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Equipe nationale: Il faut oser?

par El Yazid Dib

Pourquoi en vouloir à l'un ou l'autre joueur quand moi je n'arrive pas à inscrire judicieusement un but dans ma chronique ? J'ai l'habitude de tirer, mais pas dans les buts. J'ai tiré sur des politiques, sur des comportements, j'essaie donc, à l'occasion, de me tirer d'affaires avec ce billet laconique.

Nous avons gagné en encaissant une défaite. L'honneur étant ainsi sauvegardé, il ne nous reste qu'à le conserver davantage. Qui aurait dit que notre onze allait remporter la coupe du monde ou être dans le carré d'or ? On n'a jamais développé cette névrose ou même tenté d'en arriver là par rêverie. Déjà avec nos vicissitudes à pouvoir constituer un bon gouvernement nous avons tout de même pu constituer une équipe nationale. Nous ne sommes plus dans les instances dirigeantes internationales en charges de l'humanité, de la paix et ses corolaires. Il y a certes beaucoup de joueurs professionnels avérés dans la mobilité et les trajectoires du cuir rond, mais aussi un large pouvoir discrétionnaire dans l'alignement du staff de combat. Vahid, comme Sellal à la différence que ce dernier est d'un humour de supporter crané, n'est pas en droit de se permettre encore de gagner par une défaite. Cette fois-ci ce sera un retour assuré vers les affres du souvenir. Loin d'une règle politique nous l'aurions fait sur tous les plans, ce succès à peine à portée de pied. L'emblème tricolore étoilé perdure à se hisser vers le firmament. Les hourras ne se tairont pas de si tôt. L'histoire est debout pour rappeler l'exploit. Mais Om dormane ne doit plus être un motif de somnolence ou un menu à rassasier à chaque faim. Le temps est pour l'avenir, d'ici dimanche une autre histoire reste à écrire face à une Corée égalitaire qui n'est pas venue pactiser avec un socialisme russe en quête lui aussi de mondialité pour tenter d'éclipser un temps soit peu l'avatar ukrainien. Chacun à son lot de pleurs et de vivats. C'est ainsi qu'en gagnant les deux matchs nous allons oublier la rudesse de ramadhan, les dangers du sahel et les étourderies quotidiennes à vivre.

Si nous avions difficilement évité l'anathème mal placé des pharaons nous n'avions pas pu conjurer l'ire des incubes déchaînés du stade maudit. Pourtant nous ne sommes pas des profanateurs, ni de tombes, ni de sarcophages. Nous sommes des enfants combattants, dignes fils de grands martyrs, nous ne cherchons qu'à marquer des buts. Comme adversaires, enfin nos partenaires. Notre tord aurait été celui d'avoir, éventuellement un excès permanent et séculaire dans l'adoration de notre mère patrie. Allah ghaleb ! Avant le match, tout indiquait chez les fans le tracé d'une victoire sans résultats. Chez les sceptiques, le rationnel en était plus présent, plus pressant et plus convaincant. Rien n'est facile avec une Belgique partant comme club favori pour ce mondial.

Comme la nature, la politique stadique a horreur du vide, du rien et de l'oisiveté de son intelligence. Elle outrepassera en hauteur des faits, les craintes semées lors d'une préparation nationale féconde, dont seuls les labours, certains eurent pu écorcher indignement ses sillons et ses vallées. L'Algérie a gagné, l'Algérie a réussi son coup de frapper d'un revers, le système et son mythe tendant à immobiliser l'énergie collective. La match Algérie /Belgique était la moitié d'une victoire. L'on n'a perdu que l'autre moitié, en seconde mi-temps. Le mérite donc dans ce duel reste à partager entre une Algérie trop défensive par défaut et une Belgique pressée d'en finir, avec un club mondialiste de l'Afrique du nord. L'Algérie n'est pas finie au bout de cette rencontre, ni encore ses aubaines ramollies à en faire un drame national. Il en reste d'autres. Elle est une éternité, tant que le ballon court sans s'arrêter à un score ou se cantonner dans 90 minutes. Un match international ne se termine jamais. Il se réitère autrement. Une continuité. Une dynamique dans le changement continuel. Son immortalité, elle la puise de ces forces que contient la diversité de ses fibres. Les tendances ne sont jamais pour elle des panneaux indicateurs d'orientation irréversible. Elles ne sont en fait qu'une richesse de son énorme générosité. La mémoire communautaire, éveille d'épopée à épopée, pour son compte l'esprit chevaleresque de ses artisans, tant au combat qu'aux funérailles, tant aux stades, que dans les rues. Si l'enthousiasme dans la rue peut revêtir le manteau de l'émeute, dans les complexes sportifs, il n'est qu'une seule main, un unique cri pour ovationner un onze, représentant une population, tout partis, idéologie, régions, confondus.

La beauté a beau à s'incruster dans nos mots, mais n'arrive point à se frayer de chemin vers nos propres convictions. Gagner un match n'est plus maintenant selon certains, un fait de réaliser un avantage dans le nombre de réalisations. Un Portugal, rempli de ballon d'or et de vedettariat a été estocadé par une Allemagne qui a encore de la sueur à produire. Le foot c'est presque comme un contrat commercial, la parité gagnant/gagnant, au qui dit mieux est toujours de mise. Le prochain match va par ricochet booster une équipe qui a raté la réussite sans pour autant perdre trop de chance. Il suffit d'y avoir le cœur dans les pieds, le pays dans la tête, le peuple dans les trippes. Courir, ne pas rechigner, transpirer et mesurer la circonstance seront les condiments d'un dopage normalisé. La tactique de Vahid est sujette à commentaires. Dans chaque téléspectateur, on constate le génie d'un grand sélectionneur national. L'algérien qui n'est pas dans ce sens exclusif va à tout instant refaire à sa manière la composante du onze national. Chacun y va de son analyse, à partir d'une chaise à l'abri de la chaleur de bel horizon. Car tout simplement, la diversité d'avis ne peut être une adversité. Nonobstant le fait qu'ils ne sont pas en leur totalité nés chez nous, faisons leur confiance. Comme les huiles de naftal.

En fait, nous aurions vu et vécu une histoire merveilleuse quoique encensée quelque part par de regret du sensationnel et surtout de la retrouvaille des repères perdus. On peut s'enorgueillir d'abord d'avoir une équipe, la seule du monde arabe qui se frotte aux grands groupements sportifs mondiaux et ensuite de n'avoir pas été trop humiliés, ni hués. Bien au contraire nos fennecs ont été grandement ovationnés par nos compatriotes en déplacement. L'histoire, comme une légende persiste à faire ses sillons et d'autres déplacements seront également programmés, ou dans les stades ou dans d'autres forums.

La victoire, la grande ; reste chez nous contenue dans ce consensus, foot, option et lotion féeriques qui a réussi là où la politique a échoué. Le rassemblement autour du noyau central ; l'amour de la patrie. L'engouement après cette victoire technique, sociale ou politique reste à capitaliser au profit d'autres projets de société. Oser est un impératif offensif pur et dur. Allez les verts !