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Gouvernement-walis: Une autre feuille de route pour des dossiers épineux ?

par Ghania Oukazi

Le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales a en principe donné le ton aux missions qui incombent à l'ensemble des walis pour que la catastrophe de Ali Mendjeli ne se répète pas à tous points de vue.

C'est aujourd'hui que le 1er ministre rencontre à la résidence d'Etat Djenane El Mithak les walis de la République pour leur remettre la feuille de route traçant les différentes étapes d'un développement local qui peine à être amorcé même si des moyens financiers colossaux lui ont été débloqués sur plusieurs années. « Il y aura le 29 de ce mois une réunion du gouvernement avec les walis pour examiner la situation et lancer l'investissement », a-t-il déjà annoncé samedi dernier en marge de sa visite dans la wilaya de Constantine.

Après avoir vécu un nouveau mouvement en juillet dernier, le corps des walis se présentera à Abdelmalek Sellal dans sa nouvelle composante à savoir 35 d'entre eux remaniés et de nouveaux walis délégués gestionnaires des dix nouvelles circonscriptions créées dans les immenses wilayas du sud du pays sans compter ceux désignés (entre nouveaux et anciens) pour gérer les 12 circonscriptions administratives de la wilaya d'Alger. Les grands axes des missions à charge des walis leur ont été fixés par le président de la République lors du Conseil des ministres précédant leur mouvement. Leur rappel et bien d'autres instructions-précisions leur seront faits aujourd'hui par le 1er ministre qui a déjà classé les priorités du développement local. Il écoutera des rapports de situations du ministre de l'Agriculture et de la Pêche, du Tourisme et de l'Artisanat, de l'Industrie et des Mines, des Finances et de l'Habitat. Ce sont cinq secteurs qui, si leurs premiers responsables prennent les choses au sérieux et leur assurent une véritable relance et efficacité, ils pourront engendrer à eux seuls des résultats appréciables en matière d'investissements, de création d'emplois et de richesses et aussi de paix sociale.

Il suffit surtout que le mensonge politique ne couvre pas ou plus les insuffisances, carences et défaillances de secteurs pourtant productifs s'ils sont bien pris en charge. Il faudrait que le gouvernement Sellal s'abstienne d'ériger des leurres en acquis économiques et sociaux. « Darnaha Djazaïria » est le slogan le plus mensonger que le pays n'ait jamais lancé. Le fameux projet Renault, pour ne citer encore que lui, est une tricherie «officielle» sans précédent. Le véhicule qui sort du hangar de Oued Tlélat à Oran est une tromperie industrielle qui ne peut être expliquée que par la visée d'un gain politique qui profite plus au pouvoir en place qu'à l'économie nationale. Les services des douanes de l'ouest du pays sont le témoin irréfutable de la réception de milliers de caisses de pièces de tous genres en provenance de pays de l'Europe de l'Est où les usines Renault les produisent pour qu'elles servent en Algérie, au montage d'un seul et unique modèle de la même marque expressément pour une consommation locale. L'on se demande si une délocalisation d'une usine complète n'aurait pas été moins fourbe pour le pays que ces dépôts de montage où le taux d'intégration est réalisé à peine par deux petites pièces en plastique.

A quoi servent les élus ?

La réunion gouvernement-walis d'aujourd'hui se tient la veille de la rentrée sociale, précisément la rentrée scolaire qui semble chaque année être en avance de la remise en état des écoles. L'on en trouvera encore qui n'auront pas toutes les commodités pour recevoir les élèves. L'on s'est toujours demandé à quoi servaient les élus à commencer par les P/APC s'ils n'effectuent pas régulièrement des visites d'inspection dans toutes les structures administratives, économiques et sociales de la commune qu'ils gèrent pour en cibler les problèmes aux fins de les résoudre. Les élus eux-mêmes n'ont de cesse de répéter qu'ils sont les représentants «légitimes» du peuple. Mais ceci est aussi un autre slogan-mensonge puisque les citoyens ont, entre autres, toujours pataugé dans la boue dès les premières pluies.

Comme nous l'avions prévu dans les colonnes de l'édition du Quotidien d'Oran du samedi 22 août, (article paru en page 3 et intitulé : Ali Mendjeli, le «mauvais» exemple), ces immenses espaces bétonnés, appelés avec orgueil «nouvelle ville», ont vu la semaine dernière les pieds de leurs habitants ensevelis dans la boue dégagée par les innombrables monts de gravas déposés ici et là, sous l'effet des pluies torrentielles qui se sont abattues sur la région. «Constantine a des opérations d'acquisitions, d'équipements, d'assainissement, de ramassage d'ordures ménagères, c'est une opération qui existe», a déclaré jeudi le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales lors de son déplacement à Ali Mendjeli. «Est-ce qu'elle a été concrétisée ?» a-t-il interrogé. «Celui qui n'a pas concrétisé cette opération ne restera pas 4H !», a menacé Nouredine Bedoui. Il fera l'annonce d' «un nouveau plan de travail à partir de cette extension ou cette expansion de Ali Mendjeli, pour prendre en charge les préoccupations des citoyens, en tous points de vue, pour ne pas retomber dans les mêmes problèmes », recommande-t-il.

