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A la veille des élections contestées du CFCM: La Grande Mosquée de Paris mobilise les Algériens

par Salem Ferdi

La Grande Mosquée de Paris a battu le rappel des troupes algériennes à la veille de la tenue des élections du Conseil français du culte musulman (CFCM) qu'elle boycotte.

A Lille, Dalil Boubakeur, en présence de Halim Benatallah, secrétaire d'Etat chargé de la communauté nationale à l'étranger, a souligné que la Mosquée de Paris ne peut être ignorée.

Sur le site de la Grande Mosquée de Paris (GMP), une déclaration du recteur Dalil Boubakeur redisait, le 20 avril dernier, son rejet du «déséquilibre évident du système de représentation du Conseil français du culte musulman (CFCM) basé sur le critère de surface (m²)». Il proposait le report des élections prévues le 5 juin afin de donner une «ultime chance aux partenaires du CFCM de trouver un accord permettant le bon fonctionnement de cette instance appelée à représenter l'ensemble des musulmans de France». Le message n'a pas été entendu. Le ministre français de l'Intérieur, Claude Guéant, s'est exprimé pour la tenue vaille que vaille de ces élections. L'autre grande organisation musulmane (UOIF) avait pourtant, elle aussi, rejeté un système de représentation qui «sème la zizanie». En définitive, les élections étaient réduites au seul Rassemblement des musulmans de France (RMF ? marocain) qui préside déjà le CFCM à travers Mohammed Moussaoui. Une éventualité qui semble agréer au ministre français de l'Intérieur qui est également ministre du Culte.

Une foi mesurée au mètre carré !

Sa mise en garde étant ainsi ignorée, la Grande Mosquée de Paris (Algérie) a entrepris de mobiliser les troupes en signifiant clairement que le CFCM issue des élections de dimanche ne représentera en rien les musulmans de France. Jeudi, la Fédération de la Grande Mosquée de Paris (FNMGP) a organisé son premier rassemblement annuel à Lille. Deux mille Algériens y ont assisté et ont fait bloc derrière la fédération dans son refus des élections qui auront lieu ce dimanche. Dalil Boubakeur semble avoir compris qu'il ne doit pas compter sur son entregent auprès des autorités françaises qui visiblement se satisfont d'un CFCM contrôlé par le RMF. En présence des présidents des fédérations régionales de la FNMGP et de nombreux représentants de mosquées adhérentes, Dalil Boubakeur a réaffirmé le refus de participer aux élections du Conseil français du culte musulman (CFCM). La «foi ne s'est jamais mesurée au mètre carré», a clamé le recteur en réclamant une «juste place» pour les adhérents de la fédération de la GMP qui «ne sauront se contenter d'un simple strapontin électoral».

Une seule voix discordante

Même si un représentant du préfet de la région Nord-Pas-de-Calais a souligné que la «fédération de la GMP a toute sa place dans cette institution», Dalil Boubakeur n'entend pas servir de faire-valoir. On ne «pourra pas construire un islam de France sans la Grande Mosquée de Paris» et l'ignorer sera «irresponsable». Le recteur de la mosquée de Paris, décidément «en délicatesse» avec les autorités françaises, entend bien montrer son poids, lequel se mesure à celui de la communauté algérienne. Même si son programme s'adresse à l'ensemble des musulmans de France qu'il appelle au «rassemblement», au «renouveau» et au «réveil», Dalil Boubakeur, c'est en mobilisant les Algériens qu'il répond à la démarche des autorités françaises de maintenir les élections. Il y a presque réussi. Une seule fédération régionale sur les huit de la FNMGP a choisi de participer aux élections du CFCM. Il s'agit de la fédération du Sud-Ouest que dirige Abdallah Zekri. Celui-ci avait provoqué un buzz en déchirant publiquement sa carte de l'UMP en réaction au débat stigmatisant sur «la laïcité et l'islam» lancé par ce parti. Pour Zekri, le choix du boycott est une erreur. «Notre absence fera la part belle au RMF, qui deviendrait de facto l'interlocuteur unique des pouvoirs publics», a estimé M. Zekri, qui a appelé à «une présidence tournante entre Marocains et Algériens». Les autres fédérations ont suivi Boubakeur dans le rejet des élections à un CFCM à la représentativité limitée au seul Maroc.