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Le Télos dans le développement de l'histoire de l'humanité: Une marche inéluctable du monde de l'islam vers le progrès

par Medjdoub Hamed*

Comment comprendre cette déchirure permanente dans le monde de l'islam ? Ces guerres, les méritent-ils les peuples du Moyen-Orient, en particulier palestinien, irakien, syrien, iranien, afghan, somalien, yéménite et ceux d'Afrique du Nord, libyen, et autres pays d'Afrique touchés par la guerre ou le terrorisme.

Tout ce qu'on peut dire, c'est que ces crises, ces guerres relèvent d'une effervescence de crises et de guerres entre les grandes puissances. Et le monde de l'islam en paie le prix. Le problème est comment comprendre ces crises et guerres dans le monde de l'islam, tant sur le plan interne qu'externe.

1. L'humanité par elle-même est rationnelle. Il existe un Télos dans son existence

Tentons d'en saisir le sens. Tout d'abord partons du fait que toute œuvre humaine est centrée sur la réalité de la marche de l'histoire. Tout événement qui arrive a un sens. L'humanité n'est pas déterminée par un long défilement d'événements sans cause, sinon l'histoire humaine serait incompréhensible, chaotique, et donc sans sens. Par conséquent, il existe un ordre historique, que l'on peut dire, malgré les guerres, les crises, les malheurs qui donnent une impression d'un chaos qui dure, en fait, cet ordre est ascendant, évolutif et surtout auto-organisé. Et s'il n'est pas compris dans son essence auto-organisatrice, le problème est dans l'insuffisance de la perception de l'«intelligence qui est innée» dans le développement historique.

Le second point qui ressort est la complexité du processus historique. Les forces sécrétées, qui sont à l'origine des événements, d'apparence souvent chaotiques, incompréhensibles, sont en fait rationnelles et, par compréhensibilité, il faut entendre «nécessité». Et, par nécessité, il faut comprendre que ce sont elles qui propulsent la marche de l'humanité. L'histoire qui vient par ces forces, tout en mettant fin à l'histoire passée qui n'a été qu'une séquence, ouvre de nouveau une nouvelle page de l'histoire. Ces forces, et les évènements qui les suivent, en sont les vrais moteurs de l'histoire.

Souvent, ces contradictions historiques, et donc les crises et conflits, en particulier ceux qui se transforment en guerres, font obstacle, font régresser les peuples et deviennent de véritables impasses à la marche de l'histoire. En réalité, il n'en est rien, le processus est rationnel et long, les contradictions ne se sont tout simplement pas épuisées au regard de l'histoire. L'histoire continue de se faire jusqu'à épuisement et dépassement de ces forces vers de nouvelles forces historiques plus en rapport avec les progrès de l'histoire. Et par progrès historique, on entend le «progrès de l'humanité».

Le troisième point est la synthèse des deux premiers. En effet, se basant que l'histoire de l'humanité est un tout, tout événement qui la traverse touche d'une manière ou d'une autre le tout. Ce tout est donc un, aussi une approche globale vise que tous les événements du tout, et donc parcellaires dans le tout, visent un «Télos», une «Finalité» qui est une pour l'humanité entière. En clair, l'avenir du monde est conditionné par tout ce qui arrive en lui-même, par lui-même et pour lui-même. Précisément, cette «Finalité» n'apparaît pas en filigrane dans la marche de l'histoire. Elle constitue en fait un «paradoxe herméneutique» qui doit être décrypté pour appréhender le sens logique de l'histoire.

Pour résumer, il existe un «Télos» dans la marche de l'histoire de l'humanité, et donc implicitement dans son existence. Bien que complexe, sa réalité est complexe, elle est rationnelle, donc logique, dialectique et nécessaire. Tout en étant globale, cette réalité est propre à chaque peuple. En clair, le global du monde influe sur le propre de chaque peuple, et le propre de chaque peuple influe sur le global du monde. Et le tout est inséré dans les finalités, souvent cachées, herméneutiques, qui régissent la marche de l'histoire. Partant de ces trois éléments de base, que peut-on dire de la marche de la désespérance du monde ? Et aussi du monde de l'islam plongé dans des guerres depuis plus d'un demi-siècle ? Quel sursaut peut-il être attendu pour ce monde ? Et enfin, la pandémie Covid-19 qui frappe l'humanité depuis près de deux ans ? A-t-elle un sens historique ? Lequel ?

