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Menace de mort contre Kamel Daoud: Hamadache condamné à six mois de prison, dont trois ferme

par Houari Barti

Abdelfattah Hamadache, chef du parti non agréé « Front de la Sahwa islamique salafiste libre » a été condamné, hier, par le tribunal d'Oran à une peine de 6 mois d'emprisonnement dont trois fermes, assortie d'une amende de 50.000 dinars, à l'issue de son procès l'opposant au journaliste et écrivain Kamel Daoud.

Le verdict a été prononcé en l'absence du mis en cause, poursuivi pour le chef d'accusation de « menace de mort », mais aussi en l'absence de l'avocat de Kamel Daoud, Me Fodhil Abderrezak.

Contacté par le Quotidien d'Oran, ce dernier s'est dit « satisfait », lui et son client, du jugement prononcé par le tribunal, sur le « plan symbolique surtout », a-t-il précisé. Un jugement qui confirme, a-t-il dit, la culpabilité du mis en cause et reconnaît le « caractère de victime à mon client ». Pour ce qui est de Abdelfattah Hamadache, nos tentatives de prendre attache avec lui pour savoir s'il comptait toujours faire appel du jugement n'ont pas abouti. Il avait, en effet, annoncé, lors de son procès tenu le 1er mars dernier, qu'il n'hésiterait pas à faire appel au jugement au cas où il serait reconnu coupable. Hamadache a un délai de 10 jours, à partir de la date de notification du jugement, pour introduire son appel.

Le procureur du tribunal d'Oran avait, pour rappel, requis lors du procès tenu le 1er mars dernier, une peine de six mois de prison ferme, assortie d'une amende de 50.000 DA contre Abdelfattah Hamadache, pour le chef d'accusation de « menace de mort », à l'encontre de l'écrivain et journaliste Kamel Daoud. L'affaire remonte au mois de décembre 2014, lorsque le salafiste Abdelfatah Hamadache avait publié un post sur sa page Facebook, dans lequel il appelle le régime algérien à appliquer «hadd errida» (peine de mort pour apostasie), contre Kamel Daoud, le qualifiant «d'apostat» et de «sionisé» qui insulte « Allah» et le «Coran» et «qui combat l'islam». Un appel qui a suscité une réaction immédiate du chroniqueur qui a déposé, en date du 14, du même mois, une plainte contre Hamadache pour «diffamation» et «menace de mort». Le juge de la 5ème chambre d'instruction du tribunal d'Oran retiendra finalement le chef d'inculpation de «menace de mort» et rejettera celui de «diffamation». C'est, sans avocat, car préférant assurer lui-même sa propre défense, que Hamadache s'est présenté devant la présidente du tribunal de la cité Djamel-Eddine d'Oran. Le plaignant, Kamel Daoud, absent au procès «pour des raisons de santé» était représenté par son avocat Me Fodhil Abderrezak.

 Interrogé par la juge sur les propos, objets de la plainte, Hamadache assume pleinement. «Mes propos s'adressaient aux autorités algériennes et non à Kamel Daoud que je ne connais pas personnellement. Je ne l'ai jamais rencontré, ne lui ai jamais parlé et je ne l'ai jamais menacé de mort», s'est-il défendu. Il ajoute: «Mes propos sont à placer dans le cadre de ma liberté d'expression, celle-là même revendiquée par Kamel Daoud pour s'attaquer à l'islam et aux constantes nationales ». En réponse à une question posée par l'avocat de Daoud, Me Fodhil Abderrezak, en quelle qualité l'accusé a tenu ses propos, Hamadache répondra : «Je me suis exprimé en tant que citoyen algérien et en tant que membre de l'Association des « Ulémas musulmans». Dans son plaidoyer, l'avocat de la partie plaignante mettra l'accent sur le caractère de «fatwa de mort » des propos de Hamadache et demandera au tribunal de «réhabiliter son mandant» et «un dinar symbolique en guise de réparation du préjudice ». Pour sa part, le représentant du ministère public soulignera que l'accusé « n'a pas respecté les canaux légaux pour dénoncer un prétendu acte de blasphème lequel est puni, selon la loi algérienne, d'une peine qui peut aller jusqu'à trois ans de prison ferme». Au lieu de cela, a-t-il ajouté dans son réquisitoire, «l'accusé a utilisé des médias suivis par des millions de personnes pour demander l'application de la peine de mort, ce qui constitue tous les éléments du crime de «menace» punis par l'article 284 du code pénal.