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Restructuration du DRS : Des changements et des interrogations

par Z. Mehdaoui

Les changements opérés par le chef de l'Etat au sein du puissant département de la Sécurité et du Renseignement (DRS), continuent d'alimenter les tribunes, au point où on assiste, parfois à des supputations, voire des analyses fantaisistes, avec tout le respect dû aux auteurs.

On a assisté, ces derniers jours, à titre d'exemple, à une avalanche de tuyaux crevés sur l'arrestation du général-major Hassen. L'ancien chef du service de lutte contre le terrorisme, était selon certains, interpellé, auditionné, puis mis en liberté surveillée, puis incarcéré et relâché avant d'être ré- emprisonné dans une prison militaire.

A défaut d'une communication officielle, les lecteurs ont eu droit, depuis les « tirs » de Amar Saidani, sur la personne du patron du DRS, le général-major Mohamed Mediène, à de nombreux scénarios sur ces « dissensions » qui minent les relations entre ce département et le clan présidentiel.

Ignorer, cependant, qu'il y a « mésentente » entre ce service et le « clan présidentiel » relève de la naïveté. Il y a, véritablement, un « clash » entre le DRS et le clan présidentiel et cela a commencé à l'annonce, par Sellal, de l'intention du chef de l'Etat de briguer un quatrième mandat, en dépit de son état de santé que tout le monde connaît.

En décidant, à la veille des élections présidentielles, d'écarter le général-major Djebar de la puissante DCSA (direction de la Sécurité de l'Armée) et rattacher, directement, cette dernière à l'état-major de l'Armée, le président de la République ou disons-le sans ambages, le « clan présidentiel » voulait avertir clairement les adeptes de l'article 88 de la Constitution qui prévoyaient la destitution du président, pour raison de santé. Sachant que la DCSA avait, sous son contrôle, les six régions militaires, le message était, on ne peut plus clair.

Le président ne s'arrête pas là. Son deuxième « coup d'éclat » était de dissoudre le service presse dirigé par le colonel Fouazi. Ce service, qui dépendait de la DSI (direction de la Sécurité intérieure) et c'est un secret de polichinelle, avait ses entrées dans de nombreux médias et pouvait, par conséquent, rendre publics, en temps opportun, certains dossiers de corruption auxquels sont liés certains hommes du président et du coup ternir la campagne électorale de Bouteflika.

Soutenu, inlassablement, par le DRS durant son règne sur le pays, le candidat Bouteflika voulait passer un message clair. Il n'est plus le « trois quart de président » mais pour la première fois, il veut passer en force, sans l'aide de ce service qui l'a, pourtant, ramené, soutenu et protégé durant trois mandats.

Le président ou le clan présidentiel continuera dans sa lancée en décidant, et ce n'est pas un hasard, de dissoudre le service judiciaire du DRS qui est, faut-il le préciser, à l'origine des longues enquêtes sur les scandales de Khalifa, l'autoroute Est-Ouest, Sonatrach I et II ainsi que d'autres, encore, impliquant des personnalité proches de Bouteflika, à l'image de l'ancien ministre de l'Energie et des Mines Chakib Khelil qui coule, aujourd'hui, des jours heureux aux USA. Sans le travail de ce service judiciaire, qui avait de larges prérogatives, certains dossiers ne seraient, jamais, connus de l'opinion publique et ne seraient, probablement, jamais remis entre les mains de la justice. Une fois élu, le président ou la présidence de la République continuera à retirer certains services du giron du DRS, notamment le CFT (Commandement des Forces terrestres), la DSPP (direction de la Sécurité et de la Protection présidentielle) ou plus récemment le GIS (Groupe d'intervention spécial).

Certains évoquent un « démembrement » du DRS pour pousser son patron à la porte, d'autres soutiennent que les tenants du pouvoir préparent la succession de Bouteflika comme si, après lui, l'Algérie sombrerait dans le chaos.

D'autres, encore, plus naïfs affirment que le chef de l'Etat veut laisser un pays entre les mains « d'institutions civiles ». Enfin certains sont convaincus que la restructuration du DRS vise, simplement, à définir d'emblée, les missions de ce service pour en faire un département encore plus puissant, à l'image des services des pays développés comme la CIA, le FSB (ancien KGB), la DST?etc. Cette dernière hypothèse reste, toutefois, plausible, selon certains anciens officiers supérieurs du DRS avec lesquels nous nous sommes entretenus. Ils affirment que jusqu'ici il n y'a que des services qui ont été touchés et que les départements qui constituent « l'ossature » du DRS, à l'image de la DSI et de la DDSE (contre-espionnage) ne sont pas concernés par cette « reconfiguration ». Mais les analystes les plus chevronnés, restent, cependant, perplexes au point où cette «restructuration sur-médiatisée» commence à virer à la confusion.