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Les circonvolutions de la diplomatie algérienne et les relations algéro-françaises

par Mohamed Maiz

Le Président Macron déclare apporter son soutien au «courageux» Président algérien en «faisant tout ce qui est son possible pour l'aider dans cette période de transition»!

Voila que Macron nous apprend que l'Algérie est en période de transition alors même que le pouvoir en place et Teboune en particulier ont toujours rejeté cette «période de transition»!

Allant plus loin et en bénissant lui aussi le mouvement populaire (Hirak), il ose, cependant, de manière incompréhensible, voire même suspecte, discerner entre le mouvement citadin et le mouvement rural!

Une trouvaille que même nos spécialistes de la division et de la manipulation n'avaient trouvée et imaginée.

Il est certain que ceci sera bien pris en charge par les faiseurs de «mensonges» du régime.

Après la kabylie et les kabyles voila donc les citadins et les ruraux!

Les voies de la diplomatie sont, décidément, impénétrables.

Mais auparavant, mu par on ne sait quelle considération, le Président Teboune n'a cessé de réitérer, à chaque occasion, la parfaite cordialité et amitié qui le lie au Président Macron, dont il salue en lui aussi» l'honnêteté et le courage».

En somme une parfaite lune de miel dans un climat de tempête géopolitique régionale!

Or, même si les circonvolutions du langage, et, des us diplomatiques ont, souvent, recours à des formules alambiquées pour ne pas avoir à étaler les différends qui peuvent exister, il n'est un secret pour personne que nombreux sont les sujets de divergences qui lestent les relations .Algéro- Française.

On ne constate pas d'opposition politique frontale entre, l'Algérie, et, la France. Toutefois, nonobstant les déclarations, il est difficile de croire en la soudaine excellence des relations entre les deux capitales.

Puissance atlantiste , et, européenne, la France évolue dans des strates géostratégiques, regroupant une globalité dominante d'intérêts géopolitiques , macro-économiques, et, militaires.

La diplomatie à l'art de transcender les antagonismes et, d'aplanir les différends! Malgré son savoir- faire, et, sa pugnacité, l'Algérie a échoué à faire avancer la cause sahraouie, en raison du barrage opéré par la France.

Son interventionnisme dans la fabrication du problème sahraoui est avéré. Après avoir contribué de derrière les rideaux , à l'invasion d'un territoire sous administration onusienne, elle s'est faite fort, de soutenir, à bras le corps l'illégalité de l'annexion, puis, de compléter le travail, en agissant pour perpétuer le travail accompli.

A l'évidence, la divergence est profonde, les positions figées et, inconciliables.

Intérêts obligent, la France n'a pas eu de mal à s'accommoder de la violation de la légalité internationale, à cautionner une agression caractérisée, et, à dénier, à un peuple, le droit de disposer de son destin, dans les limites territoriales admises par la communauté des nations.

Dument planifié, le dommage subséquent est dans l'enlisement d'une situation, préjudiciable à la stabilité et, à la construction économique de la région.

L'émergence d'un bloc sous- régional, maghrébin, partageant des objectifs économiques, et, militaires, communs, apte à émanciper la région des zones d'influence, et, à ériger l'intégration maghrébine en partenaire mondial, n'a jamais, été du gout de la France et également des monarchies du Golfe.

Pour sa part, l'Algérie milite en faveur de l'application du principe international qui prône l'intangibilité des frontières héritées de la colonisation, et, de la mise en œuvre des dispositions africaines, et, onusiennes relatives au parachèvement de la décolonisation.

Vieux principe de gouvernance, machiavélien, de la zizanie dans les relations algéro - marocaines, alors prometteuse, s'est avéré être un moyen efficace, pour réintroduire sous une forme réadaptée, l'influence, et, la domination, française au Maghreb.

L'occupation du territoire sahraoui ne tient que par la volonté de la France. La persistance de l'illégalité annexionniste, malgré le rejet par la communauté internationale, de la politique du fait accompli, renvoie à un enjeu néocolonial, plus global.

Encouragés par la France, les appétits territoriaux du Maroc ont servi de prétexte à la politique française de redéploiement géostratégique, dont, l'effet immédiat a été de bloquer l'édification maghrébine, en tant qu'émergence d'une puissance régionale.

