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Premier débat télévisé entre candidats à la présidentielle: Des réformes urgentes pour dépasser la situation difficile

par R. N.

  Lors du débat télévisé organisé vendredi soir par l'Autorité nationale indépendante des élections (ANIE), les cinq candidats à l'élection présidentielle du 12 décembre prochain ont passé en revue leurs programmes dans les volets économique et social, mettant l'accent, unanimement, sur l'impératif d'adopter des réformes «urgentes» afin de dépasser la situation «difficile» que traverse l'économie nationale.

En matière d'emploi et de lutte contre le chômage, le candidat Abdelaziz Belaïd, président du Front El Moustakbal, s'est engagé à faire embaucher les quelque 400.000 diplômés/an des universités à travers le renforcement des secteurs de l'Agriculture et du Tourisme.

Le candidat Abdelmadjid Tebboune s'est engagé, lui, à créer des postes d'emploi à travers plusieurs politiques visant à intégrer les jeunes dans l'économie du savoir et à encourager la création des start-up.

Pour sa part, le président de Talaie El Hourriyat, Ali Benflis, promet de réduire le taux de chômage chez les jeunes universitaires, considérant qu'il faut mettre un terme à «la politisation» de l'économie et à la bureaucratie, et veiller, en revanche, à l'instauration d'un climat des affaires «sain et propre».

Azzedine Mihoubi, candidat du RND, a estimé que le taux de chômage en Algérie a prouvé que la machine économique est «en panne», indiquant que le traitement social du chômage mènera à la faillite des entreprises, s'engageant à créer des entreprises économiques productrices de richesse et d'emploi notamment dans le domaine agricole à travers la création d'investissements nationaux et étrangers assurant des milliers de postes d'emploi ainsi que les domaines des services, du tourisme et des nouvelles technologies. Pour sa part, Abdelkader Bengrina, président du Mouvement Al-Bina, a indiqué qu'il traitera «la situation catastrophique» dont laquelle se trouve l'économie nationale (?) à travers l'investissement dans le capital humain et l'entreprise qui crée la richesse et favorise la croissance, notamment dans les des énergies renouvelables, l'agriculture et le tourisme.

A propos de la détérioration du pouvoir d'achat des Algériens, M. Belaïd s'engage à attribuer l'aide aux personnes nécessiteuses en accordant aux communes «une véritable autonomie» dans l'orientation de l'aide aux personnes défavorisées. M. Tebboune a promis qu'il prendra en charge la situation déplorable de 30% à 35% des citoyens en raison de la dépréciation du dinar et le taux élevé de l'inflation, et annuler l'impôt sur les salaires qui ne dépassent pas 30.000 DA, l'augmentation du SNMG.

M. Benflis a souligné sa volonté de maintenir la subvention pour les franges sociales vulnérables. Alors que M. Mihoubi a indiqué qu'il était hors de question de renoncer à la politique sociale de l'Etat et de la protection des catégories vulnérables. Il s'est engagé, en même temps, à l'attribution de l'aide sociale aux personnes qui en méritent, l'augmentation des salaires, l'annulation de l'impôt sur salaire ne dépassant pas 30.000 DA, l'aide des femmes au foyer, les personnes âgées, les veuves et les femmes divorcées.

Quant à M. Bengrina, il a imputé la dégradation du pouvoir d'achat à «l'application du capitalisme avec un esprit socialiste», promettant de revoir à la hausse la pension des personnes aux besoins spécifiques, d'attribuer les aides sociales aux personnes qui méritent, d'aider la femme au foyer lui permettant de créer sa PME.

Sortir de la dépendance des hydrocarbures

En réponse à la question relative aux procédures à prendre pour valoriser la jeunesse, M. Benflis a affirmé qu'il n'était pas normal de leur interdire d'accéder à des postes de responsabilité au sein des communes et des daïras ou de se porter candidat à la présidentielle, promettant ainsi de revoir à la baisse l'âge autorisé pour accéder à des postes élus. M. Mihoubi s'est engagé à installer un conseil supérieur des jeunes, lors des 100 premiers jours de son élection, et de mettre en place une politique nationale propre aux jeunes. M. Bengrina a affirmé ne pas exploiter la jeunesse pour acheter la paix sociale, mais de soutenir les projets de l'Ansej et de ne pas ester en justice les défaillants. M. Tebboune s'est engagé à passer le flambeau aux jeunes notamment aux universitaires. M. Belaïd a promis d'éliminer le phénomène de la harga et de remettre le flambeau aux jeunes.

