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La défaite du onze algérien: Le pourquoi de la chose

par Aïssa Hireche

Il a fallu que l'équipe nationale perde jeudi en demi-finale de la Coupe d'Afrique des nations pour que certains pyromanes donnent libre cours à leur sport favori d'allumeurs de feu.

Si les attentes largement partagées entre les Algériens avant la rencontre n'ont pas été satisfaites, il ne faut pas en vouloir à Saâdane, ni aux joueurs, ni au staff qui accompagnait cette équipe. Laissons le soin de l'analyse sur le plan sportif aux spécialistes et, aussi, parce que nous croyons fermement que la défaite n'a pas eu lieu sur le terrain, nous présentons, en ce qui suit, une analyse non footballistique de la défaite de jeudi soir. Comme tout mauvais résultat, celui réalisé par l'équipe algérienne de football ce jeudi a des facteurs explicatifs qu'il convient de situer. Parmi les plus importants, il est aisé de recenser trois facteurs qui sont l'absence d'objectif, le manque de maturité et la naïveté de nos politiciens.

L'absence d'objectif

 Parce qu'il n'est pas de vent favorable pour celui qui ne sait où aller, aucun groupe au monde ne peut être performant s'il n'a pas d'objectif.  Aucun groupe, aucune entreprise, aucune organisation de manière générale ne peut prétendre à une compétitivité quelconque tant qu'ils n'ont, d'abord, un objectif autour duquel viendront se nouer les efforts des uns et des autres. On dit que l'essence du management c'est de fixer des objectifs et tenter de les réaliser. Ce que fait le coach d'une équipe nationale, ce que fait le manager à n'importe quel niveau de l'entreprise, c'est du management. Rien d'autre. Or sans objectif, que peut-on réaliser ?

 Depuis que l'équipe a été qualifiée contre l'Angola, on ne cesse de dire et répéter à tous les coins de rue, dans toutes les colonnes et sur les plateaux de toutes les émissions de la chaîne unique, que l'objectif est atteint. Que l'équipe a réalisé ce pourquoi elle était venue en Angola. Ceci signifie tout simplement que les joueurs algériens n'avaient plus de motif pour la suite de la compétition. En affrontant l'équipe ivoirienne, nos joueurs avaient un défi à relever, celui de battre le favori de la compétition, cette équipe que tout le monde craignait, à raison d'ailleurs. Cette volonté avait pallié au manque d'objectif et elle était suffisante pour pousser les joueurs à aller au-delà de leurs limites naturelles. Nous avons vu des joueurs tels que Belhadj et Ghezzal, qui semblaient manifester une fraîcheur physique extraordinaire au-delà des la 120e minute, chose qui est loin d'être normale ou simple. Si les Algériens ont gagné ce match, avec la manière en plus, c'est parce qu'ils avaient puisé dans cette volonté qui s'est substituée à toute forme d'objectif. Après cette rencontre, n'ayant plus d'objectif, et avec la fatigue en plus, ils ne pouvaient pas gagner la rencontre de jeudi. Ils ne pouvaient pas la remporter d'autant plus que, en face, leurs adversaires avaient au moins deux objectifs pour la réalisation desquels ils s'étaient fortement préparés. Leur premier objectif était de garder leur titre de champions d'Afrique. Après leur disqualification au Soudan, en novembre dernier, du Mondial de Johannesburg, il ne leur restait que la Coupe d'Afrique pour sauver l'honneur.

 Leur second objectif était de prendre la revanche contre cette équipe qui les a disqualifiés du Mondial et qu'ils savaient sans objectif parce que les nôtres hurlaient sur tous les toits, avec beaucoup de fierté, que leur objectif était seulement de passer au second tour. Les enjeux de la demi-finale qui opposa les joueurs algériens à l'équipe adverse n'étaient pas de même taille pour les deux équipes. La motivation non plus. Notre équipe ne pouvait gagner ! Pour espérer gagner, il fallait revoir l'objectif et le corriger en fonction des réalisations.

Le manque de maturité

 Le second facteur auquel on peut faire appel pour expliquer la défaite de jeudi, c'est certainement le manque de maturité de nos joueurs. Cela semble paradoxal pour une équipe essentiellement composée de joueurs professionnels mais c'est malheureusement la réalité qu'il nous a été donné de constater.

 Tout observateur aura remarqué dès le départ que certains de nos joueurs n'avaient pas le comportement normal, du moins pas celui que nous leur connaissons. Ghezzal s'est illustré dès les premières minutes par un geste anormal contre un défenseur adverse, Ziani a manqué de peu la jambe de son vis-à-vis qu'il visait volontairement, Chaouchi a été l'auteur de deux gestes inadmissibles contre l'arbitre et contre l'attaquant adverse, ce qui lui valut un carton rouge, Halliche faucha un attaquant dans la surface de réparation ce qui, en plus du penalty, lui coûta de sortir du jeu. Belhadj se vit attribuer un carton rouge pour jeu dur aussi... Pour des joueurs professionnels, le comportement était trop immature, c'est malheureux mais c'est ce qui nous a été donné de constater. Pour ce qui est des gestes de Chaouchi, il faut dire que ce sont là des gestes qui méritent sanction de la part de l'entraîneur national parce qu'il y a un minimum au-dessous duquel on ne va pas lorsqu'on est dans une équipe nationale. Indifféremment de celui qu'on a en face et indifféremment de celui qui officie la partie. Un joueur, cela doit rester un joueur, un point c'est tout !

 Ce manque de maturité peut être expliqué par trois choses. La fatigue qui fait suite à la généreuse dépense d'efforts lors de l'épuisante rencontre du la Côte d'Ivoire, une certaine sensibilité à l'égard de l'adversaire du jour et l'insuffisance du travail psychologique de l'encadrement.

La naïveté des nôtres

 L'arbitrage a été au-dessous des attentes. L'arbitre a marqué sa préférence dès le début. Il suffit de revoir la rencontre pour s'en convaincre. Mais cet arbitre qui vient nous rappeler la fragilité de la raison et le haut degré de l'à-peu-près et de l'incorrection en terre africaine n'est pas venu seul sur le terrain. Ni par hasard. Cette chose, les nôtres l'ont sous-estimée, ou plutôt ils ne l'ont même pas sentie venir, exactement comme ils n'ont rien senti venir la veille da la mascarade du Caire oubliant que certains pays excellent dans l'art de l'influence, des coulisses et des basses affaires. Au lieu d'intervenir par téléphone dans des émissions télévisées, comme n'importe quel téléspectateur, nos ministres devraient s'occuper à jouer d'abord leur rôle de politicien.      Ils avaient tout le temps de penser à la chose et d'y parer d'une manière ou d'une autre.

 Mi naïfs, mi inconscients, emmitouflés dans les victoires sur le Mali et sur la Côte d'Ivoire, les nôtres ont oublié d'agir comme le font tous les autres. Ils ont oublié d'agir sur le plan de la communication croyant bêtement qu'on peut gagner un match rien qu'en envoyant des supporters en charters alors que ceux d'en face ont préparé sur le plan communicationnel la rencontre depuis longtemps... depuis Oum Darman.