Si tel était son objectif initial, la ruse mitterandienne qui est à l'origine de l'interminable mission de la MINURSO aura ainsi et surtout conduit au rétablissement du protectorat français sur le royaume.

Pris dans la masse de ses desseins, néocoloniaux, irréalisables sans le parapluie français, la monarchie marocaine à mordu à l'appât territorial. Dès lors, ferré par sa redevabilité, et, par sa dépendance vis à vis du maître d'œuvre de son aventure saharienne, et, également, son protecteur à l'international, le makhzen s'est fourvoyé dans une fragilité, périlleuse, pour sa souveraineté.

Le dangereux marchandage l'expose, fatalement, à être l'obligé d'un pays qui, comme les puissants de ce monde, n'a pas vocation à faire dans l'altruisme, et, la générosité.

Injonctions politiques, favoritisme économique, pressions, voire lâchage en cas d'insubordination, sont l'inéluctable tribu à payer.

L'ambition extensionniste marocaine a été du pain béni pour la stratégie française de réinvestissement du Maroc, via une sorte de réédition de l'épisode collaborationniste du glaoui, de triste mémoire.

Avec cette différence que la technique de manipulation qui, entre temps a pris de l'épaisseur, a visé la tète de l'Etat marocain, et, que l'objectif de cette nouvelle version du cheval de Troie, qui n'est plus, comme jadis, de déposer le souverain, mais de faire main basse sur le processus décisionnel, dépasse par sa nocivité locale, et, collatérale le seul cadre maroco-sahraoui.

Dans son action de lobbying tous azimuts, le Maroc on le voit, ne lésine sur aucun moyen, et, ne dédaigne aucune piste, quitte à y laisser, si besoin est, de sa dignité.

Il en est , ainsi, de ses opérations de charme qui visent en contre partie d'un soutien, à susciter, et , à corrompre toutes voracités pécuniaires qui se présentent, ou, encore à satisfaire certains appétits de luxure, et, de dépravation par la fourniture gracieuse, de la matière première, et, des conditions matérielles de sa consommation dans le faste , et , la discrétion des résidences royales.

Des parutions de journalistes d'investigation ont, d'ailleurs, fait leur chou gras de ces pratiques courantes en terre chérifienne. Qui plus est, ordonnées par une descendance, dit-on prophétique, censée être guidée par une pieuse moralité, qui proscrit le commerce de la chair, et, les actes de dépravation, érigés, ici, à contrario, en stratégie étatique.

Jouant son va- tout, son rapprochement diplomatique, et, militaire avec l'ennemi sioniste pour la construction de bases frontalières, est une autre ignominie qui révèle l'absence de toute forme de scrupule.

Le mode opératoire israélien pour perpétuer l'agression territoriale, l'oppression du peuple palestinien, et, la défiance des instances internationales, semble avoir de fervents admirateurs au makhzen, qui s'en inspire dans son apprentissage néocolonialiste.

La transposition au cas sahraoui, des méthodes annexionnistes, et, spoliatrices, appliquées en Palestine, n'en est que plus aisée, en raison de la similitude des situations.

S'agissant de l'appel à l'aide, et, à la solidarité sioniste, et à son expertise en enginérie militaire, l'acte est, à l'évidence d'une éminente gravité pour la stabilité régionale en ce qu'il dépasse le cadre, interne, du Maroc, et, qu'il pave la voie à la sournoise infiltration métastatique de l'entité sioniste au Maghreb, et, au Sahel.

Malgré le secret qui entoure ce type d'intervention, l'ombre, et la bénédiction de la France , ne sont jamais , bien , loin, quand il s'agit de sa chasse gardée.

Mu par son jusqu'auboutisme, et, de ce fait, par une prédisposition à toutes les extrémités, et, à toutes les compromissions, , le Maroc, s'est rapetissé , du fait de sa dépendance vis à avis de la France, et, de ses accointances israéliennes , jusqu'à devenir le ventre mou de la sécurité maghrébine.

Parce que, probablement, gênante, compte tenu de l'impossibilité de rapprocher des points de vues, et, des positions antinomiques, la question du Sahara Occidental, n'est pratiquement, jamais, évoquée dans les déclarations, et, communiqués, officiels, algéro- français.