2. La «brutalisation» de l'Occident. La Guerre, la matrice d'un XXe siècle sanglant

Il faut dire, pour le monde de l'islam, que les vrais problèmes qu'il affronte aujourd'hui ont été cristallisés au sortir de la Deuxième Guerre mondiale. C'est essentiellement après 1945 que le monde de l'islam a commencé à retenir l'attention des médias du monde. Au point que, quelques années plus tard, il était le point de mire de la scène politique mondiale. Avant de développer les raisons de cet intérêt des puissances pour le monde de l'islam ou plus simplement du monde musulman, regardons d'abord ce qu'on peut appeler la genèse de la nouvelle humanité qui s'est «transcendée» dans la première moitié du XXe siècle. Comment ? Il faut dire par des guerres inouïes, deux guerres mondiales et une pandémie mondiale, qui fait autant de morts que les deux grandes guerres. Et pourquoi ? Aussi, lisons une partie d'une analyse qui traite de l'Occident au XXe siècle puisque tout est venu de cet Occident mystérieux. Européens, Américains, Japonais, Australiens ne savent pas leur devenir.

«En attribuant en 2012 son prix de la Paix à l'Union européenne, le Comité Nobel a voulu souligner la place centrale que l'intégration européenne occupait depuis six décennies dans le processus de pacification de l'espace européen. Cette interprétation historique qui ferait de la paix l'un des principaux moteurs de la construction européenne a été diffusée dès l'origine par les pères fondateurs des Communautés européennes, puis validée par les historiens spécialistes de ce champ de recherche, à l'exemple de René Girault qui reconnaissait au début des années 1990 le rôle éminemment pacificateur de l'intégration européenne : «Les vieux antagonismes ont été surmontés à l'exemple de la vieille rivalité franco-allemande. Qui l'aurait imaginé, il y a cinquante ans ! Sans verser dans un optimisme béat, il faut reconnaître la profonde évolution des mentalités européennes».

Cette lecture de l'histoire de l'Europe contemporaine, souvent jugée trop «occidentale», fait aujourd'hui débat chez les historiens, certains d'entre eux considérant volontiers que l'on «ne peut plus se contenter de célébrer les mérites de la croissance d'après-guerre, le miracle de la réconciliation franco-allemande, et les vertus de la stabilité des frontières et des institutions politiques.

Depuis la fin de la guerre froide, un important courant historiographique a ainsi proposé une analyse du passé européen profondément renouvelée, nous invitant à repenser l'histoire du vieux continent sous un jour nettement plus sombre. Eric Hobsbawm a fait naître, dans son Âge des extrêmes, l'idée d'un «court vingtième siècle» (s'étendant de la Première Guerre mondiale à la chute du Bloc communiste) qui aurait essentiellement «vécu et pensé en termes de guerre mondiale, même lorsque les armes se taisaient et que les bombes n'explosaient pas». Mark Mazower a pour sa part décrit l'Europe comme le «continent des ténèbres» et les notions de «brutalisation» ou de «culture de guerre» ont été successivement forgées pour dépeindre une Europe tragique, «à feu et à sang», déchirée, selon Enzo Traverso, par une «guerre civile» de trente ans (1914-1945). (1)

Tony Judt a également voulu, en s'intéressant à l'histoire européenne depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, s'éloigner de toute vision trop «occidentale» ou «irénique», qui décrirait «le redressement inespéré de l'Europe après 1945 sur le mode de l'autocongratulation, voire un ton lyrique. [...] Un continent irénique et pacifique avait surgi, «tel un Phénix», des cendres de son passé meurtrier et suicidaire. Comme bien des mythes, ce tableau assez flatteur de l'Europe dans la seconde moitié du XXe siècle [...] pèche largement par omission». (1)

Car non seulement l'Europe de l'Est n'y trouverait pas sa place, mais ce «mythe» tendrait à oublier que l'Europe de l'Ouest n'est pas «née du projet optimiste, ambitieux et progressiste que se plaisent de nos jours à imaginer rétrospectivement les Euro-idéalistes. Elle est la fille vulnérable de l'angoisse».

