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Une inflation de 3,5%,a dit l'autre

par Kharroubi Habib

Le mois de ramadhan est, on le sait, la période bénie des spéculateurs qui, enhardis par la boulimie de consommation dont sont pris les citoyens en cette occasion, font valser impitoyablement les prix. Le dernier que nous avons vécu n'a pas failli à la tradition. Les marchés ont donc flambé et les ménages ont subi, impuissants, la loi de pratiques qui ont mis à rude épreuve leurs maigres disponibilités financières.

 Fatalistes, ils se sont accrochés à l'espoir que, passé cette période particulière, la fièvre spéculative allait retomber et qu'il s'en suivrait ainsi un soulagement pour eux au plan des dépenses pour assurer le couffin familial. Les plus naïfs se sont d'autant plus laissés aller à cette illusion qu'ils ont pris pour argent comptant les prédictions rassurantes en la matière prodiguées par les autorités d'Etat concernées.

 Le mois de ramadhan est maintenant loin derrière nous, mais les marchés sont toujours en folie. Les prix à la mercuriale s'emballent tous dans des proportions qui font apparaître pour anodines les augmentations qu'ils ont subies durant la période ramadhanesque. Tout ce qui est disponible sur le marché est affecté par le surenchérissement. Les prix de certains produits sont passés, entre soir et matin, du simple au double, tout normalement. La pilule est plus qu'amère pour les petites bourses. Elle est mortelle, pour parler juste.

 Et monsieur le ministre des Finances et du budget d'annoncer, pince-sans-rire, que l'inflation dans le pays ne dépassera pas pour les mois à venir le seuil des 3,5%.

 Il faut croire que cette éminence dans la sphère économique et financière ne fait pas son marché, et, de ce fait, ignore absolument ce qui se passe là où celui-ci a lieu. Et s'il pense avoir rassuré ses concitoyens par sa prévision, dont la réalité du marché démontre au quotidien qu'elle est déjà faussée, l'annonce faite lundi par le président de l'Autorité de régulation au niveau du ministère de l'Energie d'un probable prochain relèvement du coût du gasoil, il lui faut rabattre de sa certitude. Même le plus simple des citoyens n'est pas sans ignorer que si une telle mesure est effectivement décidée, elle provoquera une nouvelle envolée des prix par la mécanique de ses répercussions.

 Avec ou sans cette mesure, l'inflation galopante qui embrase la sphère commerciale a déjà réduit les «concessions financières» octroyées pompeusement aux salariés par le gouvernement et la tripartite, à la dimension d'un canular dont les concernés auront du mal à apprécier le goût de cynisme qui s'en dégage.

 Après la grève des enseignants, celle du personnel hospitalier qui se poursuit, le front social n'est pas près de connaître l'apaisement. Il va même aller à des démonstrations de mécontentement encore plus spectaculaires, comme le laisse présager le bouillonnement qui agite la zone industrielle de Rouiba. Il est connu que c'est de là que sont partis à chaque fois les grands mouvements sociaux qui ont contraint les gouvernants en place à revoir leurs copies sur le sujet.

 Celui d'Ouyahia aurait tort de ne pas prêter l'oreille à la gronde qu'exprime Rouiba par délégation de l'ensemble du monde du travail. Ceci d'autant qu'il n'est pas certain que la centrale UGTA ait encore la capacité de jouer au «pompier» dans cette zone, où son alignement sur la politique sociale gouvernementale est vécu et dénoncé comme une trahison de son rôle de défenseur des intérêts du monde du travail et de tous les laissés-pour-compte de cette politique.