'appartements, bungalows ou de réservation d'hôtels près de la mer. On se croirait aux enchères. 100.000, 200.000 DA et plus pour une semaine en bord de mer à Oran. Pas moins de 12.000 DA pour une seule nuit. Les offres envahissent les annonces des journaux et même sur la toile. Il suffit d'un clic pour avoir une palette de prix selon la région et le mois. Les offres ne manquent pas et la demande aussi. Même à ces prix exorbitants, Oran reçoit des estivants de toutes les régions du pays et même de l'étranger qui viennent y passer les vacances. Le président de la FNAI nous a indiqué que pour les 14 wilayas côtières du pays, les locations durant cette saison haute sont hors de prix. Une nuit à l'hôtel qui était fixée à 5.000 DA durant la saison basse à Bejaia, est proposée à 15.000 DA en été et c'est la même tendance à Oran ou ailleurs. « Tout marche en été, les appartements, les villas, les hôtels. Il y a même des particuliers qui louent leur appart durant l'été, histoire de gagner un peu d'argent ». Cette flambée s'explique, nous dira M. Aouidet, par le manque d'infrastructures touristiques et d'une politique adéquate du tourisme. Il est temps de mener une réflexion sur le tourisme et faciliter l'investissement dans le secteur, car c'est encore le parcours du combattant côté administratif, afin de porter le secteur vers l'avant car nous n'avons rien à envier à nos voisins qui, eux, ont mis tous les moyens pour développer ce créneau porteur ».