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Frustré dans son ambition, Makri se pose en sage désintéressé

par Kharroubi Habib

Il n'y aura pas de candidat estampillé MSP lors de la controversée élection présidentielle du 12 décembre prochain. Ainsi en a décidé le Madjliss Echoura du parti réuni samedi en session extraordinaire pour trancher sur la question. Pour Abderrazak Makri qui aurait été le postulant naturel du parti à la candidature, la déconvenue doit être amère. Il ne faisait pas en effet mystère qu'il est favorable à l'organisation de cette élection et à la participation de son parti à travers sa propre candidature.

Ravalant sa frustration, le chef du parti islamiste a animé une conférence de presse pour expliciter les raisons dont le Madjliss Echoura a tenu compte pour décider la non participation du MSP. Celles-ci sont selon Makri « qu'il y aura absence de la concurrence dans la compétition électorale et non satisfaction de la revendication relative au départ du gouvernement actuel en sus des failles émaillant l'arsenal juridique dans le volet inhérent au processus électoral ». Son espoir d'être dans les starting-blocks de la course présidentielle envolé, Makri s'est gardé pour autant d'aligner son parti sur la position de rejet absolu de l'option électorale qui est celle des autres partis ayant décidé de boycotter le rendez-vous du 12 décembre. Il s'en est démarqué en faisant valoir que le MSP est pour « le principe de convoquer une présidentielle en ce sens qu'elle constitue un impératif pour assurer la pérennité des institutions constitutionnelles et civiles et la sortie de crise, d'autant que la complexité de la situation économique exige un consensus national pour une réelle relance ».

A défaut de revêtir l'habit de candidat présidentiel, l'ambitieux chef du mouvement islamiste a revêtu celui du sage dénué de toute visée électoraliste et ne voulant que servir l'intérêt national. Ce dont il cherche à convaincre en relançant l'idée de construire un consensus national. En fait, il a émis le message en direction du pouvoir que le MSP qu'il préside n'est pas dans la rupture irrémédiable à son égard même s'abstenant de participation à l'élection présidentielle. Si le Madjliss Echoura a fait choix de la non participation c'est parce qu'il s'est rendu à la raison qu'un candidat du MSP même si c'est son chef actuel n'a pas de chance de remporter l'élection présidentielle. Un succès qui n'aurait pu avoir une quelconque chance de se produire que si le postulant parvenait à rallier à sa candidature l'ensemble du courant islamiste et encore.

C'est tout le contraire qui est à l'œuvre dans ce courant dont la dispersion en chapelles rivales mais toutes réfractaires au leadership que le MSP et son chef ambitionnent de se voir reconnaître a fini par faire admettre au Madjliss Echoura que le MSP ne peut dans ces conditions aspirer à la victoire électorale. A défaut, il a décidé la non participation qui permet au MSP d'apparaître conséquent avec la ligne de soutien au mouvement populaire pour laquelle il a opté dès les premières manifestations de protestation de celui-ci. Mais fidèle à sa stratégie originelle, ce mouvement islamiste campe dans l'entre-deux à l'égard de ces deux acteurs déterminants de la crise politique, attendant de pencher pour l'un ou pour l'autre que la balance de leur rapport de force lui indique de quel côté le faire.