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Procès Khalifa : Des négations et des «oublis»

par Tahar Mansour

Il faut dire que tous les accusés de ce procès se sont donnés le mot pour nier en bloc les accusations qui sont portées contre eux et infirmer leurs déclarations aussi bien devant les enquêteurs de la gendarmerie que devant le juge d'instruction.

En premier, c'est Abdelmoumène Rafik Khalifa qui est appelé à la barre pour la suite de son audition, surtout en ce qui concerne les circonstances de la création de Khalifa Bank et des malversations qui l'ont accompagnée. Le juge lui demande de lui expliquer comment il a réussi à obtenir toutes les autorisations en un laps de temps assez court et en passant outre certaines lois. Khalifa explique qu'il lui a quand même fallu plus d'une année pour préparer l'argent nécessaire à la création d'une banque et l'obtention d'une autorisation provisoire qui ne devient définitive qu'après une année d'exercice. Il explique aussi que le travail principal de la banque consiste à gérer les comptes des clients, à recevoir les dépôts et, chaque après-midi, l'argent était versé directement à la caisse principale de la banque. Tout ce travail était bien sûr rémunéré et l'ensemble des agences de Khalifa Bank généraient jusqu'à 6 milliards de centimes de bénéfice quotidiennement, parfois beaucoup plus. Il enchaîne ensuite sur la facilitation des bons de caisse octroyés par la BDL pour que les clients puissent régler leurs problèmes financiers urgents puis remboursent et afr»firme ensuite que c'est grâce aux bénéfices engrangés par l'entreprise de production pharmaceutique que Khalifa Bank a pu être lancée. Par la suite et pour les autres entreprises, ce sont les bénéfices réalisés par Khalifa Bank et Khalifa Airways que des investissements majeurs ont été consentis par les actionnaires pour élargir l'empire Khalifa. Revenant aux faits qui lui sont reprochés, Khalifa rappelle qu'il n'a jamais eu l'intention de fuir à l'étranger mais qu'il a dû le faire pour des raisons évidentes de sécurité et afin d'éviter que le sang coule. Après avoir répondu aux questions des avocats de la défense, le principal accusé dans ce procès rejoint sa place et c'est le notaire Omar Rahal qui est appelé à la barre. De prime abord, on se rend compte que l'âge pèse beaucoup sur lui et sur ses capacités physiques, même si à 86 ans il reste toujours debout. Tout comme Khalifa, il nie toutes les accusations portées contre lui et ajoute souvent : «après 17 ans maintenant, il y a beaucoup de choses que j'ai oubliées». Lorsque le juge lui pose des questions, il se fait répéter les questions plusieurs fois, jusqu'à excéder le juge qui essaie, malgré tout, de garder son calme et d'expliquer du mieux qu'il peut. Il rappelle même au prévenu que l'expertise a démontré qu'il n'a rien à voir avec les actes d'hypothèque falsifiés mais qu'il doit répondre aux questions pour essayer de trouver ce qui aurait bien pu arriver jusqu'au cachet qu'il utilise toujours. En effet, si l'expertise graphologique a démontré que ce n'était pas le notaire, Me Omar Rahal qui avait établi les faux actes d'hypothèques, le cachet qui y était apposé était bien le sien, ce à quoi il répondit que le cachet ressemblait au sien mais qu'il ne lui appartenait pas. Il démontre une même incompréhension quand le juge puis le procureur général lui parlent du ¼ du capital initial qui devait être déposé auprès de la Banque d'Algérie et avance que c'est plutôt le 1 cinquième du quart qui aurait dû être déposé, là aussi des signes d'incompréhension étaient visibles chez les juges et chez l'assistance. Toujours en réponse à des questions du juge, le notaire ne donne aucune explication concernant le fait qu'il ait établi un acte portant modification des statuts sans avoir reçu l'autorisation préalable de la Banque d'Algérie. Le procureur général lui proposa d'arrêter les questions s'il ne se sentait pas bien. Le président du tribunal essaie ensuite de savoir qui aurait bien pu utiliser le cachet à son insu pour l'apposer sur l'acte d'hypothèque, mais Me Rahal affirme qu'il n'y avait que sa secrétaire qui les avait pour ouvrir la porte dès 6h du matin. Quant à son clerc, M. Djamel Guelimi, il affirma qu'il ne l'avait plus revu depuis qu'il avait quitté son étude en 2014. Pourtant, il déclara l'avoir rappelé pour qu'il l'accompagne à la demeure de Khalifa au Paradou (Alger) pour recueillir les signatures de deux actionnaires qui n'avaient pas apposé les leurs. Le procureur général s'étonna qu'il ait fait appel à son ancien clerc alors qu'il n'habitait (le notaire) qu'à deux pas de Khalifa Abdelmoumène et qu'il était donc censé le connaitre mieux.