Deux équipes : celle de Saâdane, celle de Bouteflika. La
première vient d'être «rendue» publique. On en connaît la liste, les noms, le
poids des joueurs, les blessures, les scores, les clubs d'origine et les
fonctions. La seconde, on n'en sait rien sauf ce qui ne nous intéresse pas ou
ce qui nous a déjà beaucoup coûté. On ne sait pas si elle va être maintenue,
licenciée, réformée, remaniée ou complètement dissipée. Pour l'équipe de
Sâadane, tous sont presque importés, faute d'une production nationale même
faite avec les pieds, et Sâadane l'a bien expliqué : Nous n'avons pas encore la
maîtrise des pieds pour nous permettre d'aller au Mondial avec le seul Hand
made local. Pour l'équipe de Bouteflika, tout est importé sauf ses hommes à
lui. Ce sont des locaux fabriqués à la main et gouvernés par les pieds. Pour
l'équipe de Saâdane, les choix se sont imposés : on n'a plus de système de foot
capable de produire de grands joueurs et donc, il faut tout importer : le gazon,
le ballon, les joueurs. Seuls les spectateurs sont une production locale. Pour
l'équipe Bouteflika, là au moins, tout est importé aussi mais dans un ordre
inverse : le gazon, le ballon, les spectateurs (opinion internationale plus
importante que les indigènes locaux). Les joueurs sont locaux tout en étant
accusés d'être importés de M'cirda. Autre trait : Saâdane va à la Coupe du
Monde, Bouteflika veut le monde sous sa coupe, sans jeu de mots. Autre
différence : Raouraoua donne la totale liberté à Saâdane qui peut voyager où il
veut et décider pour qui il veut. Ce n'est pas le cas de Bouteflika avec son
Raouraoua caché et occulte. Autre trait : Saâdane est élu par le peuple,
l'autre est élu par les siens qui le regrettent infiniment. Le croisement entre
les deux sélections peut continuer sans fin : dans les deux cas, des joueurs,
de l'une ou l'autre équipe, ont la double nationalité, sont blessés ou
blessants, ont donné des coups de tête à des arbitres (Chaouchi/Kodjia,
Cherif-Abbas/Kouchner). L'équipe de Bouteflika ayant joué aux billes quand
celle de Saâdane jouait contre l'Ex-Egypte. L'équipe de Saâdane ayant gagné
même au Soudan, quand celle de Bouteflika ayant même cru tout perdre à Batna
lors du fameux attentat. Les deux équipes jouant chacune pour des spectateurs
différents : l'une évoluant pour le plaisir d'un seul Algérien, l'autre pour la
gloire de 36 millions d'autres. L'une apportant le bonheur, l'autre le
promettant pour l'avenir du passé. L'une rappelant 1982, l'autre voulant
rappeler les années 70. L'une faisant objet de chants, l'autre étant sujet de
blagues. L'une financée par le pipeline, l'autre sponsorisée par Nedjma.
Que serait
l'Algérie si l'une et l'autre étaient le produit de l'une par l'autre ? Que
serait la définition heureuse de l'Algérie si une équipe de ministres était
capable de produire une équipe de joueurs et qu'une équipe de joueurs pouvait
valoir une équipe de ministres ? Que gagnerait chaque Algérien si chaque
ministre nous apportait la joie de chaque joueur ? Réponse : chaque Algérien
aurait une coupe du monde chaque matin pour y prendre son café. Ce n'est pas le
cas aujourd'hui. Ce qu'on a, c'est une équation inversée : avec une équipe de
ministres locaux, on a une équipe de joueurs importés. Avec une équipe de ministres
importés, on aurait pu avoir une équipe de joueurs locaux. D'ailleurs, la vraie
question est : que se passera-t-il si l'équipe de Bouteflika jouait contre
l'équipe de Saâdane ? La première tenterait d'acheter le match, le stade, les
spectateurs et l'arbitre, le Sénat et l'APN même si elle est capable de gagner
sans tricher : c'est une question d'habitude électorale.