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Sidi Lahcen: Quiproquo dans la filière lait, protesta chez les producteurs

par M. Delli

Un grand nombre de producteurs de lait de la grande daïra de Sidi Lahcen ont protesté pour exprimer les difficultés auxquelles ils sont confrontés dans l'exercice de leurs activités. C'est en majorité les éleveurs de bovins qui fournissement la laiterie Safir, plus connue sous le nom des «Frères Ziane», dans la commune de Sidi Lahcen, qui sont le plus affectés par les retards dans le versement de la subvention de l'Etat estimée à 12 dinars par litre. Certains éleveurs de Sidi Khaled et Boukhanifis iront jusqu'à menacer de cesser carrément l'activité en sacrifiant le cheptel car, ont-ils signalé, les charges deviennent insupportables sans la prime d'encouragement décidée par l'Etat. Pour comprendre le problème, nous nous sommes rapprochés des services agricoles de la wilaya de Sidi Bel-Abbès. On apprend que la subvention objet du litige était jusqu'au mois d'avril dernier gérée par l'Office national interprofessionnel du lait. Depuis cette date, par décision du ministère de l'Agriculture, la gestion de ce volet a été attribuée aux DSA. Ceci dit, a-t-on expliqué, la DSA ne gère pas le passif et les éleveurs affiliés aux 8 laiteries de la wilaya, y compris ceux de la laiterie Safir, ont été régularisés pour le mois de mai et une opération d'assainissement est en cours avec le concours de la chambre de l'agriculture. Si la DSA ne prend pas en charge le passif, c'est que les éleveurs, dont certains n'ont pas été régularisés depuis une année, ne seront pas indemnisés.

A ce propos nous avons contacté le gérant de la laiterie Safir qui s'est expliqué en évoquant un grand litige avec l'ONIL qui date depuis l'année 2012. Notre interlocuteur a tenu à présenter la laiterie qu'il gère en avançant le chiffre de 200 travailleurs sans compter les richesses générées pour la région par un élevage propre de 800 vaches laitières. En effet, confirme-t-il, il existe un grand litige entre la laiterie et l'ONIL qu'il remet sur le compte de la « bureaucratie et du régionalisme». Le 27 juin 2013, une inspection dépêchée à partir d'Alger s'est présentée à la laiterie vers 12 heures 30 minutes à un moment où les collecteurs de lait étaient en phase de livraison. Une bonne partie est restée en dehors de la laiterie sans pouvoir y accéder pour livrer le lait. Les inspecteurs sont repartis la même journée en établissant un rapport en l'absence de la DSA et des services concernés de la wilaya. Jusqu'à maintenant «nous n'avons été destinataires d'aucun questionnaire». La convention signée avec l'ONIL, explique le gérant, stipule dans son article 13 que tous litige devra être réglé à l'amiable, sinon devant le tribunal territorialement compétent. Depuis, il n'y a eu aucune plainte de l'ONIL et la laiterie n'est pas informée du contenu du rapport. En date du 6 décembre 2015 la laiterie a déposé un dossier complet avec tous les bilans certifiés par un commissaire aux comptes pour la régularisation de la subvention et de la prime d'intégration qui lui revient de droit. Depuis cette date, l'ONIL a refusé de verser l'argent. Il est donc devenu impossible pour la laiterie de régulariser les producteurs. Si cette situation perdure, le service du contentieux de Safir se prépare pour une action en justice. Si, en effet, les inspecteurs ont relevé une quelconque fraude, pourquoi l'ONIL n'a-t-il pas déposé plainte depuis ce temps ? s'est interrogé notre interlocuteur. Avec ces situations de «blocage» c'est 200 travailleurs qui seront sacrifiés et 800 vaches laitières qui finiront chez le boucher !

On considère que c'est un acharnement de l'ONIL à l'égard de laiterie, car d'autres dans la même activité ont été régularisées sans bilans, ni équilibre des comptes. De son côté, la chambre de l'agriculture estime que la filière doit être assainie, car beaucoup de dépassements sont enregistrés. C'est toute une chaîne, depuis l'éleveur au transformateur de lait en passant par le collecteur, qui devrait être revue et actualisée. Il n'est pas normal qu'un éleveur de 20 vaches fournisse une quantité bien loin de sa capacité de production. Une vache produit en moyenne une quinzaine de litres par jour et des éleveurs livrent le double, parfois le triple.

Certaines étables sont vides et leurs propriétaires continuent de livrer du lait pour encaisser la subvention. En plus des subventions sur l'aliment du bétail, l'Etat verse une prime de 6 millions de centimes pour chaque génisse achetée à une pépinière ou chez un importateur. Faites le compte pour l'achat de 700 vaches !

Un éleveur producteur de la région ayant pignon sur rue avait déclaré l'achat de 700 vaches. Après vérification avant le passage du ministre de l'Agriculture, il n'y avait qu'une trentaine de génisses de faible qualité dans son étable. De notre tour d'horizon parmi les intervenants de la filière, nous avons compris qu'il s'agit de gros intérêts et chacun y trouve son compte en l'absence d'un dispositif de contrôle rigoureux.