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Amnesty International Algérie: Plaidoyer pour l'abolition de la peine de mort

par M. Aziza

Amnesty International Algérie a réitéré son appel à l'abolition de la peine de mort, dans notre pays, qui est depuis 1993, prononcée, mais sans exécution. Hassina Oussedik, directrice d'Amnesty International Algérie, a présenté, hier, des données approximatives du nombre des peines de mort prononcées par les tribunaux algériens, qui tourne autour de 62 cas, en 2015. Il s'agit, selon la conférencière, de jugements par contumace pour des infractions liées au terrorisme. Ces données, précise Oussedik, sont approximatives, car explique-t-elle, son organisation n'a pas eu accès à l'information. « Nous avons saisi, à maintes reprises, le ministère de la Justice pour avoir des informations et des chiffres exacts, sur les peines de mort prononcées et sur les chefs d'inculpation, mais en vain». Elle a précisé que les chiffres et les données que détiennent Amnesty ont été collectés, auprès des familles et proches des personnes, aujourd'hui, en prison. La conférencière s'interroge pourquoi l'Algérie n'abolit pas la peine de mort, puisque l'exécution n'est pas appliquée. Elle cite le moratoire appliqué, depuis 1993, sur les exécutions, et qui est en soi une reconnaissance de l'inutilité de la peine de mort, selon Hassina Oussedik. Elle soulève, également, la question de la rétention de l'information, de la part du ministère de la Justice sur le sujet.

La représentante d'Amnesty International a estimé que l'Algérie devrait franchir le dernier pas vers l'abolition, pure et simple, de la peine de mort. Et de regretter l'absence de coalition contre la peine de mort, en Algérie. Pourtant, dit-elle, ce genre de coalition existe, déjà, en Tunisie et au Maroc.

Pour Hassina Oussedik, l'argument avancé par notre Etat, selon lequel l'opinion publique n'est pas prête, ne justifie pas toujours, cet état de fait. Tout en affirmant que cet argument est infondé, elle rappelle que l'opinion publique n'a, à aucun moment, réclamé la peine de mort, durant la décennie noire, pourtant de graves violations des droits humains ont été commises, dit-elle. La conférencière a, également, estimé que parfois les Etats instrumentalisent la peine de mort à des fins politiques, notamment contre leurs opposants. Suite à un débat entre la représentante d'Amnesty et les journalistes, la conférencière a précisé qu'Amnesty n'est pas pour l'impunité des actes criminels, mais contre la condamnation à mort. «Il y a d'autres moyens de punitions, mais on est contre cette barbarie », dit-elle. Et d'affirmer qu'il ne faut jamais négliger les erreurs judiciaires, et le fait que parfois la réalité judiciaire est injuste et discriminatoire. « La majorité des personnes passibles de la peine de mort, aux Etats-Unis, sont des Afro-américains et des Latinos qui n'ont pas les moyens de se payer de grands avocats», dit-elle. Et de souligner que «la peine capitale est irréversible».

Hassina Oussedik a appelé à la mobilisation des associations des droits de l'Homme, les journalistes, les intellectuels pour l'abolition de la peine de mort, par crainte que ceux qui sont dans les « couloirs de la mort» soient exécutés, en cas de changement de régime. Elle a, également, regretté le fait que l'abolition de la peine de mort n'a pas figuré dans la nouvelle constitution. La conférencière a, à plusieurs reprises, rappelé l'horreur et l'injustice des condamnations à mort, qui selon elle, sont ancrées, dans notre mémoire collective, en citant les jeunes femmes et hommes qui ont été exécutés, durant la guerre de Libération nationale !

Selon Amnesty International, l'année 2015 a été caractérisée par une envolée du nombre d'exécutions, dans le monde. Cette organisation internationale a constaté que l'Arabie Saoudite, l'Iran, le Pakistan étaient, en grande partie, responsables de cette envolée. Au moins 1.634 personnes ont été exécutées en 2015, soit une hausse de 50 %, par rapport à l'année précédente.