
La rentrée, c'est aujourd'hui. Les mêmes rituels, les mêmes
bizutages de début d'année, les mêmes profs et proviseurs, les mêmes académies
et travaux de réfection. Mais cette année, une révolution a frappé l'école algérienne.
Benbouzid a finalement été renvoyé des classes après vingt ans de règne sans
partage. Une révolution, je vous dis, tant le bonhomme avait fini par se
confondre avec son département. Les présidents se sont succédé, des
gouvernements sont tombés, des ministres ont été recyclés mais lui, il était
toujours à son poste. Rien ne l'ébranlait, ni la déliquescence de l'école, ni
la déperdition scolaire, ni la violence dans les cours. Il cumulait les
réformes, changeant de programme comme de ministres dans un gouvernement
démocratique. Il avait survécu à toutes les catastrophes naturelles, aux grèves
des syndicats, à celle des élèves et de l'administration, aux chiffres des
examens gonflés aux hormones de croissance. Il avait tenu, imperméable aux
changements du temps et à la dérive des écoles. Il avait fait l'unanimité
contre lui et son école devenue celles des tabliers bleus et roses, de l'hymne
obligatoire à chaque lever de soleil, des courants d'air et du froid polaire
dans les classes. Le départ de Benbouzid est annonciateur d'un nouveau départ
pour l'école. Qu'elle s'en sorte et arrête de produire des zombies décérébrés,
véritables recrues des maquis terroristes et des gangs armés. Dire que l'école
est sinistrée est un euphémisme tant le mal y est profond. Dresser le tableau
noir de l'éducation c'est réviser les maux qui gangrènent la société, calculer
les morts par violence et les suicides, jeter un coup d'œil sur l'environnement
direct des enceintes éducatives et revoir le niveau claudiquant de nos enseignants.
Faire l'inventaire du passif prendrait des années et si un électrochoc n'est
pas dans le programme de cette année, l'enlisement de l'école se poursuivra
inlassablement, creusant un peu plus une fois arrivé au fond. Les priorités
sont nombreuses et les chantiers colossaux pour rendre à l'école un semblant de
visage républicain. Revoir les programmes scolaires qui imposent à des élèves
de six ans des cartables de 15 kilos, supprimer des matières superflues,
inadéquates avec l'âge des apprenants et revaloriser les ressources humaines.
Alléger les classes où se bousculent 55 cartables est également parmi le
hit-parade des réformes pour permettre une meilleure fluidité des cours. Quoi
qu'il en soit, l'école débute aujourd'hui et espérons que dorénavant le tableau
sera plus blanc que sombre.