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Les Guerres, un processus immanent évolutif dans la marche de l'histoire: De même pour l'Ukraine et Gaza dans la transformation du monde

par Medjdoub Hamed

Comment savoir le sens des guerres dans la marche de l'histoire, et présentement les guerres en cours, à Gaza et en Ukraine ? L'humanité a tellement avancé aujourd'hui, et c'est une vérité surtout avec l'ère d'Internet où l'information est immédiate, instantanée, abondante et accessible. Et un phénomène évolutif dans les guerres commence à apparaître, surtout le siècle dernier, avec l'avènement de la Première Guerre mondiale.

Partons du premier conflit mondial. Que s'est-il passé pour que cette Première guerre mondiale se déclenche ? Comme le rapportent les récits historiques, la guerre a eu pour origine un événement terroriste, l'assassinat du couple héritier du trône austro-hongrois, le prince François-Ferdinand d'Autriche et son épouse la duchesse de Hohenberg, le 28 juin 1914, par un jeune nationaliste, originaire de Bosnie, Gavrilo Princip.

Après un ultimatum de 48 heures à l'encontre du Royaume de Serbie, qui a accepté la majorité des exigences mais a rejeté celles qui portaient atteinte à sa souveraineté, notamment la participation d'agents austro-hongrois à l'enquête en Serbie, l'Autriche-Hongrie a estimé la réponse insuffisante, a rompu les relations diplomatiques et lui a déclaré la guerre.

La guerre qui devait se limiter à deux pays en conflit s'est transformée en guerre mondiale. Par le jeu d'alliances entre les grandes puissances européennes qui étaient à la tête d'empires coloniaux s'étendant sur plusieurs continents, et donc se retrouvant toutes engagées dans le conflit, la guerre déclarée le 28 juillet 1914 va durer plus de quatre années ; elle ne se termina que le 11 novembre 1918.

Que peut-on dire de la Première Guerre mondiale qui a éclaté par un prétexte, un assassinat terroriste, qui relève plus d'un fait divers politique que d'un fait qui va changer le cours de l'histoire ? En réalité, toutes les puissances, en particulier les puissances de l'axe (Allemagne, Autriche-Hongrie), étaient poussées à la guerre. Venue en retard dans le partage colonial à l'échelle mondiale, l'unité politique allemande ne s'étant opérée qu'en 1870, de même pour l'Italie, l'Allemagne réclamait de nouveaux gisements de minerais pour son industrie en pleine croissance et aussi la conquête de colonies.

La Première Guerre mondiale a été donc un « passage obligé » pour régler leurs comptes les puissances. Les conséquences de la Première Guerre mondiale ont mis fin à trois empires, l'empire allemand, l'empire austro-hongrois et l'empire ottoman. L'empire russe a été remplacé par l'Union soviétique. Des pays ont été libérés, en particulier dans les Balkans : les colonies des empires allemand et ottoman passaient aux mains des puissances victorieuses, la France, l'Angleterre, le Japon.... Si la Première Guerre mondiale s'est terminée par la victoire des Alliés, c'est essentiellement grâce à l'entrée des États-Unis en guerre en 1917, qui ont changé le cours de la guerre au profit des Alliés.

Dans cette guerre, on constate un processus évolutif rationnel majeur pour l'humanité. Non seulement trois empires coloniaux ont été démembrés et ont cessé d'exister, mais cette guerre va aussi agir sur les consciences des peuples colonisés. L'affaiblissement des puissances coloniales après la Première Guerre mondiale amènera les peuples colonisés à revendiquer politiquement leurs indépendances ; de nombreux partis politiques vont naître dans les années 1920-1930.

Une question de fond sur l'histoire : « Comment l'Angleterre est arrivé à coloniser l'Inde ? » Lorsque l'on sait que l'Angleterre ne comptait que 40 millions d'habitants, en 1914, avec une superficie de 246 690 km2 en Europe alors que l'Inde qui était très éloignée comptait, à la même époque, 250 millions d'habitants et une superficie de 4,169 millions de km2. Aucune comparaison possible entre les deux pays.

