Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Entre souhait et résignation

par Abdelkrim Zerzouri

Plus d'un mois après une déclaration du ministre de la Santé qui a fait état, le 5 juin dernier, d'une prise de mesures sanitaires nécessaires par le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs en vue d'une éventuelle réouverture des mosquées, les portes des lieux de prière restent toujours closes. Après, une légère discussion a eu lieu autour de la question, puis le silence, plus personne ne parle de la réouverture des mosquées, du moins plus d'une manière ouverte et publique. Car, en aparté et dans l'anonymat, les fidèles ruminent de mauvaises appréciations à l'égard des autorités, qui ont tout permis, se plaint-on, ou presque, sauf les prières collectives dans les mosquées, qui restent suspendues à travers l'ensemble du territoire national depuis le 17 mars dernier, en vue de préserver les vies des citoyens et «accompagner les mesures fermes prises par l'Etat dans le cadre de la lutte contre la propagation du Covid-19", selon des conclusions de la commission de la Fatwa. Faut-il croire qu'il s'agit là d'une exception algérienne ? De nombreux autres pays, où le Covid-19 connaît pourtant une plus vaste propagation, ont permis la reprise des prières collectives dans les mosquées, dont la Tunisie, la Turquie, l'Arabie Saoudite, l'Iran, la Jordanie, le Liban, l'Egypte, la France et même dans la mosquée El Aqsa, et bientôt le Maroc, qui a décidé de rouvrir les mosquées à partir du 15 juillet sous la pression de la rue et sous des conditions sanitaires assez strictes et sans autoriser la prière du vendredi, qui doit encore attendre. En Algérie, aucune date précise n'a été émise concernant la réouverture des mosquées. La commission ministérielle de la Fetwa a affirmé, le 16 juin dernier, qu'elle aspire comme tous les autres Algériens à rouvrir les mosquées, mais elle se résigne à l'avis des experts en santé publique et le Comité scientifique de suivi de l'évolution de la pandémie du coronavirus, qui confirment que les conditions ne permettent pas encore l'ouverture de toutes les activités, en particulier celles qui reçoivent un grand nombre de personnes et qui se déroulent dans des espaces clos. De son côté, le ministre des Affaires religieuses ne se départage pas de sa réserve, relevant à chaque occasion qu'on aborde le sujet que le gouvernement est seul habilité à se prononcer sur ce registre, en concertation avec le Comité scientifique de suivi de l'évolution de la pandémie en Algérie. La Commission de la Fetwa relevant du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs, s'est réunie lundi 6 juillet avec les membres du Comité scientifique de suivi de l'évolution du coronavirus, non pas pour discuter de la réouverture des mosquées mais pour le renforcement des mesures préventives face au nouveau coronavirus (Covid-19) durant la saison estivale et en prévision des prochaines occasions sociales et religieuses dont les fêtes et l'Aïd El Adha. Est-ce que tout est dit à propos d'une suspension des prières dans les mosquées qui s'inscrit dans la durée ? L'Algérie peut-elle faire bande à part sur cette question dans le concert des pays arabo-musulmans et même étrangers ? Ce qui est également indispensable à savoir : jusqu'à quel point les gens seront-ils disciplinés dans ce contexte et si l'on peut à la longue éviter une manipulation ou une exploitation politicienne de la question pour attiser la colère des citoyens ? Aussi, pourquoi ne pas rouvrir les mosquées et les mettre au service du Comité scientifique de suivi de l'évolution de la pandémie du coronavirus, notamment sur le plan de la pédagogie sanitaire et la sensibilisation des fidèles ? N'est-ce pas là une vocation forte de la mosquée ?