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TRIBUNE - À 60 ans de l'appel de l'ONU : la décolonisation des Malvinas, une cause toujours actuelle

par Atilio Berardi Hueda*

Lorsque j'ai présenté mes Lettres de Créance au Président Abdelmadjid Tebboune en septembre de l'année dernière, je lui ai exprimé, au nom de la République Argentine, les remerciements les plus sincères pour le soutien historique qu'a accordé de manière inébranlable l'Algérie à nos droits légitimes concernant la Question des îles Malvinas, dans toutes les enceintes internationales. Cet engagement, profondément ancré dans l'identité et la diplomatie algériennes, acquiert une résonance particulière alors que nous commémorons, ce 16 décembre, soixante ans d'un jalon fondamental du droit international : l'adoption de la Résolution 2065 par l'Assemblée Générale de l'ONU.

Ce document n'est pas une relique du passé, mais la base toujours en vigueur qui, pour la première fois, a reconnu l'existence d'un différend de souveraineté entre l'Argentine et le Royaume-Uni sur les îles Malvinas et a exhorté les deux pays à le résoudre par des négociations pacifiques. Soixante ans plus tard, ce mandat reste inaccompli, nous rappelant que la décolonisation est une tâche inachevée.

Pour l'Algérie, cette cause revêt une signification profonde et personnelle. Forgé dans l'une des épopées anticoloniales les plus emblématiques du XXe siècle, sa politique étrangère a en l'éradication du colonialisme un principe inébranlable. C'est pourquoi, depuis 1965, elle a été une alliée constante, cohérente et active de l'Argentine. Son soutien n'est pas circonstanciel ; il est l'expression d'une conviction historique.

Les Malvinas constituent un cas spécial et particulier de décolonisation. La population actuelle est le résultat d'une implantation postérieure à l'occupation britannique de 1833. C'est pourquoi le principe de libre détermination, tel qu'appliqué aux peuples sous domination coloniale, n'est pas pertinent ici. Le droit international est clair : la seule voie est la négociation bilatérale pour résoudre le différend de souveraineté, dans le respect de l'intégrité territoriale argentine.

Le refus persistant du Royaume-Uni de dialoguer n'ignore pas seulement l'Argentine, mais méprise aussi l'appel soutenu de la communauté internationale exprimé dans d'innombrables résolutions de l'ONU, du Comité de la Décolonisation (C-24), et de forums tels que le Mouvement des Pays Non-Alignés, l'Union Africaine et les sommets ASA et ASPA.

Pourquoi ce sujet est-il encore pertinent aujourd'hui pour l'Algérie ?

Parce qu'il en va de la crédibilité du système multilatéral et du droit international. La décolonisation n'a pas été un chapitre clos au XXe siècle ; c'est une obligation morale et juridique en suspens. La récente résolution adoptée par consensus au Comité de la Décolonisation (C-24) en juin 2025, qui réitère l'appel au dialogue, est la preuve du consensus mondial ferme et large qui soutient encore cette cause.

L'Algérie, avec l'autorité morale que lui confère sa propre histoire, comprend cela mieux que quiconque. Sa solidarité avec l'Argentine transcende la diplomatie ; c'est une question de cohérence avec les principes qu'elle défend. Dans un monde où les normes internationales sont remises en cause, défendre la pleine validité de la Résolution 2065, c'est défendre la validité de la paix, du dialogue et de la justice comme piliers de la coexistence mondiale.

*Ambassadeur de la République Argentine