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On ment parce qu'on élève la voix !

par El-Houari Dilmi

Parce qu'il a cru pouvoir fourguer un chocolat frelaté à un Suisse, Chalachou a été condamné à une peine pas comme les autres :retourner s'user les culottes à l'école des quatre vérités où on lui enseigna une mémorable leçon. Seul face à son alter ego revenu à la vie après plus de quinze années de glaciation, celui-ci apprit à Chalachou que quand la vérité met le poignard à la gorge, il faut baiser sa main blanche, quoique tachée de sang. Troublé jusque dans son âme «ravagée», Chalachou sombra dans un coma profond. Flirtant avec la grande Faucheuse vêtue d'un linceul gris-noir, il vit le film de sa vie délavée défiler sous ses yeux mi-clos ; en un tour de main. Une voix sépulcrale, surgie plus haut que les nuages, susurra alors dans l'oreille percée de Chalachou : «qu'est-ce que la vérité, sinon qu'elle n'est jamais bonne à dire, ni même à chuchoter dans l'oreille... d'un sourd. Les femmes et les médecins savent combien la vérité est «malfaisante» pour son homme. Oui Chalachou, parce que toute vérité n'est pas bonne à déclamer. Criée sur tous les toits. Gravée sur les fronts proéminents des diseurs de bonne aventure. Des thaumaturges et des néo-prophètes...».

Reprenant ses esprits, Chalachou se souvient de la leçon de son alter ego qui lui apprit, tout bambin, que la vérité est un fruit qui ne doit jamais être cueilli que quand il est mûr. Jusqu'à putrescence. La vérité, le plus lourd des fardeaux que l'homme porta sur son dos, il faut l'aimer par tous les temps, sous tous les cieux, sans jamais oublier de détourner l'œil sur l'erreur. De l'autre. Mais comment un muet peut-il donner sa parole à un «parlant», toujours de glace devant la vérité nue et en mille feux pour les mensonges dorés ? s'interrogea Chalachou en cachant sa tête ronde trois lieues sous la terre. Rasant à ras sa «boîte à préjugés», Chalachou rédigea une lettre en sept mots, écrite sur du papier-cadeau qu'il jeta dans la mer, toute gonflée par la première forme de pollution de l'homme sur terre. Poussant le bouchon jusqu'au-delà du goulot, Chalachou se rasa cils et sourcils pour ne jamais mélanger (pêle-mêle) entre la vérité à l'endroit que jamais personne ne découvrit sur terre et la vérité retournée sur sa tête, qui n'est jamais racontée qu'avant les élections, pendant la guerre et après la chasse.

 L'histoire dira ensuite que Chalachou, en voulant inventer un élixir pour la vérité, mourut dans son labo décrépit de désespoir et d'ennui, tant le mensonge lui manqua jusqu'à l'étouffement ! Aussi vrai qu'on ment dès qu'on élève la voix !