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Avant le choléra, l'intox

par Mahdi Boukhalfa

Les «fake news» ou les fausses informations, l'intox, sont devenues un danger viral dans notre pays. Peut-être plus qu'une pandémie elle-même, fût-elle celle du choléra, qui a contaminé et continue de le faire dans les réseaux sociaux en Algérie. La réapparition de cette maladie, dont le foyer originel continue de nourrir de vives conjectures entre les parties concernées et l'opinion publique qu'exacerbent les «fake news», a montré toute la dangerosité, à l'ère du numérique, du séquestre de l'information réelle et sa non-divulgation immédiate autant à l'opinion publique, aux médias qu'aux politiques.

Car si la «fake news» est combattue dans les pays occidentaux pour sa dangerosité politique, et plus par les gestionnaires des réseaux sociaux, facebook ayant supprimé plus de 30.000 faux comptes lors de l'élection présidentielle française de 2017, alors que Trump a été élu grâce à ce type de désinformations, la santé est son terrain favori. Parce qu'elle représente un marché de plusieurs centaines de milliards de dollars, la santé est le terreau fertile et viral pour ce genre d'informations, une véritable industrie liée à la «fake news» médicale. C'est ce qui s'est passé chez nous avec des informations sur le choléra circulant sur les réseaux qui ont pris plus de crédibilité que celles des autorités sanitaires. Les chefs de partis politiques comme les opérateurs économiques ne sont pas épargnés par cette marée de l'intox et de la fausse information, alors que sur le terrain sportif les ravages sont à la mesure de l'absence de résultats des élites nationales.

Tout cela a un prix et les canaux de la «fake news» sont très souvent, chez nous, des médias peu regardants sur l'origine même de l'information qu'ils diffusent. Les exemples sont légion et ce phénomène devenu planétaire avec la démocratisation de l'internet et l'expansion ahurissante des réseaux sociaux a causé du tort à la diplomatie algérienne, à certaines de ses institutions comme l'ANP, la police et la gendarmerie nationales, et au pays même avec la diffusion de fausses informations notamment durant cette période préélectorale. Ailleurs, dans les autres secteurs, le mal est profond et souvent il est difficile de lutter efficacement contre ce phénomène si des lois ne sont pas mises en place pour lutter contre la «fake news». Dans le monde, des dispositifs juridiques sont en train d'être mis en place pour limiter, sinon restreindre l'amplitude de la «fake news», et il est dans notre pays urgent de réagir contre cette menace. Car les auteurs de «fake news», qu'ils soient des médias ou de simples relais sur les réseaux sociaux, n'ont pas conscience qu'ils participent et amplifient cette sinistrose et ce défaitisme qui ont pris en otage les Algériens et la nation, qu'ils déstabilisent quand ils menacent sa sécurité, ses fondements, son avenir.

Maintenant, une réaction du gouvernement et le ministre du secteur concerné n'est pas de trop dans ce fatras de vérités et de contre-vérités, même si lutter contre la «fake news» est un combat peut-être perdu d'avance devant une pandémie numérique planétaire. Mais, le mérite est de le vouloir, de l'entamer. Chacun pourra ensuite se faire sa propre opinion sur l'état de la nation, sans «œillères» ni «mors aux dents».