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22ème vendredi de protestation: «Pas de dialogue sans la libération des détenus d'opinion»

par M.A. Et A.Z.

Des milliers de manifestants ont occupé en force les espaces publics en ce 22ème vendredi de manifestation dans la capitale, comme un peu partout dans les grandes villes du pays. Une journée assez particulière qui a coïncidé de surcroît avec la finale de la Coupe d'Afrique, tenue au Caire. Des jeunes supporteurs de l'équipe nationale se sont mêlés aux manifestants réclamant à la fois la coupe d'Afrique et le départ des symboles du système. Les protestataires ont continué en cette 22ème semaine d'exiger un Etat civil fondé sur des bases solides «Dignité, justice et liberté». Les acteurs du hirak faisaient plusieurs aller-retour de la Grande Poste d'Alger toujours interdite d'accès, jusqu'à la Place Audin en passant par l'avenue Pasteur. Et ce, devant un impressionnant dispositif sécuritaire déployé très tôt le matin, avec une série de fourgons bleus de la police et une armada de policiers.

Les manifestants ont réclamé haut et fort la libération des détenus d'opinion, hissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire «Libérez nos jeunes», «libérez nos enfants», «nos enfants ne sont ni trafiquants de Cocaïne, ni des dilapidateurs de foncier et de l'agent du trésor public- Libérez-les» ou «libérez le moudjahid Lakhdar Bouregaâ».

Le mot d'ordre de cette 22ème action «pas de dialogue sans la libération des détenus d'opinion», car faut-il bien le rappeler, la cour d'Alger avait confirmé la mise en détention provisoire de plusieurs manifestants, accusés de «porter atteinte à l'unité nationale pour avoir brandi le drapeau amazigh».

Les espaces publics sont devenus par la force des choses des lieux de débats et d'expression où les manifestants disent haut et fort ce qu'ils pensent et ce qu'ils veulent. D'autres sont allés dénoncer la fermeture des accès menant vers la capitale et les séries d'arrestations opérées durant les derniers vendredis.

«Non à un pouvoir répressif, non aux médias complices, libérez notre Algérie, elle est en otage». Certains notamment des militants de partis politiques et d'associations ont plaidé pour une assemblée populaire souveraine. Sur une pancarte on pouvait lire « Une constituante élue veut dire pouvoir entre les mains du peuple».

Des jeunes ont eux demandé à Bensalah de rester en Egypte et de ne plus revenir. Ils ont scandé également des slogans hostiles à Gaid Salah et au chef du gouvernement Bedoui.

Ce 22e vendredi des manifestations populaires contre le système, à Constantine, a été bien particulier. Forcément, car le rendez-vous coïncidait avec la finale de la CAN 2019, qui devait opposer les Verts aux Sénégalais dans la soirée de la même journée. Et, c'était fête de deux bords, qui se rejoignaient dans leur amour pour les couleurs nationales et la soif de démocratie, même si les manifestants, les fidèles aux rendez-vous traditionnels du vendredi, ne voulaient pas qu'on «perturbe» on qu'on les distrait avec la magique balle ronde de leur revendication essentielle, «le départ de la bande, toute la bande». «La Coupe d'Afrique une fois tous les 2 ans, la révolution une fois dans la vie», pouvait-on lire sur une large banderole portée par les manifestants qui restent fidèles à leur ligne, tracée le 22 février 2019. Gardant les mêmes slogans, les manifestants ont appelé au départ du système, et ont scandé «Etat civil et non militaire», tout près d'une autre foule, rassemblée devant le palais de la culture Med Laïd Al Khalifa, et qui avait en tête, elle, le matche de la soirée. On pouvait reconnaître ces derniers, grâce aux signes qui ne trompent pas, comme les sons de la vuvuzela qui se dégageaient dans leur milieu, ainsi que les couleurs nationales et le drapeau peints sur les visages. Ils attendent le coup de sifflet final de l'arbitre et ils croient au titre continental qui attend les Verts, pour dessiner ces liesses populaires que seule la balle ronde sait en faire. Non, pour ces groupes, la politique c'est une autre paire de manche et ce vendredi 19 juillet est, et doit rester, sportif. Ce n'est pas l'avis des autres, les fidèles à la manifestation traditionnelle contre le système, qui ont fait entendre leurs voix en scandant leurs habituels slogans, «vous avez dépouillé le pays, voleurs» et autres «ni Bensalah ni Bedoui ne font l'affaire». A la fin, bien sûr, tout le monde aura les yeux rivés sur les pieds de Mahrez et ses coéquipiers.