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La pomme de Newton, une pastèque algérienne

par Mourad Merzagui

Au nouveau bachelier qui a obtenu une moyenne générale de 17,18 (20 en Maths, 19 en physique, 17 en sciences?) très affligé par un 07/20 en philosophie (note qu'il récusait avec amertume d'autant plus qu'à un éventuel recours l'académie lui a opposé un niet), j'indiquai qu'Albert Einstein recalé à des tests d'entrée à l'université se fortifiait en admettant ne pas être compris.

Jusqu'à la classe terminale un jeune est dans la situation de la cellule totipotente, cette unité du vivant apte à se transformer en n'importe quel composant tissulaire de l'organisme : un neurone (cellule nerveuse), un hépatocyte (cellule du foie), un globule blanc (cellule du système immunologique)... En d'autres termes le jeune peut finir enseignant, biotechnicien, élément des services de sécurité? chercheur et évidemment aussi victime du chômage. S'il est évident que la réalité désastreuse du système scolaire est masquée par les taux de réussite à l'examen du bac de plus en plus exagérés, nous ne pouvons pas néanmoins nier qu'une jeunesse studieuse évolue encore chez nous.

Qu'en est-il alors vraiment du verdict de l'INSEAD (The business School for the World) reléguant notre pays à la dernière place en matière de recherche et d'innovation ? S'il titille l'ego de ceux qui s'estiment nobélisables, il n'en demeure pas moins que le rang, le dernier, que nous occupons dans le classement repose sur des appréciations objectives.

Aujourd'hui près de cinquante ans après notre indépendance nous faisons appel aux étrangers pour nous réaliser de simples ouvrages qui devraient être à la portée de nos architectes, ingénieurs? telle l'autoroute Est-Ouest, les blocs qui servent d'édifices public ou encore les immeubles d'habitations ... Le gouvernement utilise le terme chantier pour ces petites réalisations alors que celui-ci doit être réservé aux structures de dimensions importantes et non pas à ces produits du programme de millions d'HBM, de palais anachroniques? de voies rapides).

Les Chinois nous ont bien tancé (en vérité ils ont répliqué à notre malveillance) : «vous auriez construit votre pays nous ne serions pas là pour le faire à votre place». Un diplomate sud-coréen quant à lui nous a vraiment plaints en nous rappelant qu'à notre indépendance en 1962 nous étions mieux lotis qu'eux les Asiatiques en infrastructures (que nos parents ont bâties sous la férule du colon); de surcroît nous disposons davantage de ressources naturelles. Aujourd'hui la Corée du Sud est une puissance économique alors que notre pays est ramené irrémédiablement à l'âge de pierre.

Nous devons donc impérativement nous enquérir des obstacles qui entravent le processus de maturité de nos enfants devenus doctorants, chercheurs? et qui restent mortellement impuissants à innover.

Pour comprendre la problématique, référons-nous à l'oxygène que consomme l'organe d'un être vivant et qui est en rapport avec ses fonctions. Faisons le parallèle avec le budget alloué par un État à ses organismes, institutions...

Chez l'être humain le cerveau consomme le cinquième de l'oxygène total brûlé par l'organisme entier. Son activité le requiert. Seulement chez l'Aplysie, un organisme simple très étudié en neurosciences, le système nerveux qui est fait de quelques arcs réflexes (grossièrement c'est un système carillon, à un stimulus, une réaction) consommerait moins d'énergie que son siphon (tube digestif).

Quoi que l'on dise nous ne sommes pas un pays dont le rendement de sa recherche (activité cérébrale) rend compte de l'argent qui lui est alloué. Dans pareille situation il faut redouter une «néo vascularisation», une prolifération de cellules nerveuses (situation maligne) qui n'ajoute rien au rendement cérébral, au contraire, un déficit de l'idéation y est toujours diagnostiqué.

Des observateurs n'ont pas manqué de signaler que le budget affecté à l'université, à la recherche ne servait pas à promouvoir le savoir, la formation, l'amélioration du cadre et des conditions de vie et de travail des universitaires, corps enseignant, étudiants et travailleurs. Il est quasiment géré comme celui qu'affecte le ministère de l'Habitat à ces gouffres du Trésor public que sont les OPGI (dont l'inutilité n'est plus à prouver) et qui sont à l'origine de toutes les pouilleries où sont déplacées les familles, parquées. («Pourquoi tant de cruauté envers les gens du savoir ?» El Watan, Idées-Débat des 01 et 02 septembre 2007)

L'argent serait de l'aveu de nombreux critiques voué au tourisme... à la confection de laboratoires stériles, rudimentaires dans leur fonctionnement, une assignation à d'autres fins. Ce qui en ressort de concret ce sont pratiquement des manipulations d'expériences abouties que la vulgarisation scientifique diffuse via Internet... Évidemment nous pouvons en toute légitimité nous prévaloir de publications d'Algériens dans des revues de renom (sauf qu'il s'agit de recherche fondamentale dans souvent des cas, du ressort du mérite exclusif de quelques chercheurs, parfois isolés). (Op. cit.)

Ceux qui ont suivi le journal télévisé de notre ENTV relatant l'exploit de ces ingénieurs algériens qui ont construit un avion sans pilote ont dû remarquer sa roue dégonflée !

Le gouvernement a beau claironné que priorité est donnée à l'éducation nationale, (scolarité gratuite, obligatoire?), après des années d'enseignement tout-scolaire l'individu algérien, culturellement lamentable, se retrouve vidé de son énergie dans les enclos appelés spécieusement établissements, centres de formation, campus... Il y est insidieusement poussé à consumer le legs de ceux qui ont peiné pour l'acquérir et le lui confier. Il est carrément dépouillé de l'entendement critique, cruciale pour sa sauvegarde. («Le pouvoir en Algérie : ce n'est pas sorcier !?» El Watan, Idées-Débat des 08 et 09 février 2009).

Les ateliers dont se targuent nos décideurs, sont en fait des opérations d'affairistes et n'ont rien à voir avec la recherche scientifique. Ils répondent au souci de complexification du système carillon par des mécanismes létaux dont le dispositif ANSEJ donne un avant-goût dont se fait la fin en queue de poisson dans des situations hélas nombreuses?

Le projet le plus abouti est en réalité celui que la force maligne concocte sournoisement : le parcage de notre peuple et son maintien en survie pour un office odieux : faire figure d'être «exotique» ridiculement infantile qui n'a pas su se hausser parmi ses congénères à la condition humaine par le rituel le plus élémentaire, l'action et son corollaire l'innovation.

Notre état languit au stade d'avorton, aucun de ses tissus n'atteint la «spécialisation». Comme dans une grossesse arrêtée par des actes délictueux - dont le rôle positif de la colonisation constitue la prescription abortive la plus patente. Mais surtout cet activisme artificieux dont on réalise aujourd'hui la matérialité en suivant les circuits de Bernard Henri Levy. Combien sont-ils ceux de sa secte, le sionisme, à agir en secret dans nos contrées arabes ?

Dans cette situation qui perdure il n'est pas incertain que les copies de nos bacheliers connaissent le sort des bulletins de votes !

PS : Nous sommes en été, nous pourrions toujours tombés sur une pastèque irriguée. Une innovation que n'a pas pris en compte l'INSEAD dans son dernier classement !