Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

LES ENSEIGNES ET LA MANIE COURANTE

par Abdou BENABBOU

On devra bien s'inquiéter du malfaisant génie qui tenaille l'esprit de ceux qui, faute de s'attaquer aux vrais problèmes des citoyens, trouvent un plaisir incongru à réveiller les démons. Contre toute attente et au moment où le circuit commercial est au summum de la déconvenue, il est, aujourd'hui, question de contraindre le monde du commerce à n'installer sur leurs devantures que des enseignes en langue arabe. Des contrôleurs veilleront, dit-on, à ce qu'une célérité totale soit appliquée et gare aux récalcitrants. Il ne manquait donc que du khôl aux yeux des borgnes pour que le tableau des inepties soit accroché, quitte à ce que la colère populaire devienne hors limite. C'est à se demander si les initiateurs de telle gaucherie sont conscients du désastre qu'ils vont provoquer et si à défaut d'huile absente dans les étalages et à jeter sur le feu, ils ne s'aventurent pas à la remplacer par une obligation d'une évidente inconscience.

On imagine aisément la légitime rage des commerçants qui, il faudra le reconnaître, ont fait un effort visible pour agrémenter leurs locaux et leurs devantures, s'adaptant souvent avec un professionnalisme remarquable pour se mettre au niveau de ce qui se fait, en la matière, partout dans le monde et leur admettre un effort financier et d'embellie des rues et avenues remarquable, aux antipodes de l'amateurisme et le bricolage des décennies passées. Suite aux pénibles aléas dus à la pandémie, ils étaient plutôt en droit d'attendre de l'Etat une magnanimité autrement différente que celle d'une décision déphasée, à laquelle on ne peut donner aucun nom.

Il y a là comme une manie devenue courante d'inciter à penser que remuer le couteau dans plaie est un exercice convenu mais à trop peinturlurer des stratégies déconcertantes on emprunte des chemins qui ne mènent pas à la confiance nécessaire entre les gouvernants et leurs sujets.

Le monde des enseignes est trop vaste pour que l'on sache par quelle porte y entrer. Il va des étendards des trusts aux petits écriteaux des marchands de beignets. Il est évident qu'un argent fou a été investi dans ce domaine. Si le négoce y trouve son compte, pourquoi lui imposer une énorme contrariété à la faveur d'une saute d'humeur qui ne convient pas à l'actuelle crise économique démesurée.