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Mondial : émigration ou réussite politique ?

par Abdellatif Bousenane

Quelles sont les enseignements essentiels qu'on peut tirer de la participation de notre sélection nationale, la seule équipe arabe, à cette coupe du monde ? D'autant plus qu'aujourd'hui le football est devenu éminemment politique. Il est tout à fait banal d'expliquer en effet qu'une sélection nationale de football ou d'autre sport gagne une compétions internationale ou une médaille aux Jeux Olympiques grâce à ses dominantes techniques ou sa condition physique donc à la vertu de son entraînement antérieure. Une telle observation est cependant insuffisante pour expliquer pourquoi certaines sélections participent régulièrement dans des tournois mondiaux et gagnent systématiquement plus de titres que ceux d'une autre nation. Dès lors les distinctifs physiques et techniques ne suffisent pas à expliquer pourquoi les équipes et clubs européens remportent régulièrement les trophées (en nombre cumulé de titres). Ou pourquoi les pays dit du tiers monde, beaucoup plus nombreux, remportent ensemble beaucoup moins de trophées que la minorité de pays les plus développés. Dans cette perspective, de telles interrogations ont alimenté une certitude répandue notamment dans les cercles économiques à savoir que la dotation et le développement des ressources, aussi bien économiques qu'humaines, sont des déterminants de la performance sportive d'une nation. A partir de là, le cas algérien est très intéressant à observer de près. Pour s'interroger ainsi si la qualification de notre équipe nationale deux fois successivement à la coupe du monde est un indicateur sur la solidité de notre économie et sur la réussite des choix politiques menés ces dernières années en matière de développement d'une manière générale ?

La première observation qui nous vienne à l'esprit et qui va l'encontre de cette hypothèse, c'est la dominance des joueurs professionnels c'est à dire ceux qui évoluent dans des clubs européens et surtout une majorité parmi eux qui sont de naissance européenne notamment française, et donc ils étaient formés dans des écoles et des clubs européens depuis leur jeune âge. Ainsi donc, peut-on postuler que notre salut sportif nous viens de la dimension émigration/immigration et non pas de notre bonne gouvernance ?

Néanmoins, si on va au bout de notre analyse, avec une comparaison objective, on peut constater que la plupart des sélections nationales de notre niveau à savoir celles des pays arabes, africains et du tiers monde d'une manière générale, se constituent des joueurs qui évoluent dans des clubs professionnels européens en majorité.

Le Maroc a des joueurs professionnels de grande qualité techniquement parlant, l'Egypte est une grande nation de football arabe et africain, elle a également des stars qui jouent dans les meilleurs clubs allemands et anglais. La Tunisie aussi. Sans parler du Sénégal, l'Afrique du sud, l'Irak, la Turquie?etc. Or, l'Algérie est la seule équipe arabe qualifiée à ce mondial ! Ce qui est très significatif. Elle fait partie des cinq grands pays africains qualifiés à cette grande fête du foot. Ce n'est pas un hasard ! Ainsi donc, la dimension émigration/immigration forme une réponse un peu courte à note problématique. Par conséquent, cela peut conforter mon hypothèse, et affirmer ainsi une corrélation assez forte entre la participation à la coupe du monde et le climat politique générale dans un état. C'est-à-dire des bonnes performances macro-économiques, un PIB par habitant en constance croissance, un IDH (indice de développement humain) qui a connu effectivement un saut substantiel ces dernières années. Avec 0,713, notre pays est classé actuellement selon le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) dans la catégorie des pays à IDH élevé derrière les pays à IDH très élevé (les pays industrialisés et très développés) après avoir étai dans le classement des pays à IDH bas au début des années 2000. Il faut juste souligner que l'IDH repose en fait sur des critères quantitatifs et qualitatifs (éducation, santé...etc.) qui mesurent mieux le passage d'un enrichissement quantitatif à un mieux-être qualitatif. Il permet ainsi de classer les pays et constitue bien le reflet des inégalités de développement. Puis un dernier élément sans lequel tout effort politique de développement est voué automatiquement à l'échec, c'est la paix et la cohésion sociale.

Le FFS a comprit, peut-être, cet enjeu en choisissant la date du 17 juin pour sa rencontre avec Ouyahia. C'est la date du premier matche de notre équipe nationale contre la Belgique. Les membres de l'équipe de la présidence étaient bons joueurs en acceptant ce choix. Dès lors, en comprenant l'aspect éminemment politique de cette compétition mondiale, les dirigeants du plus vieux parti de l'opposition ont voulu marquer les esprits par cette sortie du moins surprenante le jour de ce match, disant qu'au final l'Algérie est au-dessus de toute divergence politicienne. Et qu'après tout, au-delà de nos couleurs et tactiques partisanes ou de nos convictions idéologiques, on va tous chanter? One... Two? Three? viva l'Algérie.