Exploit d'une puissance européenne ou « exploit du progrès scientifique, industriel de l'Angleterre dû aux deux révolutions agricole et industrielle » ? Si c'est le progrès qui a permis à l'Angleterre de coloniser ces territoires lointains, il en va de même pour les autres puissances européennes, et cela ne peut être que le progrès car, sans celui-ci, les pays d'Europe n'auraient pu aller trop loin. La question essentielle qui se pose : « Pourquoi le progrès en Europe et non pour le reste du monde ? »

L'Europe était-elle plus densément peuplée que les autres pays du monde ? Ou l'Europe était-elle plus intelligente que les autres peuples ? Et donc plus organisée ? Mais lorsque l'on regarde les guerres et les révolutions sociales qui se sont jouées en Europe, celles-ci ne se sont jouées nulle part ailleurs au monde.

On peut donc avancer toutes les explications possibles, il reste que l'Europe était en avance sur les pays du reste du monde. Pourquoi elle a été en avance ? Parce que cela a été voulu ; si cela n'a pas été voulu, l'Europe n'aurait tout simplement pas avancé. Ce qui signifie qu'il existe un principe immanent qui ressort de la marche de l'histoire, dans le sens que l'histoire a des desseins que les hommes ne peuvent comprendre. Pourquoi ? Parce qu'ils sont eux-mêmes compris dans le jeu de l'histoire, jeu qu'ils ne font qu'exécuter parce qu'ils sont des instruments dans la marche de l'histoire.

Et l'Europe a été en quelque sorte un instrument dans la marche du monde ; en colonisant le reste du monde, elle a en fait « mondialisé le monde. » Ce qui explique l'irruption des Guerres mondiales ; de par leur nécessité, elles relèvent de la marche immanente du monde.

Et c'est ce qui fait avancer l'histoire ; l'humanité passe de stades en stades, mais toujours en progressant selon un processus rationnel que l'on constate dans son développement, tout au long des siècles.

Aujourd'hui, le Royaume-Uni compte 69 millions d'habitants alors que l'Inde compte 1,4 milliard, aucune comparaison entre l'Inde et l'ancienne puissance coloniale qu'a été le Royaume-Uni ; de même avec le Pakistan qui compte plus de 220 millions d'habitants.

Vingt ans passent, de nouveau, un Deuxième Conflit mondial éclate et toujours provoqué par les puissances européennes. Quelles ont été les causes à l'origine de cette guerre ? La cause première à cette Deuxième Guerre mondiale a été la crise économique qui a éclaté, en 1929, aux États-Unis ; une crise en fait qui entre dans le processus évolutif du monde.

Nombre d'historiens, d'économistes en Occident ont cherché à expliquer pourquoi cette crise économique mondiale a fait irruption en 1929 aux États-Unis. En fait, par les événements même qui se sont passés, sur le plan économique mondial, comme des millions de produits américains qui n'ont pas été vendus et ont été jetés à la mer – selon des chiffres américains, 80 millions de sacs de café –, des même des milliers de voitures invendus jetés à la casse, les huiles, etc. ; la crise économique qui a éclaté aux États-Unis s'est étendue à l'Europe, à l'Afrique, l'Asie, l'Amérique du Sud... ne prouve qu'une chose : « l'extrême faiblesse de la consommation mondiale ».

Pourquoi l'extrême faiblesse de la consommation dans le monde ? La réponse est simple : « Plus des deux-tiers de l'humanité qui étaient colonisés ne comptaient pas dans la consommation mondiale. » Des pays colonisés, les richesses naturelles de leurs terres (mines, terres agricoles, etc.), étaient en grande partie transférées aux métropoles des puissances coloniales ; à ces transferts, il faut ajouter leur force de travail presque gratuites, ces peuples vivaient dans une extrême pauvreté.

Un déséquilibre flagrant au regard des formidables progrès industriels qui venaient de se faire jour au début du XXe siècle, en Europe, montrant l'impossible situation de la consommation mondiale qui ne pouvait se pérenniser. La crise économique de 1929 n'a été finalement que la sanction de l'écart économique des métropoles des pays occidentaux coloniaux et les pays du reste du monde vivant dans l'extrême pauvreté, et absents dans la consommation mondiale.

