Alors que la guerre en Ukraine exacerbe les tensions et pousse l'Europe vers une frénésie de réarmement, une question essentielle se pose: voulons-nous préparer nos enfants à mourir dans une guerre sans fin, ou bien leur offrir un avenir durable, basé sur la justice sociale, la coopération et le progrès écologique ?

Cette tribune propose une autre voie, audacieuse et urgente, qui replace le développement humain au cœur de notre sécurité commune, en Europe comme en Afrique. Un avertissement historique, une leçon contemporaine.

Le discours prononcé par Vladimir Poutine à Munich en 2007 reste un avertissement prophétique. Il dénonçait alors un ordre mondial dominé par un monopole occidental-politique, militaire, économique -menaçant la stabilité planétaire. L'expansion de l'OTAN vers l'est, la gestion à sens unique des valeurs démocratiques, tout cela était vu comme une provocation stratégique par Moscou. Cette vision éclaire aujourd'hui son offensive en Ukraine. L'Europe y est confrontée à un dilemme : soutenir la souveraineté ukrainienne sans se perdre dans une course aux armements massive et à court terme qui affaiblirait nos sociétés de l'intérieur. La dépendance envers les États-Unis, la montée des tensions sociales et le renouveau des forces d'extrême droite en Europe sont autant de signes que cette voie guerrière fragilise notre propre sécurité. Le plan de paix américain et les divergences européennes. Un plan de paix en 28 points, proposé récemment par Washington, suggère des concessions à Kiev-reconnaissance tacite de certains territoires annexés, réduction des forces armées, renoncement à l'adhésion à l'OTAN.

L'Europe, elle, réclame des garanties plus solides, un rôle politique à sa hauteur dans les négociations, et la nonreconnaissance des annexions.

Cette divergence révèle la complexité du jeu diplomatique actuel, où sécurité et souveraineté se malmènent mutuellement. Réorienter nos budgets : du réarmement au développement humain. Face aux défis internes et externes, la réponse n'est pas dans la militarisation accrue mais dans une révision audacieuse des priorités budgétaires. Sur les 850 milliards d'euros initialement prévus pour renforcer l'armement européen, près de la moitié pourrait être investie dans la lutte contre la pauvreté en Europe. Cela signifie renforcer les systèmes sociaux-santé, éducation, logement, protection sociale-moderniser les infrastructures, favoriser l'insertion professionnelle, puis engager une transition écologique inclusive créatrice d'emplois et de cohésion sociale.

Un tel investissement désamorcerait les tensions internes, offrant une arme puissante contre la montée des extrêmes. L'Afrique, un partenaire stratégique pour une nouvelle sécurité. L'autre moitié du budget pourrait être consacrée à un partenariat renforcé avec l'Afrique, continent porteur d'espoirs et de défis cruciaux. L'Afrique détient 60% des meilleures ressources solaires mondiales et un potentiel éolien immense. Elle regorge de ressources minières indispensables à la transition énergétique-terres rares, matériaux pour batteries, photovoltaïques. Mais elle est aussi un producteur clé de matières agricoles tropicales, dont dépend la sécurité alimentaire européenne. Investir dans l'industrialisation locale, la gouvernance renforcée, la santé, l'éducation, et la transition énergétique en Afrique, c'est s'assurer un approvisionnement stratégique stable et créer des emplois, tout en réduisant les flux migratoires. Une sécurité humaine fondée sur la coopération et le développement. La véritable sécurité ne se mesure pas en tanks ou en missiles, mais en éducation, santé, emploi, stabilité politique et respect des droits fondamentaux. En développant le social en Europe et en investissant dans l'Afrique, l'Europe s'affranchit des dépendances militaires et des logiques de confrontation. C'est une vision synergique où le développement humain, économique et écologique dans les deux régions crée un cercle vertueux. Une Europe apaisée, une Afrique en croissance, c'est une paix durable, une diplomatie renforcée, et un avenir partagé plus sûr. Agir maintenant pour un monde meilleur.

Le choix est clair et courageux

Détourner 850 milliards d'euros du réarmement vers des politiques sociales en Europe et un développement stratégique en Afrique, c'est préparer nos enfants à vivre, non à mourir dans un conflit. C'est bâtir une stabilité sociale et économique robuste, garantir l'accès aux ressources essentielles, et renforcer la paix par la coopération. Ce défi politique et moral est à portée de main. Il appelle à un sursaut européen, fondé sur la responsabilité, l'intelligence collective et la solidarité. L'heure est venue de tourner la page des vieux réflexes guerriers pour embrasser un horizon où paix et progrès humain s'entrelacent. L'Europe et l'Afrique ont tout à gagner à avancer ensemble, dans un partenariat renouvelé, pour que les prochaines générations héritent d'un monde digne de leurs rêves.