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Les critiques de Benflis

par R. N.

Lors de son allocution devant le conseil national du parti de l'Union des Forces démocratiques et sociales, de Noureddine Bahbouh, hier, à Zéralda, l'ex-chef du gouvernement, Ali Benflis, n'a pas été avare en critiques sur la situation économique du pays.

C'était une «opportunité», dit-il de «partager quelques idées et analyses, autour du thème de la crise énergétique actuelle et ses implications sur l'économie nationale». «Notre économie est une économie de rente», une caractéristique qui «s'est accentuée au cours de cette dernière décennie», affirme Benflis.

Pour lui, l'économie algérienne «souffre d'une extrême et inacceptable dépendance vis-à-vis des marchés extérieurs», et manque d'une «vision globale» et d'un «modèle cohérent».

«Si j'avais à trouver un mérite à la crise énergétique actuelle, ce serait celui d'avoir contribué à discréditer certaines assertions, dénuées de tout fondement, et de mettre à nu l'état déplorable auquel notre économie a été vouée», affirme l'ancien chef du gouvernement.

Il estime que «la crise énergétique produira, inévitablement, des répliques et aura, immanquablement, des implications qui ne manqueront pas d'approfondir la crise de système, à laquelle notre pays est confronté».

«La crise énergétique est venue démentir, formellement, ces assertions, montrer le vrai visage de notre économie et dévoiler, à chaque citoyen, ses innombrables faiblesses ainsi que les insuffisances et dysfonctionnements dont elle souffre malheureusement», affirme Benflis.

SITUATION DEFAVORABLE

L'orateur considère que le pays «n'est pas dans une situation favorable pour affronter et dépasser les conséquences de cette crise, au moindre coût, que ce soit du point de vue politique, économique ou social».

«Du point de vue politique, le traitement des grandes crises nécessite une direction politique forte qui possède une vision précise de la démarche à suivre et qui est capable de mobiliser pour la mettre en œuvre». Selon ces caractéristiques, la direction politique «n'existe pas dans notre pays, aujourd'hui». «La vacance du pouvoir a fragilisé nos institutions et leur a enlevé toute capacité de réaction, face aux grandes crises quelles qu'elles soient». Selon lui, les «dix années d'aisance financière» ont «fait perdre, à notre pays, le sens de la rigueur, de la prudence et de l'efficience dans l'allocation des ressources, transformant nos politiques publiques en de simples opérations de distribution de la rente, et transgressant les règles les plus élémentaires, à suivre, pour jeter les fondements d'une économie moderne». Elle nous ont «fait perdre de vue la valeur du travail» et renforcé «la mentalité de l'assistanat». «Ces observations avérées et ces constats établis nous conduisent à une seule déduction : notre pays est dans une situation très fragile et précaire pour pouvoir affronter une crise énergétique, extrêmement, dangereuse».

«PAS LE COURAGE D'ASSUMER»

Pour Ali Benflis, «le gouvernement n'a pas le courage» d'assumer cette situation «devant le peuple», car «il craint sa réaction» «appréhende, par-dessus tout, que ce dernier lui pose ces questions qui tombent sous le sens: où est passé l'argent ? Comment a-t-il été dépensé ? Pourquoi notre économie est restée dans cette situation de vulnérabilité alors qu'elle est censée avoir bénéficié d'une manne financière considérable ? Pourquoi ces enveloppes financières n'ont pas, pour le moins, réussi à corriger au moins certains dysfonctionnements parmi tous ceux ?nombreux- dont continue à souffrir l'économie nationale ? La gabegie, les détournements et la corruption ne comptent-ils pas parmi les principales causes de ces échecs ? Que fait le gouvernement pour remettre l'économie nationale sur de bons rails ?»

L'intervenant s'interroge sur le «retard» du gouvernement à élaborer «un plan d'urgence». «Malgré ce bouleversement de la conjoncture, le gouvernement a adopté cette loi de finances, sans même l'adapter à la nouvelle donne, comme si la crise énergétique n'était pas passée par là et comme si ses implications allaient, par je ne sais quel miracle, s'arrêter à nos frontières».

Pour Benflis, «des fortunes colossales se sont constituées dans notre pays», au cours de ces dernières années. «Le gouvernement est-il à ce point dans l'impossibilité de faire contribuer ces fortunes à l'effort de sacrifice, à travers une adaptation du système fiscal à l'instar de ce qui se fait dans tous les autres pays développés comme en voie de développement ?»

Selon lui, si le gouvernement refuse de «recourir à ces solutions», c'est en raison du fait que «le pouvoir politique en place, dans notre pays est fondé sur une base clientéliste et rentière».