Le prix de la paix sociale

Il faut reconnaître au ministère de l'Intérieur d'avoir réussi à simplifier un tant soit peu les lourdes pratiques administratives qui entravent le service public au niveau de l'ensemble des administrations. L'on reconnaît que d'importantes instructions ont été données pour que le citoyen n'ait plus de grosses peines à retirer un document administratif. N'était-ce le zèle d'employés de la fonction publique -et ils sont nombreux-, les structures administratives auront parfaitement su gérer les foules qui stagnent dans les différents halls dans l'espoir d'obtenir un document des plus simples. Mais là, il est question de lever l'impunité qui a pris force de loi depuis que nos gouvernants ont commencé à ménager les citoyens pour «préserver» la paix sociale. Si Bedoui brandit la menace de limogeage de «ceux qui n'ont pas concrétisé les opérations», il faudra qu'il instruise en même temps les responsables des administrations publiques locales pour ne pas fermer les yeux sur le désordre, l'incompétence, l'absentéisme, le laisser-aller et autres arrogance et absence de civisme. Il y a lieu de réhabiliter la sanction face à tout comportement néfaste.

L'on s'attend toujours à ce que le gouvernement instaure des instances de recours auprès desquelles le citoyen pourra exposer son problème sur place, là où il l'a rencontré. La mise en service par le ministère de l'Intérieur d'un numéro vert à cet effet est intéressante mais encore faut-il que ceux qui sont de l'autre côté du combiné répondent à chaque appel. «Des médiateurs bien formés (des sociologues de préférence) pourraient faire l'affaire s'ils sont constamment présents sur les lieux où peuvent surgir les problèmes administratifs», pensent des cadres de «la locale». Les nouveaux walis délégués en charge des nouvelles circonscriptions administratives du grand Sud, eux, auront à mettre toutes les administrations sur pied pour être au service de citoyens qui n'ont jamais eu la vie facile dans ces immensités désertiques quasiment à l'abandon. Depuis que Sellal alors ministre des Ressources en eau a «branché» Tamanrasset à In Salah pour les besoins d'eau potable de ses habitants, il était question de construire tout au long du tracé (700 km) des bourgs (urbains) pour stabiliser les populations et leur assurer les commodités d'un quotidien quelque peu décent.

Le brûlant dossier sécuritaire

Avec l'arrivée de l'eau dans ces régions, l'investissement devra aussi être boosté avec tout ce que cela entraînerait comme effets socio-économiques. Les populations attendent toujours de voir. Le ministre des Finances fera aujourd'hui devant l'assistance un point de situation pour évaluer les cagnottes du pays. Il est très possible que des réajustements budgétaires soient effectués pour pouvoir supporter les déficits qui s'annoncent bien lourd avec la persistance de la chute des prix du baril de pétrole. Autre dossier épineux, les questions sécuritaires. Les walis délégués et les walis du Sud en général devront, plus que tous les autres, doubler de vigilance pour assurer la sécurité et la stabilité des territoires.

La sécurisation des frontières est en effet ce dossier brûlant que le gouvernement est contraint de laisser ouvert notamment depuis que le pays est encerclé par les conflits. Les lourdes quantités de drogues et les armes qui sont quotidiennement interceptées par les forces de sécurité n'augurent pas de lendemains sereins. C'est d'ailleurs l'ensemble des walis qui devront «déployer» la vigilance comme première arme de défense de l'ensemble du territoire national. Mais ceci relève d'une stratégie de l'Etat à charge des services de sécurité avec à leur tête le commandement de l'ANP, de veiller à sa mise en œuvre et en faire une action constante, permanente et réfléchie pour repousser «l'inconnu».

Autrement, le développement local ne se fera pas sans que les premiers magistrats des wilayas ne règlent définitivement les problèmes élémentaires des cités comme le nettoiement des avaloirs, le ramassage des ordures, la réfection des axes routiers et des conduites d'AEP, et autres interdiction des commerces informels et stationnements anarchiques qui bloquent les espaces et passages publics. «Dans les années 70, les rues de la capitale étaient lavées à l'eau de mer», avait lancé Sellal il y a longtemps. L'on se demande ce qui empêcherait de le faire aujourd'hui. C'est comme le règlement des problèmes élémentaires évoqués, il n'est nul besoin de réfléchir longtemps pour les régler. Il suffit de construire l'Etat avec tout que cela exige comme rigueur, pour que ses structures s'acquittent convenablement de leurs missions.