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Washington: Des pages du Coran déchirées devant la Maison-Blanche

par Yazid Alilat

Malgré les mises en garde du président américain Barack Obama, des pages d'exemplaires du Saint Coran ont été déchirées samedi devant la Maison-Blanche à Washington, le jour du 9e anniversaire des attentats terroristes de New York, provoquant la colère dans nombre de pays musulmans.

Un groupuscule extrémiste a déchiré des pages d'un exemplaire du Coran devant la Maison-Blanche. «L'une des raisons pour lesquelles nous faisons cela : le mensonge selon lequel l'islam est une religion pacifique doit cesser», a affirmé aux journalistes un membre de ce groupe d'extrémistes de six personnes proche de la mouvance ultraconservatrice du «Tea Party».

Pourtant, le pasteur de Gainsville, Terry Jones, avait abandonné sous la pression son projet de brûler 200 exemplaires du Coran pour marquer, le jour de la célébration du 9e anniversaire des attentats du World Trade Center de New York, son opposition au projet de construction d'un centre islamique, doté d'une mosquée, à Ground Zero, là où se dressaient les tours jumelles percutées par deux avions de ligne détournés par des membres d'Al-Qaïda le 11 septembre 2001.

La destruction de pages du Coran a provoqué la colère dans le monde musulman, notamment en Afghanistan, où des manifestations de protestation avaient été organisées. A Moscou, des manifestants se sont opposés à un projet de construction d'une mosquée dans leur quartier, dans le sillage d'une vague d'islamophobie levée par les déclarations incendiaires de groupuscules extrémistes aux Etats-Unis et en Europe. Des membres de l'église orthodoxe se sont interrogés sur la nécessité de la construction d'une mosquée, en dépit du «nombre limité de musulmans à Moscou». Pour eux, échaudés par les événements aux Etats-Unis, il «n'y a pas lieu de construire des mosquées au milieu de quartiers où se dressent des églises».

Mais les conséquences de cette polémique sont catastrophiques, selon l'imam Fayçal Abdoul Raouf, qui a mis en œuvre le projet de construction d'un centre islamique à Ground Zero, à New-York. Dans des déclarations à la chaîne américaine ABC, il a affirmé que «l'autodafé du Coran, un temps planifié par le pasteur intégriste Terry Jones, aurait constitué un mauvais message et causé un désastre dans le monde musulman». Pour l'imam Fayçal, «cela aurait renforcé les extrémistes». Renoncer à l'emplacement prévu de la mosquée de New York sera interprété dans le monde musulman comme la nouvelle que «l'islam est attaqué en Amérique», a-t-il estimé, précisant que «l'idée selon laquelle les musulmans vivent mal aux Etats-Unis, répandue dans le monde musulman, était une idée fausse. Le fait est que les musulmans sont très heureux et prospèrent dans ce pays». «La loi et notre système politique nous protègent. (...) Et le monde musulman doit le reconnaître», a encore relevé l'imam.

La construction d'une mosquée à l'emplacement des deux tours jumelles détruites par Al-Qaïda, neuf années après les attentats de New York, suscite un grand débat aux USA, sinon une polémique qui n'est pas près de s'éteindre. La réalisation de cette mosquée est tout de même soutenue par le maire et grand magnat Michael Bloomberg, ainsi que par le président Obama, qui a affirmé samedi que les Etats-Unis ne seraient «jamais en guerre contre l'islam».

Après la polémique entourant le projet du pasteur extrémiste de Floride de détruire le livre saint de l'islam, M. Obama a répété que les instigateurs du 11septembre pouvaient «bien essayer de nous séparer, mais nous ne céderons pas à leur haine et à leurs préjugés». «Ils peuvent bien essayer de provoquer des conflits entre nos croyances, mais en tant qu'Américains, nous ne sommes pas et ne serons jamais en guerre contre l'islam», a-t-il déclaré pendant une cérémonie au Pentagone, sur lequel les pirates de l'air d'Al-Qaïda avaient dirigé l'un des quatre avions détournés il y a neuf ans. «Ce n'est pas une religion qui nous a attaqués en ce jour de septembre. C'était Al-Qaïda. Un groupe pitoyable d'hommes qui pervertissent la religion», a rappelé le président. A New York, environ 1.500 manifestants ont d'abord défilé samedi pour défendre le projet de centre culturel islamique, accusant ses détracteurs d'être des bigots. Un peu plus tard, environ 2.000 personnes se sont rassemblées non loin pour au contraire clamer leur opposition à la mosquée.