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Pas en notre nom !

par M.Saadoune

Les médias occidentaux et arabes pavent le terrain à l'intervention militaire occidentale contre la Syrie. Le bellicisme affiché ne fait même pas semblant d'attendre le résultat de l'enquête menée sur le terrain par les experts de l'Onu pour déterminer la nature des armes chimiques utilisées et qui en a fait usage. Les Russes continuent de s'opposer avec une grande vigueur verbale au bellicisme occidental mais ils ont fait savoir qu'ils ne mèneront de «guerre» contre personne. Ce n'est pas un feu vert, même si la presse du Golfe le suggère.

Devant la décision annoncée des Occidentaux de frapper la Syrie, Moscou n'a pas une grande marge de manœuvre. Aider le gouvernement syrien est une option, faire la guerre à sa place n'est pas à l'ordre du jour. Mais il est clair que pour Moscou, ce sera, une fois de plus, la preuve que les lois internationales ne comptent pas pour les Occidentaux. Ou alors ils les interprètent à leur guise. La machine de guerre - et de mensonges - des Occidentaux est en marche. Elle ne s'embarrasse pas en effet de la légalité qui est un souci secondaire, pas plus que de celui d'établir la vérité des faits. Cela fait longtemps que le discours impérial énonce la règle que la vérité est ce qu'il décide. On est dans le déjà-vu. Les services de renseignement américains auraient entendu des conversations entre le ministère de la Défense «en panique» et le «chef de l'unité des armes chimiques» après l'attaque présumée. On ajoute le mot panique pour faire «vrai» mais l'armée syrienne serait la seule au monde à parler «en clair» en pleine guerre.

Il ne manque plus, écrit un confrère sur Facebook, «qu'à appeler Colin Powel avec sa fiole, et dire merci à la presse embedded». Pourquoi en effet changer de scénario qui marche ? Dans dix ans, ceux qui auront mené la guerre ne seront plus là et la presse occidentale pourra, comme elle le fait aujourd'hui pour l'Irak, concéder que c'était des mensonges. Aujourd'hui, exprimer quelques doutes sur la véracité d'accusations fondées sur des «infos» des services de renseignement appuyées par un matraquage médiatique massif serait le signe qu'on défend Bachar. Même Haytham Manna, opposant au long cours et responsable à l'étranger du Comité de coordination nationale pour le changement démocratique, en est accusé car lui ne voit dans l'affaire des attaques chimiques qu'un «coup monté».

Mais le pire pour nous, en tant que citoyens algériens, est de voir la Ligue arabe dont notre pays est membre servir d'alibi, de faire-valoir et même de pousse-au-crime en Syrie. Ce n'est pas la première fois. Cette ligue est totalement tombée entre les mains des monarchies du Golfe, elle n'exprime plus que les seuls intérêts des monarques du Golfe. Certes, l'Algérie a exprimé des «réserves» sur la résolution de la Ligue arabe qui soutient ouvertement l'intervention militaire occidentale et qui accuse, sans attendre les résultats de l'enquête, le régime syrien. Mais ces «réserves» ne suffisent plus. Il faudra que l'Algérie - et d'autres pays sont dans ce cas - clarifie les choses et dise si cette ligue exprime le point de vue de tous les Etats ou celui des rois et émirs du Golfe seulement.

 Pour l'opinion algérienne, au-delà des clivages idéologiques, cette ligue ne les représente pas. Ils n'acceptent pas qu'elle parle en leur nom et au nom de leur Etat. Ce n'est plus une ligue des Etats arabes, c'est un instrument aux mains de l'Arabie Saoudite et du Qatar mis au service des intérêts extérieurs. Il faudra bien se décider un jour à en tirer les conséquences. Le plus tôt serait le mieux.