Cette interprétation de l'histoire européenne, violente et tragique, fait donc de la guerre la matrice d'un XXe siècle sanglant. Dans cette perspective, les périodes de retour à la paix deviennent des «sorties de guerre», c'est-à-dire «une sorte de guerre après la guerre». De la même manière, les vingt années qui séparent la fin de la Première Guerre mondiale du début de la Seconde se retrouvent englobées dans un même tout historique, une «ère de catastrophes», «trente et un ans de guerre mondiale».

Si cette historiographie a beaucoup enrichi notre compréhension de l'époque contemporaine, elle ne suffit peut-être pas à rendre compte de toute sa complexité. C'est pourquoi Jay Winter, spécialiste de la Grande guerre, a cru nécessaire de s'intéresser également aux «rêves de paix et de liberté» du XXe siècle, notant en ouverture de son ouvrage que «l'histoire du vingtième siècle est presque toujours écrite comme l'histoire d'une série de catastrophes. Pendant plus de quatre décennies, j'ai moi-même contribué à cette vision apocalyptique du passé récent. Mais depuis plusieurs années, j'ai senti que ce récit historique dominant était incomplet». (1)

L'histoire de l'humanité étonne toujours. Bien sûr, Jean-Michel Guieu, auteur de cette analyse, a entièrement raison, on ne peut se satisfaire de nos certitudes. L'histoire de l'humanité est toujours à revoir, et la regarder sous différents angles. Prenons, par exemple, l'événement qui a déclenché le Premier conflit mondial ? N'est-ce pas l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand, l'héritier du trône de Vienne, le 28 juin 1914, à Sarajevo, en Bosnie-Herzégovine qui a mis le feu aux poudres. Un archiduc autrichien vaguement connu qu'il était l'héritier du trône des Habsbourg, l'empire austro-hongrois. Un attentat perçu au départ pour un fait divers. Et ce fait divers a provoqué le Premier conflit mondial ?

Les puissances européennes, en se déclarant la guerre en 1914, ne se sont pas représentées les conséquences qu'elles allaient provoquer sur leurs peuples et sur les autres peuples du monde. Une longue guerre extrêmement épuisante, meurtrière, à laquelle ont été associés les peuples colonisés. Elle s'est révélée une véritable hécatombe. L'Allemagne et l'Autriche qui ont visé leurs intérêts géopolitiques ne savaient pas que, par leurs intérêts, et en déclenchant la guerre, ils étaient en fait intégrés au cours naturel de l'histoire. Et c'est cela qui n'est pas compréhensible.

D'autre part, l'attentat terroriste en 1914 n'était qu'un prétexte pour les puissances occidentales pour déclencher la guerre, toutes les puissances européennes s'y préparaient et y voyaient dans la conjoncture une possibilité pour tirer des avantages territoriaux et politiques. En particulier pour l'Allemagne, venue en retard dans le partage du monde. La prise de possession du monde a entraîné fatalement une compétition entre les puissances coloniales. L'exaspération nationaliste, le défaitisme ignoré, tout souriait aux puissances européennes, maîtresses du monde. Chaque peuple en Europe transposait l'enthousiasme de la domination qu'il avait sur les peuples des autres continents, sur les peuples européens voisins, perdant de vue que la guerre dans les colonies était inégale alors qu'entre les puissances européennes, le rapport de forces était en équilibre.

