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Les syndicats déçus : Une rentrée des classes qui s'annonce chaude

par Abdelkrim Zerzouri

«L'Unité nationale», c'est la leçon thématique choisie pour inaugurer la reprise des cours pour quelque 8.600.000 élèves et lycéens qui rejoignent aujourd'hui les bancs des classes pour la rentrée 2014-2015.

Une leçon qui appellerait, à l'orée d'une année scolaire qui s'annonce chaude, les élèves, les enseignants et les parents à la mobilisation des rangs, à la solidarité, au dialogue serein et constructif, à la vigilance face aux défis de l'instabilité qui frappe nombreux pays voisins. Hélas, loin du ménage de la préparation matérielle, laborieuse, engagée par le ministère de l'Education nationale en vue de garantir une rentrée scolaire « ordinaire » à tous les élèves, les échos qui nous parviennent ne prêtent guère à l'optimisme. « Tous les syndicats du secteur affûtent leurs armes pour en découdre avec la tutelle, immédiatement après le cap solennel de la rentrée », nous a-t-on confié. Malgré les récentes déclarations de responsables du ministère visant un apaisement sur le front social, la grogne des travailleurs du secteur, enseignants et corps communs, ne baisse pas d'un cran. « Les problèmes de cette année sont pires que ceux qu'on a vécus l'année précédente », estime M. Boudida Messaoud, porte-parole du Cnapest, qui parle carrément «d'une profonde déception des syndicalistes qui se trouvent bernés par des promesses sans lendemain ; et que dire lorsqu'on considère que des PV ont été remis aux syndicalistes, mais demeurés encre sur papier !» Pourtant, sur le plan social, la ministre de l'Education, Nouria Benghebrit, avait précisé que son département «prône la concertation et le dialogue» avec les partenaires sociaux et les syndicats «dans le cadre de la loi». Elle avait déjà appelé, lors d'un séminaire de formation des directeurs de l'Education, à adopter un système de bonne gouvernance à tous les niveaux, à travers une gestion «participative» qui vise à améliorer les résultats de tous les paliers d'enseignement dans le cadre d'une Charte de déontologie.

Autant dire un véritable plaidoyer pour la mise au point d'une politique de communication favorisant la concertation et le dialogue permanents avec les partenaires sociaux, l'amélioration de la gestion au sein de l'établissement éducatif, requérant dans ce sens la généralisation du mode de gestion participative à tous les niveaux, mais de quel oreille sera-t-il entendu ? Au cours des derniers mois, il a été organisé au moins trois rencontres avec chacun des neuf syndicats agréés, lesquels ont présenté quelque 140 revendications, ce qui reflète, selon un responsable du ministère, la « pleine disponibilité » de son département à participer au dialogue et à la concertation avec les représentants des travailleurs et des enseignants, concernant les problèmes et les préoccupations de ces derniers « dans le cadre de ce qui est autorisé par la loi ». Mais les syndicalistes demeurent sceptiques, « on ne croit plus à rien », nous a-t-on indiqué. Même l'annonce en grande pompe du règlement de la question des enseignants « en voie de disparition », où l'on parle de 150.000 enseignants et travailleurs du secteur qui bénéficieront, avant décembre 2014, d'une intégration et d'une promotion dans de nouveaux postes après la suppression des grades « en voie de disparition », ne dissipe pas le voile du doute qui s'est installé dans les relations entre la tutelle et les partenaires sociaux. A ce propos, le porte-parole du Cnapest nous dira qu'il s'agit là « d'un acquis qui date de 2012 et 2013, on a tout juste réglé un problème de traitement administratif des intégrations et promotions en question, rien de plus, rien de nouveau ». « Il faut aller vers des solutions radicales, et éviter surtout de verser dans les fausses déclarations », considère-t-il encore. Enfin, on soutient du côté de la tutelle que le cartable de l'élève sera moins lourd à la suite de l'allègement du poids des livres scolaires en plus des efforts menés pour réduire la liste des affaires et livres scolaires. Pareil pour la charge qui pèse sur les établissements dans certaines régions, notamment celles touchées par les dernières opérations de relogement, où il est prévu que 88 nouveaux lycées, 81 collèges d'enseignement moyen (CEM) et 270 écoles primaires, soient réceptionnés. «Toutes les capacités ont été mobilisées et tous les établissements sont prêts pour cette rentrée, notamment après l'évaluation de la situation par le ministère avec les responsables des collectivités locales dans les wilayas », a-t-on souligné dans ce sens. Soit, mais aura-t-on ainsi prévenu ou prémuni le secteur contre toute perturbation durant l'année scolaire ? Le syndicaliste qui exhibe un PV, clamant que les autorités ne respectent pas leurs propres engagements, fait découvrir tout le malaise dont souffre le secteur.