Concernant la question sur la libération de l'économie nationale de la dépendance aux hydrocarbures, M. Mihoubi a promis aussi la création d'une instance économique interministérielle ayant pour mission la coordination entre les différents acteurs économiques, l'annulation de la règle 49/51 régissant l'investissement étranger, l'encouragement des PME et la concrétisation du «rêve du Sahara» pour le développement du Sud.

M. Bengrina a promis d'établir une économie «diversifiée» basée sur l'exportation et «la valorisation» des ressources humaines, l'amélioration du climat de l'investissement et la relance du secteur des énergies renouvelables. M. Belaïd s'est engagé à libérer l'économie de la gestion bureaucratique, se focaliser sur le potentiel humain, mobiliser les fonds des acteurs privés et des banques, appuyer l'investissement étranger, intégrer l'économie parallèle, élargir l'assiette fiscale et la composition d'une commission nationale chargée de la supervision des terres agricoles. M. Benflis s'est engagé à concrétiser «une économie de marché à caractère social» garantissant une distribution «équitable» de la richesse et de la libre initiative et un climat des affaires propre. Il s'agira, pour le même candidat, de s'orienter vers l'économie numérique, l'éradication de la corruption et la lutte de toutes formes de gaspillage. Il promet, par ailleurs, de mettre en place un nouveau ministère (de la numérisation) permettant de conférer davantage de transparence sur tous les plans.

Les revendications sociales et politiques du Hirak

A la question sur leur démarche pour répondre aux revendications du «Hirak», Benflis a indiqué qu'il «assume les aspirations du peuple algérien» au changement et à la satisfaction des revendications soulevées par le Hirak du 22 février. Mihoubi a affirmé que son programme «prévoit plusieurs réponses» aux revendications populaires et de faire du 22 févier «une journée de la souveraineté populaire». Bengrina a estimé que le Hirak populaire a permis de concrétiser plusieurs revendications, s'engageant à satisfaire «le reste». Belaïd a mis l'accent par ailleurs sur la nécessité d'»adopter de nouvelles méthodes avec de nouvelles mentalités pour aller vers une nouvelle République». Le scrutin du 12 décembre est «un nouveau départ pour l'Algérie» pour l'édification d'une République basée sur le principe de l'Etat de droit, d'institutions et de libertés», a estimé le président du Front Moustakbel.

Tebboune s'est engagé à être «fidèle aux revendications du Hirak», le qualifiant de «bénédiction» car il a fait éviter à l'Algérie des catastrophes. Il a salué également le rôle pivot de l'Armée nationale populaire (ANP) dans l'accompagnement du Hirak.

Une nouvelle Constitution

Les cinq candidats à l'élection présidentielle se sont accordés sur la nécessité de changer la Constitution actuelle qui «présente plusieurs lacunes». Belaïd a appelé à l'adoption «d'une Constitution qui convient au peuple» et s'est engagé à ouvrir «un débat national inclusif avec les experts et la classe politique» et à «organiser un référendum national afin de parvenir à une Constitution qui convient au peuple algérien».

Tebboune a affirmé quant à lui que «le premier jalon dans le changement est le changement de l'actuelle Constitution, qui a prouvé son inefficacité», estimant impératif de «séparer réellement entre les prérogatives des institutions de l'Etat et de redynamiser le contrôle pour s'écarter du pouvoir unique», mais également «la révision des lois et à leur tête la loi relative aux élections afin de parvenir au choix d'élus intègres, sans utiliser l'argent sale ternissant l'image des échéances électorales». Benflis propose «une nouvelle Constitution élaborée suite à de larges consultations n'excluant aucune partie», pour jeter «les bases d'un régime semi-présidentiel garant de la répartition des prérogatives au sein du pouvoir exécutif entre le président de la République et le chef du Gouvernement, choisi par la majorité parlementaire».

Mihoubi s'engage à œuvrer avec «les partenaires de la scène politique pour élaborer une Constitution qui renforcera la souveraineté populaire et instaurera une République d'institutions devant assurer l'équilibre entre les différents pouvoirs et éviter tout chevauchement entre leurs prérogatives en éloignant le pouvoir législatif des effets externes».

Bengrina estime que l'amendement de la Constitution doit reposer sur la déclaration du 1er Novembre et le Hirak du 22 février, en passant par l'organisation d'un référendum et l'ouverture d'un dialogue social inclusif pour parvenir à une charte qui jette les bases d'un régime semi-présidentiel et d'un Parlement qui exerce son contrôle en toute souveraineté, et des membres du Gouvernement choisis parmi la majorité parlementaire. Il a promis également «la consécration des libertés individuelles dans le mouvement associatif, les médias, la presse et les droits de l'homme».