C'est ainsi que cinq longues années de guerre avec l'entrée des États-Unis au côté des Alliés dans le conflit eurent pour conséquence l'élimination de 20 millions d'êtres humains, et autant sinon plus de blessés. «Pour quel résultat pour les pays d'Europe ?» Des puissances ruinées par la guerre, une Allemagne humiliée et s'apprête deux décennies après à prendre sa revanche. Des empires démantelés (d'Allemagne, d'Autriche-Hongrie et d'Ottoman). En plus du Conflit mondial, un autre malheur est survenu, en 1917, la grippe espagnole. La pandémie, venue des Etats-Unis, a fait des ravages au sein des troupes en guerre. S'étendant au monde, les historiens font état de 50 à 100 millions de morts dans le monde.

Mais pour les pays d'Afrique, d'Asie et des autres régions du monde, la situation était autre. Colonisés depuis longtemps, ces pays n'avaient aucune lucarne pour se libérer de la tutelle coloniale européenne. La conquête et la colonisation britannique de l'Inde ont duré près de deux siècles (1750-1947). De même, la colonisation de l'Algérie a duré 132 ans (1930-1962). Comment la petite Europe a pu rayonner et asservir la plus grande partie de l'humanité ? Comment elle a pu se partager l'Afrique et une grande partie de l'Asie ? Et peupler l'Amérique du Nord et du Sud, l'Amérique centrale, l'Australie, les Caraïbes, les Antilles, la Nouvelle-Zélande...

La réponse est ainsi, tel a été le cours de l'histoire. Comme, par exemple, les Arabes venus de la lointaine Arabie, investis pour propager le message de l'islam, se sont déployés sur le monde. Cependant, toute domination par la force n'est pas pérenne. Tout peuple a droit à sa liberté, à son indépendance, sinon le sens de l'humain né libre ne pourrait avoir de sens. La nature humaine perdrait alors de son humanité. Précisément, avec l'affaissement des puissances coloniales, un mouvement de revendication des droits des peuples commence à poindre. La guerre 1914-1918 signe le début de la marche des peuples vers leur libération. On comprend, dès lors, le vrai sens de la Première Guerre mondiale, et sa nécessité en tant que «premier paradoxe herméneutique» dans l'histoire du XXe siècle.

3. Le Télos n'abandonnera aucun humain sur terre. La fin des guerres sanglantes dans le monde de l'islam qui viendra lui aussi à évoluer positivement

Posons-nous cette question : «l'irruption d'un conflit, considéré au départ par l'opinion publique comme une guerre de quelques mois, sans grande conséquence pour l'ordre impérial européen, puis s'est transformé en une guerre effroyable, un désastre pour les puissances européennes, va-t-elle s'arrêter là ?» Il est clair que le cours de l'histoire est en marche, et il ne va pas s'arrêter à mi-chemin.

De nouveau, en 1929, éclate la première crise financière aux États-Unis, c'est la crise boursière de Wall Street. Elle va, par ses conséquences mondiales, changer le cours de l'histoire. Le philosophe français, Edgar Morin, écrit : «L'histoire est une succession d'émergences et d'effondrements, de périodes calmes et de cataclysmes, de bifurcations, de tourbillons des émergences inattendues». Morin qui parle d'abîmes et de métamorphose, cette histoire qu'il a vécue le rappelle dans son livre «vers l'abîme» (L'Herne 2007) : «En 1929, la crise économique, conjuguée à l'humiliation des lendemains de la Première Guerre mondiale, a provoqué la venue au pouvoir d'Hitler, par des voies démocratiques. Ce n'est pas d'un pays arriéré qu'est venue la barbarie, mais de ce qui était la première puissance industrielle d'Europe, et qui était sur le plan culturel, la plus avancée».

Né en 1921, Edgar Morin a connu et participé à de grandes convulsions historiques. Si tout est vrai dans cette constatation de l'Histoire, il reste que Morin ne dit pas «pourquoi le monde a vécu l'abîme passée ?» Pourquoi la crise de 1929 est survenue alors que les seules grandes puissances économiques, à cette époque, étaient occidentales, le reste du monde était colonisé, dominé, et comptait peu dans les relations politiques et économiques internationales.

