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Pour qui sonne le glas ?

par Abdelkrim Zerzouri

Malgré une victoire lors des dernières législatives anticipées du 12 juin, qu'on peut qualifier d'éclatante, vu les éclaboussures des scandales qui ont touché ses hauts cadres et les contrecoups du hirak, ainsi que la sortie par la petite porte de son président d'honneur, en l'occurrence Abdelaziz Bouteflika, le secrétaire général du parti du Front de libération nationale, Abou El Fadhl Baâdji, n'est pas à l'abri des assauts de militants et cadres du parti qui veulent le débarquer de son poste. Ces derniers jours, ses détracteurs sont revenus à la charge en organisant des rassemblements devant le siège du parti pour exiger la convocation d'une session extraordinaire du Comité central afin de décider de son sort à la tête du parti.

Les causes qui poussent ces manifestants à exiger la tenue d'une session extraordinaire du CC restent encore floues. Que reproche-t-on à l'actuel SG ? Les arguments ne manqueraient certainement pas dans cette optique, mais personne ne pouvait s'attendre à toute cette pression sur le SG du FLN dans des moments où ce dernier s'attendrait à des congratulations et des encouragements pour conduire le parti vers d'autres victoires lors des prochaines élections locales. Il faut tout juste rappeler, pour mieux fonder tous les questionnements autour de ce mouvement de protestation, qu'Abou El Fadhl Baâdji a été «plébiscité » secrétaire général du parti du Front de libération nationale (FLN) par la majorité des membres du Comité central du parti, lors d'une réunion tenue à la fin du mois de mai 2020 au Centre international des conférences (CIC). C'était du temps où le parti FLN était dirigé par Ali Seddiki, qui assurait l'intérim depuis le mois de septembre 2019, date de la démission de l'ancien SG Mohamed Djemai, poursuivi dans une affaire d'abus de fonction et humiliation d'un journaliste dans l'exercice de ses fonctions, qui a conduit à sa condamnation à deux ans de prison, dont un avec sursis, avant d'être acquitté le 1er février 2021.

Le concerné, Mohamed Djemai, avait remplacé l'ex-SG du FLN, Mouad Bouchareb, qui a démissionné immédiatement après la démission de l'ex-président Bouteflika. Lui-même intronisé SG du FLN en succession à Djamel Ould Abbes, après avoir été « démissionné » par la présidence. Et, ces quelques lignes ne devraient pas suffire pour faire l'historique des SG qui remplacent d'autres dégommés, qui connaissent fatalement le même sort au bout, durant ces dernières années, voire depuis l'avènement du multipartisme. Car, du temps du parti unique, pour changer de SG du FLN, il fallait changer le président de la République. Intrigues, manœuvres, manipulation, travail de coulisses et mouvements de redressement, le FLN en a connu, donc, des vertes et pas mûres durant ces dernières années. Est-il possible que ce parti arrive un jour à se défaire de ces pratiques ?

Il devrait pour cela, peut-être, revenir à son premier congrès, le congrès extraordinaire de Tripoli, convoqué du 27 mai au 30 juin 1962, qui est resté ouvert jusqu'à nos jours, en raison de profonds désaccords qui ont marqué ses travaux, qui ne seront jamais menés jusqu'au bout. Autrement, au bout de l'histoire, quiconque nourrirait en l'état actuel de la situation l'ambition de remplacer l'actuel SG du FLN tomberait inévitablement, lui-même, dans le piège où se sont fait prendre ses prédécesseurs. Pour qui sonne le glas ?