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Crise financière: Les assurances de la Banque d'Algérie

par Yazid Alilat

L'Algérie n'est pas dans une situation financière de crise, estime le vice-gouverneur de la Banque centrale d'Algérie (BA), M. Djamel Ben Belkacem. Dans une intervention, hier mardi, à la radio Chaine3, il a indiqué que: «je ne pense pas que l'on soit dans une situation de crise financière. C'est vrai que la baisse de 47% du prix du pétrole, en 2015, et la poursuite de cette baisse jusqu'en juin 2016, a eu un impact énorme sur notre économie, cela a impacté les exportations des hydrocarbures, qui ont diminué en valeur, et cela a aussi impacté la fiscalité pétrolière, dans le budget de l'Etat, ce qui a provoqué un déficit de la balance des paiements, du solde courant de la balance des paiements ainsi qu'un déficit budgétaire, qui est assez important.» «Ceci dit, être en crise financière, je ne le pense pas, car depuis les années 2000, les politiques économiques des pouvoirs publics ont permis la constitution de réserves de change assez importantes (114 mds de dollars, à fin 2016, Ndlr), avec un pouvoir d'achat sur l'extérieur, la constitution d'un fonds de régulation des recettes, donc une épargne nette de l'Etat qui a permis à l'Economie algérienne, contrairement à d'autres pays dans la même situation que nous, d'avoir une capacité de résilience beaucoup plus importante. C'est ce qui a permis à l'activité économique de ne pas baisser, car la croissance est restée vigoureuse, en 2015 et 2016.»

Le Vice-gouverneur de la Banque d'Algérie a expliqué, par ailleurs, qu'en 2015, il n'y a pas eu de baisse des dépenses publiques, «mais un déficit budgétaire moins important dans les premiers mois de 2016, donc il y a eu un effort de consolidation budgétaire.» Globalement, il a rappelé les efforts de baisse des importations, en particulier en valeur, une baisse estimée à 7 milliards de dollars, et se sont établies sur l'année 2016, à 49 mds de dollars. Cela grâce aux efforts de diminution de la facture des importations, à travers la mise en place du système des licences (ciment, voitures, ..).

Par contre, M. Ben Belkacem estime nécessaire «l'importation des équipements industriels. On est obligé de les importer, car ils ne sont pas produits en Algérie.» Pour autant, il affirme que « les mesures administratives pour diminuer les importations n'apportent pas toujours les bons résultats, c'est une question de demande globale.» Pour lui, il s'agit de problèmes d'ajustements dans l'Economie nationale. «Pour 2016-2019, les pouvoirs publics ont tracé un cadre budgétaire et un effort de consolidation budgétaire», a-t-il dit. Selon M. Ben Belkacem, il y a deux défis majeurs, dans le contexte actuel: le premier est de mettre en place des ajustements des balances de produits, et le second est qu' « il ne faut pas trop ajuster, car il ne faut pas que la balance des paiements diminue trop.» « Le défi, c'est de maintenir un niveau de croissance économique appréciable », en stimulant l'investissement. En 2015, la croissance économique a été de 3,8% et de 5% hors hydrocarbures, a t-il rappelé, estimant que pour 2016, « il sera question des mêmes chiffres, en termes de croissance économique», car, selon lui, «l'activité économique est restée, relativement soutenue, et à l'avenir, le défi c'est de relancer beaucoup plus l'investissement.» Le refinancement des banques par la Banque d'Algérie a été à hauteur de 430 milliards de dinars, a-t-il indiqué. Sur le taux de change du dinar par rapport aux deux principales devises, le dollar et l'euro, il a admis que la monnaie nationale a été dévaluée en 2015 de 15 à 20% et de 3% en 2016. «La raison est que les monnaies de nos partenaires se sont dépréciées par rapport au dollar », a expliqué M. Ben Belkacem, selon lequel le dinar en 2015 « a joué son rôle d'ajustement par rapport au dollar. » Pour ajuster «notre économie, il y a d'autres variables qu'il faut mettre en œuvre», souligne-t-il, ainsi que «l'ajustement budgétaire.» «'A la Banque d'Algérie, on veut arriver à une valeur du dinar qui soit stable, mais à moyen terme.» Par ailleurs, il a relevé qu' «il y a eu une reprise de l'inflation en 2015 et 2016, après avoir baissé, en 2014. Cette reprise à la hausse de l'inflation n'est pas, selon lui, liée à la hausse de la masse monétaire en circulation. «La quantité de monnaie en circulation n'a pas augmenté. En 2015, elle a augmenté de seulement 0,13%, et les autres années de 12 à 15 %, et donc on ne peut incriminer la hausse de la masse monétaire pour expliquer la reprise de l'inflation. Pour le n°2 de la Banque d'Algérie, «l'impact de la dévaluation du dinar n'est pas énorme sur l'inflation, mais celle-ci serait le résultat de l'imperfection et le manque de concurrence, sur l'ensemble de nos marchés.» «La dépréciation du taux de change ne justifie absolument pas, cette recrudescence de l'inflation», estime-t-il. Sur la stabilisation de la valeur de la monnaie nationale, M. Ben Belkacem a expliqué que le régime de change du dinar «est un régime de flottement dirigé, et il y a eu dévaluation de 20% par rapport au dollar et 3 à 4% par rapport a l'euro.» Depuis juin 2016, il est stabilisé», mais, à «la Banque d'Algérie, on considère que le taux de change ne doit pas supporter, tout seul, le poids de l'ajustement.» D'autre part, il a souligné que « le problème (du déficit) de la balance commerciale est que les exportations ont diminué, le prix du pétrole est passé de 110 à 50 dollars.» «C'est ce qui a fait que le déficit commercial s'est creusé. Avec une hausse des cours, on table sur un prix du pétrole de 46 dollars en 2016, et 50-55 dollars en 2017, et il va se stabiliser après la décision de l'Opep. On table sur un baril de 55-60 dollars, d'ici à 2019. Les exportations vont reprendre, et le déficit commercial va baisser de manière significative», estime-t-il. Mais, pour le moment, préconise le vice-gouverneur de la Banque d'Algérie, «il faut consolider les dépenses publiques et avoir un meilleur impact sur l'activité économique.» Le ministère des Finances a «prévu une hausse des recettes hors hydrocarbures de 2%, ce qui est faible. On table sur une augmentation des recettes ordinaires ,hors fiscalité pétrolière, pour arriver à l'équilibre du budget», relève, encore, M. Ben Belkacem, qui affirme qu'il faut «continuer à faire de la dépense d'équipement, c'est vital pour l'économie et pour soutenir la croissance. Mais, il vaut mieux dépenser avec des projets ayant un impact direct sur l'économie, avec les mêmes montants pour obtenir beaucoup plus en termes de résultats.» Estimant que le secteur industriel enregistre une réelle reprise depuis «quatre-cinq années», il a souligné, par ailleurs, qu' «il faut changer de modèle de croissance pour booster l'Economie, avec une amélioration du climat des affaires et des investissements », avant de rappeler que « le rôle de la BA est de donner les ressources financières aux banques pour financer les projets économiques.» Enfin, sur les bureaux de change, il a estimé qu'ils ne «vont rien changer. (Et) la hausse de l'allocation touristique n'est pas à l'ordre du jour. Si la situation s'améliore, cela peut être envisageable. »