Forcément, la Grande dépression qui a suivi la crise financière dans les années 1930 va rebattre les cartes mondiales. Elle ouvre le pouvoir en Allemagne à Adolphe Hitler. Le cours de l'histoire va se précipiter, de nouveau la guerre, en 1939. Comme si l'histoire de l'humanité était déjà tracée d'avance. C'est ainsi qu'à partir de 1945 commence le mouvement de libération des peuples. La décolonisation de l'Afrique, de l'Asie et d'autres régions du monde va durer de 1947 à la fin des années 1970. L'Afrique et l'Asie libérées, plus de 100 nouvelles nations indépendantes verront le jour. Les pays d'Europe n'avaient pas d'alternatives malgré les guerres qu'ils opposèrent du moins pour certaines puissances que de quitter ces territoires qui leur étaient indus.

A la lumière de ce qui précède, ne voyons-nous pas de nouveaux paradoxes herméneutiques ? Le premier, 1914-1918, le second qui suit naturellement a été la crise financière de 1929 et qui a été à l'origine de la Grande Dépression des années 1930, elle-même à l'origine de l'intronisation d'Hitler en tant que chef suprême de l'Allemagne. Le troisième paradoxe a été 1939-1945. Paradoxe qui a englobé Hitler, puisque sans lui, l'Allemagne ne se serait pas trouvée à se réarmer en vue de la guerre. Et le mouvement de libération des peuples d'Afrique, d'Asie et des autres régions du monde se serait retardé, et donc reporté. Mais le cours de l'histoire était déjà tout tracé. De la dynamique du premier, passant par le second, le troisième paradoxe était irréversible. Le monde devait connaître des mutations profondes. D'autant plus qu'une nouvelle arme a fait son apparition, l'«arme atomique» qui va mettre fin à la guerre entre les puissances. Puisque avec cette arme et les arsenaux dont disposent les grandes puissances, la guerre nucléaire ne se compte plus en mois, ni en jours, mais en heures. Toute guerre nucléaire entre puissances peut se terminer le jour même, avec des dizaines, voire des centaines de millions de morts dans les heures mêmes qui suivent les starts de missiles intercontinentaux s'ils sont lancés par centaines. C'est la destruction mutuelle assurée.

Si l'arme atomique va mettre fin aux velléités de guerre, il n'en est rien pour les pays d'Afrique, d'Asie, d'Amérique centrale et du Sud qui vont être écartelés par la guerre froide. Les grandes puissances, les États-Unis et l'Union soviétique, vont diviser le monde en deux blocs antagonistes. C'est une guerre à outrance par procuration pour asseoir chacun de son côté son hégémonie sur le monde.

Si des crises et guerres se terminent pour la plupart, que ce soit en Amérique centrale et du Sud, en Asie (guerre de Corée 1950-1953 et guerre du Vietnam 1955-1975), en Afrique, il n'en est pas de même pour le monde de l'islam, en particulier pour les pays du Moyen-Orient. Une question se pose. Est-ce seulement parce que les sous-sols des territoires du monde musulman, en particulier le Moyen-Orient, regorgent de pétrole ? Les plus grands gisements du monde se trouvent en Arabie saoudite, en Irak, en Iran, au Koweït, aux Émirats arabes unis, au Qatar. Certes, c'est une réalité que les grandes puissances visent cette région centrale du monde d'autant plus que les États-Unis qui protègent l'Arabie saoudite, depuis le pacte du Quincy, en 1945, et malgré un régime historique féodal, ce qui tranche avec la démocratie américaine, en sont son principal soutien.

Aussi, peut-on dire qu'il existe une rationalité historique à laquelle les États-Unis y sont assujettis. Toute la puissance du dollar repose sur les pétrodollars. Si la Chine, par exemple, supplante les États-Unis en Arabie saoudite et son renminbi devient la principale monnaie de facturation des exportations pétrolières de ce pays, et cette monnaie le yuan étendu aux autres pays exportateurs de pétrole arabo-musulmans, c'est tout simplement «sceller la fin de la superpuissance américaine sur le monde». La puissance du reste de l'Occident et donc de l'Union européenne, du Royaume-Uni et du Japon, s'affaissera, et donc suivra la chute des États-Unis.

