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Télécoms Djezzy : des cabinets-conseils algériens sollicités

par Yazid Alilat

Le désormais feuilleton du rachat par l'Algérie de l'opérateur de téléphonie mobile Orascom Telecom Algérie (OTA) n'en finit pas de tirer en longueur sa toile. Jeudi, le ministre des Finances, qui dirige cette opération enclenchée en 2009 par l'Algérie pour faire prévaloir son droit de préemption lorsque l'égyptien OTH, propriétaire de OTA-Djezzy avait voulu la vendre au sud-africain MTN, a indiqué que le travail d'évaluation du cabinet français Sherman and Sterling LLP n'est pas terminé.

 En marge des débats sur la loi de finances 2012, il a affirmé dans des déclarations à la presse que ce cabinet d'audit et conseil, engagé fin 2010, n'a pas encore « terminé son travail ». Sherman and Sterling, sélectionné après un appel d'offres international lancé fin 2010, a prévu d'achever sa mission dans un délai de 100 jours, soit vers le mois de mai 2011, période durant laquelle le Premier ministre Ahmed Ouyahia avait réaffirmé la volonté de l'Algérie de mener à son terme l'opération de rachat de Djezzy. Selon Orascom Telecom Holding, la valeur de Djezzy est de 7,8 milliards de dollars, une estimation d'ailleurs confirmée par le groupe russo-norvégien Vimpelcom, nouveau propriétaire de OTH dont les actionnaires avaient, le 17 mars dernier, approuvé la fusion de leur groupe avec l'italien Wind Telecom qui détenait 51% d'OTH. L'Algérie, pourtant, avait estimé ce prix excessif.

Cabinets algériens sollicités

Mais, la veille de la déclaration de M. Djoudi sur la poursuite du travail d'évaluation de la valeur de Djezzy, le ministère des Finances avait lancé, soit mercredi dernier, un avis d'appel d'offres national pour sélectionner des cabinets d'experts-comptables algériens pour l'assister dans l'opération d'acquisition d'OTA. Selon l'avis d'appel d'offres du ministère, publié deux jours après un entretien à Alger entre M. Djoudi et le président de Vimpelcom Jo Lunder, les cabinets candidats doivent être de droit algérien, cumuler plus de 20 années d'expérience, et avoir réalisé au moins dix opérations d'audit et d'expertise et ou d'assistance ou de conseil.

Selon le ministère des Finances, les experts-comptables auxquels il pourra être fait recours pour la réalisation de ces prestations doivent être de nationalité algérienne, conformément à la nouvelle loi 10-01 relative aux professions, qui interdit aux étrangers d'exercer les professions d'experts-comptables et de commissaires aux comptes en Algérie. D'autre part, l'autre condition du ministère des Finances est que les cabinets qui ont déjà entretenu ou qui entretiennent actuellement des relations avec OTA, ou avec Sherman & Sterling, ne sont pas autorisés à participer à cet appel de présélection. Les cabinets en état de faillite, en liquidation, en cessation d'activité, ou même les experts-comptables qui ont fait objet d'un jugement affectant leur probité professionnelle, sont également exclus de cette présélection.

Cet appel d'offres confirme encore plus que l'Algérie, en dépit des suppositions ou des analyses des uns et des autres, reste toujours décidée à racheter Djezzy. A quel prix ? Là est pourtant la grande question, même si peu de choses ont filtré de l'entretien de M. Djoudi avec Jo Lunder, un entretien qui n'aurait pas abouti à des résultats tangibles, d'autant que Vimpelcom voudrait faire une bonne opération en obtenant le maximum du prix de Djezzy. Par ailleurs, Alger semble moins rigide sur les modalités de négociations avec les propriétaires de Djezzy, dans la mesure où M. Djoudi, qui a reçu le patron de Vimpelcom dimanche dans son bureau, avait dit au mois de mars dernier, juste après le passage d'OTH dans le giron de Vimpelcom, que « nous avons, en ce qui concerne (le rachat) d'Orascom Telecom Algérie (OTA), un seul interlocuteur en matière de licence, en l'occurrence OTH ». En acceptant de discuter avec Jo Lunder et non pas avec Naguib Sawiris, président d'OTH, l'Algérie fait une grande inflexion à sa position vis-à-vis de Vimpelcom, et assouplit sa position vis-à-vis du réel propriétaire de Djezzy. Dès lors, quelques questions se posent, notamment celle de savoir s'il n'y avait pas en fin de compte un deal entre Djoudi et Lunder pour une valeur moins importante de Djezzy, ou une entrée dans le capital d'OTA de l'Algérie à hauteur de 51%. Est-ce ce qu'on va demander aux cabinets-conseils qui seront sélectionnés à l'issue de l'appel d'offres de préparer l'entrée de groupes algériens dans le capital de Djezzy ?