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TLEMCEN: Le Musée d'art et d'histoire pour s'approprier la mémoire

par Khaled Boumediene



Le Musée d'art et d'histoire de Tlemcen, innovant, lumineux, transparent et interactif, inauguré le 17 avril 2011 par le président de la République à l'occasion de l'événement culturel «Tlemcen, capitale de la culture islamique en 2011», constitue un pas géant pour s'approprier la mémoire et réactualiser les connaissances historiques, sociales et géographiques de Tlemcen (berceau des civilisations), et de découvrir avec détail Tlemcen depuis la préhistoire jusqu'à la fin du 20e siècle. Grâce aux chercheurs algériens, majoritairement des historiens universitaires, ce musée, situé en face de la grande mosquée du centre-ville, présente en permanence au public une grande exposition sur «l'architecture, l'histoire des sites et les monuments de Tlemcen». Cette exposition a pour dessein de présenter au public le patrimoine architectural de la ville de Tlemcen, dans un parcours de découverte des territoires et des monuments de la ville. «La chronologie devient un élément de repère des événements historiques sous forme de citations révélées par les sources historiques. Les traces des monuments ponctuent le parcours de découverte et créent un parcours de restitution des différentes strates composant le monument dans son contexte géographique et historique. Le multimédia au cœur du parcours initiatique comme outil pédagogique de la visite. L'intégration du multimédia dans l'espace du musée est rattachée au concept de la scénographie du musée. Une scénographie met en scène les objets des musées, les maquettes d'architecture», Ces quelques lignes de la préface du document (dans sa version française) mis à la disposition du visiteur. Il s'agit en fait d'une rupture avec la vision coloniale et représente, par conséquent, un projet national réalisé par des ressources humaines algériennes imbues des méthodologies, expertises et approches scientifiques les plus modernes. «Cet établissement constitue un élément culturel, social et historique de premier plan de Tlemcen, qui rassemble des collections artistiques, historiques et archéologiques de la ville, qui, rappelons-le, il y a peu de temps, elles étaient dispersées et mal mises en valeur», a indiqué ce lundi le directeur du Musée d'art et d'histoire de Tlemcen, M. Benazza Nourredine, ajoutant que grâce à la détermination et à la décision courageuse du chef de l'Etat, M. Abdelaziz Bouteflika, le musée a pu ouvrir ses portes 49 ans plus tard après l'indépendance, en 2011. En raison de sa taille et de l'importance de ses collections, le Musée d'art et d'histoire est sans aucun doute l'institution patrimoniale phare de la capitale des Zianides, aujourd'hui. Nous sommes heureux de posséder enfin, un véritable musée digne de notre cité millénaire. C'est surtout grâce à la compréhension de notre président de la République, que Tlemcen, carrefour des civilisations, possède, aujourd'hui, ce lieu d'exposition et de préservation de notre patrimoine collectif. C'est un atout supplémentaire pour l'attractivité de notre ville», a souligné un enseignant, visiteur de la ville de Tlemcen, rencontré dimanche dans le musée. Selon le document-guide de ce musée, qui nous a été remis sur place, c'est après une période préhistorique et une période numide avec en particulier le règne du roi berbère Syfax, avec comme capitale Siga, que survint la période romaine à Tlemcen. Les Romains lui donnèrent le nom de Pomaria (les vergers). Selon des chercheurs-archéologues, les seuls vestiges connus de cette époque sont des pierres tombales enchâssées dans la structure du minaret d'Agadir. Pomaria s'étendait à l'est de Tlemcen. La ville était de 32 à 430 après J.-C., un poste fortifié tenu par une cavalerie d'éclaireurs romains à l'extrémité occidentale du limes d'Afrique. Au 7e siècle, débute la période islamique. C'est en 671 que se situe le début de l'occupation permanente du Maghreb par les Arabes. Tarek Ibnou Ziyad était installé à Tlemcen, qui semble avoir joué un rôle important dans les préparatifs de la conquête de l'Espagne. Ibn Khaldoun cite certaines tribus, comme les Matghara localisées sur une partie des Traras près de Nedroma. Les Madyuna, les Hawwara, situées à l'est entre la Tafna et Oran, les Miknassa situées autour de la Moulouya, faisaient partie des contingents envoyés à la conquête de l'Espagne. C'est en 765 que les Bani Ifran, importante tribu zenata, reconnurent Abu Qora comme calife à Agadir. En 790, Tlemcen est occupée par les Idrissides de Fès. Agadir, faubourg de Tlemcen, marque l'emplacement de l'ancien poste romain de Pomaria, puis de la ville de Tlemcen. La première mosquée édifiée à Agadir fut l'œuvre d'Idris 1er à la place du temple d'Ausliva. En 1079, commence la période almoravide avec Youcef Ibn Tachfine. Les Almoravides ont laissé de nombreuses traces, notamment au Maroc (où ils ont édifié la ville de Marrakech) et en Algérie (où ils ont édifié de nombreux monuments à Alger, Nedroma et Tlemcen), puis vint la période almohade, en 1143, fondée par Abdelmoumène Ben Ali. Les Almohades gardèrent le pouvoir jusqu'en 1269 (667 H). Selon l'écrivain de l'époque almohade, Yaqout Al-Himawi, Tlemcen était formée de deux villes voisines, entourées de murs, et distantes l'une de l'autre d'un jet de pierre, Agadir (l'ancienne) et Tagrart (la nouvelle). C'est dans cette dernière que réside l'armée et fonctionnaires. La Grande Mosquée de Tlemcen a été construite en 1136 (530 H) par Ali Ibn Youssef, calife de la dynastie berbère des Almoravides et son minaret en 1236 (633 H) par le sultan zianide Yaghmorassen Ibnou Zyan. Trois dynasties se partagèrent le Maghreb à la chute de l'empire almohade: les Abd Al-Wadides ou Ziyyanides dont le royaume s'étendait sur la partie centrale avec comme capitale Tlemcen (1236-1283), les Mérinides à l'ouest et les Hafsides à l'est. C'est dans la quinzième année du règne d'Abu Tashfin, que tomba la dynastie abdalwadide, première branche des Ziyyanides. En 1359, Abu Hamou Moussa II, petit-fils d'Abu Zaid, réussit à reprendre définitivement Tlemcen aux Mérinides. L'œuvre d'Abu Hammou fut la restauration de la muraille du Mechouar et la construction de la mosquée, ainsi que la koubba de la mosquée de Sidi Brahim. Vers 1550, les troupes ottomanes de Hassan Pacha, fils de Kheir Al-Din, entrèrent dans la ville de Tlemcen. En 1955, Salah Rais prit définitivement possession de Tlemcen, et en confia le commandement à un agha. La victoire des Turcs contre les Ziyyanides mit fin à la souveraineté espagnole sur le royaume de Tlemcen.