Et on comprend pourquoi l'histoire, le «Télos du monde» accorde encore un deal à l'Occident, ce qui signifie que si l'Occident a une domination presque totale aujourd'hui sur le monde comme elle l'a été durant la colonisation, ce deal est appelé à évoluer avec les forces de l'histoire. Et, par conséquent, le monde de l'islam est appelé à évoluer, à sortir des guerres incessantes, à se structurer, à s'organiser. C'est une affaire de temps seulement. D'ailleurs, la Chine avance, les États-Unis, l'Europe et le Japon reculent. La Russie avance.

Ce n'est pas seulement pour avancer que la Chine et la Russie avancent, et qu'elles deviennent les leaderships du monde à la place de l'Occident. Non, ces deux pays n'auront pas à remplacer l'Occident, ni les États-Unis qui quittent en 2021 l'Afghanistan et quitteront certainement d'autres contrées du monde de l'islam et même auront à conseiller à Israël de faire de même pour sa pérennité historique au sein du monde de l'islam. Non, c'est l'histoire existentielle terrestre de l'humanité qui avance et qui exige ce nouveau processus de l'histoire.

En clair, c'est ce Télos et la rencontre prochaine le 16 juin, à Genève, du nouveau président américain, Joe Biden, avec le président russe, Vladimir Poutine, ne pourra pas changer la marche de l'histoire. Ramener la Russie à l'Occident pour opposer un front à la Chine n'a de sens que si ce processus va dans le sens du Télos de l'humain sur terre. Il demeure cependant un rapprochement positif entre les deux puissances, en tant que grandes puissances nucléaires, mais la Chine trouvera son compte, du fait d'elle-même et par elle-même, en tant que contre-puissance des grandes puissances. La question du régime communiste, même s'il entre dans le Télos, il n'entre pas d'une manière déterminante dans le processus historique global de l'humanité. Pourquoi ? Le régime communiste en Chine n'a été qu'un «accident» de l'histoire. La Chine aurait pu être une puissance libérale comme le Japon, elle ne l'a pas été du fait des forces historiques qui ont joué dans l'avènement du communisme en Chine. Ce qui signifie que ce n'est pas la Chine qui a choisi le communisme comme d'ailleurs l'ex-Union soviétique. C'est l'histoire terrestre qui a fait que la Chine est devenue communiste. Et pourquoi l'histoire terrestre parce que nous relevons de cette Terre et de l'Esprit de cette Terre que seule la Terre dans son silence connaît. Que l'homme, doué de raison, peut connaître. Ou du moins si la Raison peut lui faire connaître. C'est plus juste.

Aussi, pour conclure, le Télos n'abandonnera aucun humain sur terre. Et certainement le terrorisme islamique perdant son sens, la fin des guerres sanglantes dans le monde de l'islam viendra à l'évoluer positivement. Et donc à se construire et se reconstruire comme pour tous les pays, tous les peuples de la Terre. C'est simplement une affaire de temps. Une loi téléonomique inscrite en notre humanité depuis la première présence de notre être sur cette Terre qui nous fait il y a plus d'une centaine de milliers d'années, que nous datons par les lois de la science, et que nous faisons par cette Science et cet Esprit qui nous l'octroie et qui veille sur le Tout.

*Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale, Relations internationales et Prospective

Notes :

1. «EDITORIAL : L'EUROPE ET LA PAIX. JALONS POUR UNE RELECTURE DE L'HISTOIRE EUROPÉENNE DES XIXe-XXIe SIÈCLES», par CAIRN INFO Matières à réflexion. 2012/4 (N°108) pages 1 à 6

https://www.cairn.info/revue-materiaux-pour-l-histoire-de-notre-temps-2012-4-page-1.htm