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Séquelles durables

par Abdelkrim Zerzouri

Le Colloque international sur l'expérience algérienne en matière de déminage organisé, à Alger, les 30 et 31 mai, sous le thème : « Pour une Afrique sûre, l'expérience algérienne pionnière en matière de lutte contre les mines antipersonnel », pousse la dissection des crimes plus loin encore que le constat horrible des dégâts et séquelles des mines posées durant l'ère coloniale et la présentation des expériences des pays africains sur ce plan. Certes, les défis sont toujours pesants, puisque les mines antipersonnel font encore des victimes et les discussions des voies et moyens du déminage, pour sauver des vies humaines, sont d'une actualité brûlante, mais pourquoi ne pas déployer des efforts pour juger les criminels derrière cette dévastation devant les tribunaux internationaux ?

La priorité va au remède à mettre en place, en l'occurrence le déminage, mais les crimes ne devraient pas rester impunis. L'Algérie a hérité de 11 millions de mines, posées par le colonisateur français le long des lignes «Challe »et «Morice». Mais, combien de personnes ont été victimes des mines disséminées dans les champs à travers les pays africains ? Quels sont les effets sur le développement économique et social dans ces régions « minées », où la mort plane sur les têtes qui s'aventurent à les traverser ?

Souvent, c'est par surprise, et en temps de paix, que des gens de tout âge se retrouvent propulsés dans les airs, soufflés par les explosions violentes de mines placées dans des champs de la mort par des armées coloniales. Si ce n'est pas la mort, c'est le handicap permanent suite à la perte des membres inférieurs. Voilà le sort dramatique réservé à des milliers de personnes en Afrique. Et les tourments ne sont pas terminés, vu les séquelles durables des mines antipersonnel. De ces horreurs, il en a découlé, assez tard, la Convention d'Ottawa sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, signé le 3 décembre 1997, et ratifié par 164 gouvernements (en avril 2019), ainsi que l'engagement de plusieurs pays dans des activités diplomatiques ainsi que des contributions financières, humaines et matérielles à des programmes de déminage dans les pays touchés, qui se trouvent, assez souvent, dans l'incapacité de s'en sortir seuls sans l'aide extérieure. L'aide extérieure?

On ne devrait pas parler d'aide ou de charité mais de dédommagement et d'indemnité que doivent régler les colonisateurs. Plus révoltant, ces derniers ne se mouillent pas trop dans les opérations de déminage, qui ont pris une dimension humaine inscrite dans le programme de développement durable, à l'horizon 2030, alors qu'on la verrait contraignante à leur encontre, à cause des peines causées aux victimes et à leurs familles, ainsi que les préjudices économique et social endurés par les populations traumatisées. Quoi de plus légitime que de faire payer ceux qui sont à l'origine des drames provoqués par les mines ?