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Le bord du précipice contre un pas en avant

par El-Houari Dilmi

Mis à l'épreuve du terrain de la vérité (inévitablement raboteux), l'argent fou, (de quoi construire un pays neuf selon la belle formule d'un confrère), injecté dans les différents programmes de développement, depuis 1999, a-t-il réellement produit de la richesse pour un pays toujours «apparenté» à une immense machine en panne, ou a-t-il seulement servi à mettre un cautère usé sur une jambe de bois vermoulu? La réponse à cette question lancinante importe peu, sinon, comment peut-il en être autrement quand on connaît l'étendue des dégâts causés au pays et la difficulté «objective» pour un président à servir sa patrie sans forcément s'aliéner les sympathies d'une partie, grande ou petite, de ses concitoyens ? Personne de sensé ne pourrait valablement réfuter l'idée qui voudrait que pour que le pays ait une chance de retrouver sa force perdue, il ne faudrait surtout pas persister à cacher la vérité aux Algériens, en continuant à leur renvoyer une image faussement satisfaisante d'eux-mêmes.

Cruellement désillusionné pour avoir été pendant longtemps gavé de «bobards» amers, l'Algérien doit aujourd'hui, apprendre à influer sur son destin et avoir le courage de faire face à l'austère nudité de la vérité. L'un des indices, peu ou prou encourageants qui prudemment, nous autorisent à penser que quelque chose est en train de changer dans le pays et que nombre de voix se sont faites entendre, ces derniers temps, pour dire que la démarche des hommes en charge de la gestion du pays, aussi sujette à caution qu'elle pourrait l'être, a au moins le mérite de rassurer sur un point: le discours langue de bois et «orientée» vers des buts peu avouables, est en net recul, à l'exemple de la courageuse «confession» de Ould Kablia (dans le mystérieux enlèvement du wali d'Illizi) qui reconnaît volontiers que le premier responsable de cette wilaya, véritable ventre mou des frontières méridionales de l'Algérie, a fait preuve d'une «négligence peu compréhensible à un tel niveau de responsabilité». Et cela n'est pas rien quand on connaît les graves dommages occasionnés au pays par les fausses rassurances données aux Algériens au moment où la patrie à Ahmed Zabana se rapprochait dangereusement du précipice. Aujourd'hui, les choses sont condamnées à changer.

Sous les coups de boutoir d'une vie outrageusement «délavée», le citoyen n'a plus besoin d'écouter de fastidieux mais surtout de creux discours, pour savoir si le pays va bien ou se porte très mal. L'exemple qui nous montre le mieux que les temps ont changé est sans conteste la «surchauffe» du front social, avec un nombre effarant de mouvements sociaux enregistrés l'année dernière. Mais laquelle des deux colères est la plus dommageable pour le pays, celle des Algériens ou celle de ceux chargés de leur garantir une vie? au strict minimum syndical ? Ces derniers préfèrent-ils gérer la menace d'une déflagration sociale qui se rapproche dangereusement de l'horizon, plutôt que dilapider des richesses que nous ne produisons pas ? Mais face à une telle «leçon», rien ne dit que des résistances ne vont pas continuer à se dresser sur le chemin du personnel politique en charge de la gestion du pays, qui fait montre, il faut bien le dire, d'une grande détermination à faire «avancer les choses». Et si résistance il y a (et il y en aura sans doute), les Algériens doivent-ils se convaincre que le sauvetage du pays doit nécessairement passer par leur propre faillite ? Aussi vrai que beaucoup de chemin reste à faire pour s'arrimer au train du développement, le vrai, il est à craindre que les dessous de la corbeille vont bientôt commencer à apparaître? !