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PARIS, DAECH, TERRORISME, LA TERRIBLE EQUATION

par Yazid Alilat

Les sanglants attentats de Paris ne sont pas une fatalité. Ils rappellent cruellement à tous les faiseurs de printemps arabes que les apprentis sorciers subissent à la fin les foudres qu'ils auront déclenchées. Le terrorisme n'est pas né, hélas, comme une génération spontanée et les mécanismes de sa naissance et son développement sont bien connus des officines du renseignement et des services de renseignement dans le monde.

Que «Daech» frappe avec une facilité si déconcertante une des capitales les mieux protégées, et à moins d'un mois d'une «hyperprotégée» conférence internationale sur le climat, pose des questions légitimes sur l'efficacité du dispositif sécuritaire français. La France est devenue, hélas, une terre fertile pour toutes les dérives terroristes et une des cibles privilégiées des franchises terroristes. Sa politique extérieure, en particulier au Proche-Orient, serait-elle une piste sérieuse pour expliquer cet acharnement terroriste ? D'autant que les investigations mènent 9 fois sur 10 à la piste terroriste locale, via des centres de formation au Sahel ou en Syrie, un pays où la France est impliquée politiquement et militairement aux côtés des «rebelles», dont une bonne partie est constituée du Front Al Nosra, la franchise syrienne d'Al Qaïda, composée en grande partie de djihadistes français.

En fait, Paris oublie que le terrorisme est une menace globale, qui compromet la paix et la sécurité dans le monde, et non pas un phénomène qui menace ses seuls intérêts dans quelque partie du monde. Abdelkader Messahel a bien expliqué les données de cette problématique qui jette une ombre préoccupante sur la paix et le développement dans certaines parties du monde, y compris en Europe aujourd'hui que Daech a pris une envergure transnationale... grâce à l'ingérence française en particulier et internationale en général dans les questions internes des Etats.

Les choses étant arrivées à un tel pourrissement qu'il est aujourd'hui très difficile de trouver des solutions parfaites, rapides, radicales pour venir à bout d'un phénomène qui n'a jamais, jusqu'à ce qu'il atteigne les rives européennes, suscité l'intérêt de ceux qui, aujourd'hui, sont sous le choc des attentats de Paris. L'Algérie, qui avait traversé une période très difficile et combattu seule ce fléau transnational, a déjà préconisé une solution humaine, moins barbare, inclusive, qui consiste surtout à ne pas alimenter et produire le terreau fertile du terrorisme: celui de l'exclusion sociale, de la marginalisation, du racisme, de l'inégalité des chances devant l'école, de l'emploi et la négation des principes élémentaires de la dignité humaine. C'est ce discours radical, que l'on rencontre souvent dans les sociétés développées, en Europe comme aux Etats-Unis, qui est une étincelle à toutes les dérives extrémistes, terroristes.

Les Français partis en Syrie et en Irak pour devenir des égorgeurs professionnels ou s'offrir comme des bombes humaines dans les rangs de l'Etat islamique sont-ils plus coupables que ceux qui pratiquent en France la politique de l'exclusion, du discours radical, raciste, haineux? On ne sait. Ce qui est sûr, c'est que cette politique a montré ses effets désastreux. A commencer par la déstabilisation de pays entiers au Proche-Orient, au nom d'une démocratie à double langage, de façade même, qui a enfanté des guerres civiles sans fin. Et leur corollaire, un terrorisme inquiétant, qui voyage.