
Finalement, il ne fait pas bon d'être Président dans les
pays dits «arabes». Si le peuple vous élit, l'armée vous chasse. Si l'armée
vous choisit, le peuple vous déloge. Si vous êtes islamiste, vous n'avez rien
compris. Nationaliste est une mode démodée. Libérateur, vous êtes l'ennemi de
L'Occident. Si vous tombez malade, tout le monde espère votre mort. Si vous
êtes en bonne santé, vous décevez tout le monde. Le choix est brutal : chez
nous, lorsqu'un président ne mange pas son peuple, son peuple le mangera tôt ou
tard. Un Président dans le monde dit arabe est mâché, chassé, lynché ou caché.
C'est à se demander pourquoi tout le monde veut être président et l'être deux
fois sa vie quand on voit comment cela commence et comment cela finit. Sur une
civière pour Moubarak. Dans un trou pour Saddam. En viande hachée pour Kadhafi.
En esclave à moitié affranchi en Arabie pour Ben Ali. En secrétaire pour
Medvedev pour Bachar le boucher. En imam occulté pour Morsi. De retour dans le
désert pour Bouteflika. Cela mène même à conclure qu'il vaut mieux être Roi.
Là, le pays est celui de votre Père et pas celui de votre fils. La seule
différence entre les deux parfois. Et pas tellement. Et encore et si peu. D'ailleurs,
pourquoi vouloir être Président ? Qu'est-ce que ce métier que tout le monde
veut et que personne ne sait faire ? On y dort mal, inquiet et soupçonneux. On
n'y a pas d'amis. On peut en être licencié à n'importe quel moment de la
seconde minute. Ses enfants n'en tirent pas une saine éducation, ni de
l'honnêteté. Le pays vous appartient mais vous ne pouvez même pas sortir vous y
promener sans escorte. Vous avez vos portraits partout, sauf dans les cœurs.
Vous êtes le père du peuple mais tout le monde vous enterre. Donc, on ne sait
pas. Ce n'est pas un avenir, juste un glorieux passé quand on finit par passer.
La plus grande preuve que l'on peut se passer de vous en tant que Président est
l'Algérie, centre du monde vide, cœur du cosmos en panne : le Président en est
absent depuis des mois et le pays va bien, mange, s'habille, dort calmement et
a de l'argent de poche. C'est le plus cruel démenti au destin d'une présidence
et au sentiment qu'on a un destin. Si les Présidents coûtent en argent, en
élections, en coup d'Etat, en armée, garde rapprochée et rumeurs et manœuvres,
on a donc montré l'exemple au reste du monde : voici comment faire des
économies : licenciez votre président et ne recrutez personne à la place. Un
pays sans tête n'est pas un pays sans idées.