Cela étant, la diplomatie, il est vrai, dispose, pour s'exprimer, de ses propres canaux de communications.

Évacué du discours, politique, comme un sujet tabou, le problème sahraoui semble avoir fait l'objet d'un deal, tacite, ou, convenu, au motif que sa prise en charge relève de l'ONU. Une manière d'éviter le sujet qui fâche pour ne pas envenimer la relation bilatérale. On admet seulement, de rappeler que la France use de tout son poids pour bloquer toute résolution contraire aux ambitions territoriale de son nouveau protectorat.

Le transfert du dossier au conseil de sécurité de l'ONU, le met, en termes d'impact, hors de portée de l'Algérie, et, de l'Assemblée Générale de l'instance internationale, et , permet à la France d'avoir les coudées franches pour le gérer à sa guise.

La diplomatie qui cultive, avec talent, les belles tournures de phrases, estime qu'il est possible de concilier , malgré tout, les intérêts bilatéraux, en déconnectant la coopération économique, des contingence de la politique étrangère.

L'option qui consiste à expurger les relations bilatérales des éventuels blocages, notamment du lourd dossier sahraoui est une approche dont on perçoit, peu, les avantages qu'en tire l'Algérie.

Que la France n'ait en point de mire que ses intérêts stratégiques derrière la paravent de la théorie du gagnant-gagnant, et , qu'elle ne s'intéresse à ceux des autres que pour mieux les contrer, est de bonne guerre.

L'ambiguïté, du coté algérien, est dans le fait de se fendre en déclarations superfétatoires, faisant mention du bon état d'esprit régnant entre les deux capitales, et, en ignorant, par là même , l'effet rédhibitoire des différends politiques.

Les empressements à se trouver des motifs d'espoir, alors que les désaccords sont tenaces, font dans des emportements qui ne sont pas à l'abri des incertitudes propres aux rapprochements conjoncturels.

L'irrégularité sinusoïdale, du tracé des relations, politiques, algéro- française, qui alternent le froid et le moins froid, selon les gouvernements de France, est une invite à une prudente retenue.

Sphère de collisions des diverses collusions d'intérêts qui régentent le monde, les relations internationales ne se prêtent que peu souvent aux éclosions, et aux effusions d'amitiés.

Politiquement, Alger et Paris ne partagent pas beaucoup de convergences. Outre l'handicap de la multiplicité des sujets pendants ( aspects mémoriels; archives; visas; trésor de la régence; biens patrimoniaux culturels, irradiations atomiques ....) ils sont séparés, à l'international, par des divergences d'analyse, d'approches, et, d'objectifs sur presque tout: Syrie, Libye, Irak, Sahara Occidental, Sahel...

Les terrains d'ententes parfaites ne son pas nombreux. D'où le paradoxe, de ces échanges diplomatique, ou l'on se fabrique de soudaines proximités, que déconstruit une réalité politique, pavée, de contentieux, et de désaccords.

Le paradoxe, est aussi, dans l'option, avantageuse au profit de la France, de détacher de leur osmose, et , de leur complémentarité les nécessités économiques des aléas politiques.

Que la France ait les yeux de chimère pour le marché algérien peut se comprendre. Par contre, les raisons de ces largesses, octroyées par l'Algérie, et, de ses acquiescements sans contre partie visible, relèvent de considérations méconnues.

De légitimes questionnement surgissent au constat qu'au préjudiciable engagement français aux cotés de l'agression marocaine, et, au blocage, consécutif, de l'espoir maghrébin, répond une facilité, conciliatrice, algérienne, qui, sous le vernis du langage diplomatique, évacue les désaccords, et, table sur de surprenantes cordialités sur fond de contentieux.

Il est un principe selon lequel l'indépendance est dans la diversification des dépendances économiques. L'interchangeabilité des partenariats, à l'échelle mondiale offre la possibilité d'introduire un minimum de symbiose entre les fondements de politique extérieure, et, les exigences du développement et de minimiser les inégalités charriées, depuis toujours, par les relations bilatérales avec une France, non encore libérée, à l'endroit de l'Algérie, des réminiscences ataviques, d'une certaine mentalité trans générationnelle d'un certain 19 eme siècle.

*Docteur - Universitaire