Précisément, les conséquences qui vont surgir de cette situation de crise mondiale, dans les années 1930, la mise en place de zones monétaires (zone franc, zone dollar, zone livre sterling), ne vont pas régler le problème économique entre les puissances, tout au plus à chercher à protéger chaque zone, et leurs économies respectives. Mais l'événement majeur marquant cette crise de 1929 et la dépression économique des années 1930 qui a suivi, a été la formidable hausse du chômage aux États-Unis ; le nombre de chômeurs qui était de 4 millions en 1930 est passé à 12 millions en 1932, soit 25% de la population active américaine.

Cette hausse du chômage s'est étendue à l'Europe, mais c'est surtout en Allemagne où les chiffres du chômage ont été catastrophiques, 43 % en 1932, avec 6 millions d'Allemands sans emploi ; une situation extrêmement grave sur le plan social en Allemagne. Le paradoxe de cette crise est qu'elle a permis au parti nazi de prendre le pouvoir en 1933.

Ainsi, constate-t-on que, dans les événements de la Première Guerre mondiale et de la crise économique de 1929 qui a suivi, tout s'est enchaîné, tout était, dans un certain sens, tracé par l'histoire, par l'évolution du monde. Une évolution liée à la fois aux formidables progrès scientifiques, industriels et économique aux États-Unis et en Europe, avec une forte croissance économique qui a été une conséquence, et au retard manifeste dans les pays du reste du monde. D'autant plus que le rapport des forces était tel qu'il était pratiquement impossible pour les peuples colonisés de sortir de la domination coloniale.

Précisément, un nouveau saut de l'histoire va surgir à la fin des années 1930, ce saut se fera avec l'irruption de la Deuxième Guerre mondiale, en 1939. Et c'est encore l'Allemagne, et au-delà du régime nazi, comme si l'Allemagne était désignée par l'histoire dans cette mission pour ébranler et mettre fin à la puissance coloniale de l'Europe. L'ironie de l'histoire, c'est que l'Allemagne hitlérienne va chercher à coloniser l'Europe elle-même ; elle s'attaquait aux puissances européennes et à l'Union soviétique ; la Deuxième Guerre mondiale qu'elle a provoquée a duré 6 ans, de 1939 à 1945.

A la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les pays d'Europe sont sortis très affaiblis ; deux puissances victorieuses ont émergé, ce sont les États-Unis et l'Union soviétique ; elles domineront le monde.

En 1944, les États-Unis, anticipant la fin de la Guerre, l'Allemagne hitlérienne était partout en recul, ont cherché à se prémunir dans l'après-guerre, ils ont convoqué 44 pays, en juillet 1944, à Bretton Woods, pour préparer le système monétaire international. Ce système monétaire devait régir le commerce mondial et les relations économiques, financières et monétaires internationales pour l'après-guerre.

La Conférence de Bretton Woods vient avaliser le dollar US comme la seule monnaie mondiale convertible en or au taux de 35 dollars l'once. L'économiste anglais John Maynard Keynes a proposé une monnaie internationale, le bancor ; compte tenu des enjeux et de l'endettement des pays alliés européens vis-à-vis des États-Unis, le bancor de Keynes ne pouvait être retenu ; le monde entier était dépendant de la puissance financière américaine. Un processus en fait tout à fait naturel relevant de la situation économique mondiale fortement affectée par la guerre.

Après 1945, une nouvelle ère s'est élevée pour le monde. Des frictions naîtront entre les deux puissances sorties victorieuses, les États-Unis et l'Union soviétique. Cependant, après la découverte de l'arme atomique en 1945 par les États-Unis, suite au Projet Manhattan mené en secret, et l'essai de la première explosion nucléaire Trinity, le 16 juillet 1945 à Alamogordo au Nouveau-Mexique (États-Unis), moins de vingt jours plus tard, s'opéra la nucléarisation de deux villes-martyrs japonaises, Hiroshima le 6 août 1945 et Nagasaki le 9 août 1945. Le monde horrifié apprenait les effets de la nouvelle arme que seuls les États-Unis détenaient dans le monde.

Malgré ce déséquilibre avec les États-Unis, l'Union soviétique resta un rival potentiel à l'Amérique dans les affaires du monde ; l'Union soviétique viendra en aide aux pays du reste du monde colonisé, en premier aux troupes communistes chinois qu'elle aidera à prendre le pouvoir. Le 1er octobre 1949, à Pékin, du balcon de la Cité interdite des anciens empereurs, Mao Zedong proclame l'avènement de la République populaire de Chine.

