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Le terminator

par Mehdi el Amine

Combien d’années il faudra encore attendre pour faire le bilan du «cataclysme Chakib Khelil» sur le secteur pétrolier algérien ? Peut-être, le temps d’un dernier mandat. Ce n’est certainement pas un magistrat de l’ère Bouteflika qui le fera. D’anciens hauts responsables de Sonatrach, qui ont retrouvé une certaine liberté de parole, commencent en tous cas à le faire. On apprend ainsi que, dans la décennie de la régence Khelil, basée sur la prédation et les dessous de table, le crime ne s’est malheureusement pas limité aux seules commissions versées à des responsables algériens et leurs intermédiaires. A y entendre les experts ces Sonatrach, les dégâts sont plus graves. Quand on apprend que le gisement géant de Hassi R’mel a été sérieusement endommagé par sa surexploitation, sans mesures de précaution pour la préservation des immenses réserves, cela donne froid dans le dos. Hassi R’Mel, c’est la pupille de l’Algérie. Et sa vache à lait aussi. Il représente à lui seul plus de 70% de la production algérienne de gaz naturel. Qu’est-ce qui s’est passé dans les entrailles de ce gisement ? Pour exporter plus, Sonatrach n’a pas réinjecté assez de gaz pour prolonger la vie du gisement. Conséquence : la pression nécessaire à la remontée du gaz a baissé, la production aussi, mais surtout, «la pire des choses qui puisse arriver dans un gisement, piéger des quantités de gaz qui ne seront plus récupérables», selon Nazim Zouioueche, ancien PDG de Sonatrach.

Dans le sillage de la «solidarité gouvernementale», la ministre de l’Environnement Dalila Boudjemaa est une bonne élève. Pas un mot sur l’ouragan d’indignation suscité par la décision d’exploiter le gaz de schiste. Même pas sur la menace que fait peser la fracturation hydraulique sur la nappe albienne du Sahara dans un pays exposé à un stress hydrique permanent. Pas stressée du tout, Dalila Boudjemaa. Le nouveau ministre des finances, Mohamed Djellab, lui aussi, n’est pas stressé. Le scénario catastrophe du retrait d’Alliance Assurances de la Bourse d’Alger pour cause de dysfonctionnement dans le système de cotation, ne semble pas l’inquiéter outre-mesure. Il est vrai que le timing choisi par Hassan Khelifati, le PDG d’Alliance Assurances, n’est pas le bon. Une réaction peut être après le Mondial, ou après le Ramadhan ?

Le gouvernement a enfin décidé d’agir sur le contrat Cojaal, l’autre «affaire» de l’autoroute Est-Ouest qui n’a pas livré tous ses secrets. L’Etat ne devrait (enfin) pas tarder à le résilier. Cette décision a été reportée en 2008 pour cause de 3e mandat. Puis en 2013 pour cause de 4e. Aussi japonais «soient-ils», le tronçon Est était un gros morceau pour les capacités de Cojaal. Le bureau d’études italien chargé du suivi des travaux l’avait bien souligné il y a 6 ans. Mais les nippons ont fait preuve d’une remarquable capacité d’adaptation au contexte politique algérien. Eux aussi ont surfé sur le statu quo de la présidence à vie. Cela donne une autoroute achevée vers une frontière ouest fermée depuis 1994. Et un tronçon «en cours de réalisation» vers la Tunisie, première destination étrangère des vacanciers algériens.