Il était temps que l'on se préoccupe sérieusement d'un problème qui ne finit pas de livrer des familles entières aux cimetières, mais il reste désolant que ce soit le président de la République lui-même qui en souligne la gravité pour demander de l'affronter sérieusement. Le monoxyde de carbone fauche chaque jour des citoyens imprudents pour s'aligner sur les méfaits que causent entre autres les accidents de la circulation et leur disputer les résultats du score.

Bien qu'elle soit avérée, on aura tort cependant de se focaliser uniquement sur la mauvaise qualité des appareils de chauffage, car les causes de ce véritable fléau sont aussi à aller chercher dans une structure mentale qui amplifie de dramatiques désagréments. Une espèce de nonchalance caractérielle se transforme peu à peu à tous les niveaux de la vie quotidienne pour faire de l'Algérien un être particulier. La richesse humaine n'est pas en cause mais il faudra bien se demander pourquoi l'ancestral kanoune des aïeuls, pourtant autrement plus dangereux, ne faisait pas autant de dégâts humains. A de nombreux égards, tout porte à croire que la modernité n'a pas bénéficié d'une carapace mentale pour permettre aux comportements de s'adapter.

L'absence de la culture de concision perturbe le partage des espaces communs à tous les étages de la vie quotidienne et la tare généralisée amplifie des inconséquences qui vont jusqu'à la mort sinon à la haine des autres pour finir par la tentation de la haine de soi. Le feu et le sang de l'histoire du pays ont laissé des plaies béantes dans les subconscients et se suffire d'admettre que seul l'incivisme serait le terreau des faits et gestes déraisonnés de chacun relève d'une sommaire déduction. L'affirmation de soi est désordonnée et irréfléchie. Elle est mère des aléas et des dramatiques perturbations de la vie des sociétés déréglées.

L'aisance accordée au sadisme du monoxyde de carbone n'est qu'un détail parmi d'autres et donne elle aussi une importante consistance à l'inconscience et à l'irresponsabilité.