En fait, c'est un processus général de décolonisation qui s'est opéré pour tous les pays d'Afrique et d'Asie, après la Seconde Guerre mondiale. L'affaiblissement des puissances européennes, le soutien international à l'autodétermination et la mobilisation des mouvements nationalistes ont conduit à l'accession à l'indépendance de nombreux pays entre 1947 et 1962, tantôt par négociation, tantôt par la guerre, comme ce fut le cas pour l'Inde, divisée lors de son indépendance, pour l'Algérie, le Vietnam.

Une autre donne qui va marquer l'histoire contemporaine et encore aujourd'hui, c'est la création de l'État d'Israël en 1948, en Palestine. Une création venue en aval du pacte saoudo-américain, dit le pacte du Quincy, du nom du croiseur américain où se sont rencontrés le président américain Franklin D. Roosevelt, au retour de la conférence de Yalta (Crimée) en 1945, et le roi de l'Arabie saoudite, Abdelaziz ibn Saoud. Le pacte conclu garantissait à la monarchie saoudienne une protection militaire en échange d'un accès libre au pétrole saoudien.

Que peut-on dire du sens historiquedes deux Guerres mondiale qui ont abouti à la décolonisation du monde ? Les guerres qui suivirent depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale jusqu'à aujourd'hui, en Ukraine (Europe) et Gaza (Proche-Orient) ont été incessantes, déchirantes surtout pour l'Afrique et l'Asie ; elles relèvent d'un seul processus, un processus évolutif historique précis, en jeu dans la marche du monde.

Comme pour la colonisation du monde par l'Europe, parce que cela a été voulu ; le monde devait être colonisé et il a été colonisé. De même, les deux guerres mondiales devaient s'opérer ; si cela n'a pas été voulu, l'Europe serait restée maîtresse du monde ; le monde n'aurait tout simplement pas avancé.Ce qui n'est pas possible au regard de la marche de l'histoire qui témoigne d'un progrès continu pour l'humanité. Des peuples ne peuvent être indéfiniment au-dessus d'autres peuples, sinon l'humanité serait sans sens. Le progrès n'est pas prescrit pour un peuple mais pour tous les peuples du monde, sauf qu'il y a des desseins dans le principe immanent qui régit la marche de l'histoire. Et les hommes sans qu'ils prennent conscience sont malgré eux pris dans le jeu de l'histoire ; jeu qu'ils ne font qu'exécuter parce qu'ils doivent l'exécuter au regard des forces de l'histoire ; ce faisant, ils deviennent inconsciemment des instruments dans la marche de l'histoire.

Un paradoxe que les guerres, une « nécessité de l'histoire » ? Et jusqu'à quand les guerres lorsque l'on sait que, partout dans le monde, il n'y a pas de guerre sauf en Afrique et au Proche et Moyen-Orient ; et ça diminue. La guerre en Ukraine n'est qu'une exception en Europe, relevant d'un litige non réglé depuis la fin de l'Union soviétique en 1991.

En revanche, le conflit israélo-palestinien qui ne cesse et va jusqu'au génocide franc aujourd'hui et l'Occident regarde, soutenant Israël sans penser que l'histoire peut se retourner, comme ce qui s'est passé pour les peuples colonisés et qui se sont libérés de leurs tutelles coloniales.

Le même processus évolutif est en train de s'opérer pour le peuple palestinien avec la tutelle coloniale qu'est Israël, soutenu par les États-Unis. Il en ira de même pour la guerre en Ukraine qui oppose la Russie à l'Occident. Le problème est que, dans tout processus historique, les événements s'enchaînent et poursuivent le même but, la même finalité qui est le « progrès du monde ». A l'instar des progrès historiques passés, parce que c'est tracé par lamarche immanente de l'histoire.

Aussi peut-on dire ces événements historiques vont épuiser ce pourquoi ils ont été provoqué parce qu'ils relèvent des « nécessités de la marche de l'histoire ». Et l'histoire l'affirme sans l'ombre d'un doute que ce qui viendra après ces guerres transformera de nouveau le monde.