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ENTRE COLERE ET REALISME

par M. Saadoune

Le Front Polisario a choisi, sagement, de «positiver» après la «volte-face» américaine au sujet de l'extension du mandat de la Minurso à la surveillance du respect des droits de l'homme au Sahara Occidental et dans les camps de réfugiés. Le mouvement indépendantiste sahraoui a probablement été aussi déçu que les organisations internationales des droits de l'homme qui réclament cette extension du mandat de la Minurso, mais il a préféré avoir une réaction plus politique qu'émotive.

La réaction épidermique du Maroc accompagnée d'une annulation de manœuvres militaires prévues de longue date a créé un intérêt médiatique important sur la question sahraouie qui est reléguée à la marge. «L'initiative américaine restera dans le radar aujourd'hui et demain et ne va pas disparaître dans le cadre du suivi par le Conseil de sécurité de la situation des droits de l'homme au Sahara Occidental qui sont bafoués d'une manière systématique et cruelle par le Maroc», a déclaré un responsable sahraoui. Un autre responsable est beaucoup moins conciliant et constate que le compromis qui a amené à abandonner la résolution initiale montre que le «pacifisme ne mène nulle part». Entre colère et réalisme, le Polisario n'a pas, pour le moment, de choix que de prendre acte.

La déclaration qui cherche à positiver peut paraître comme une forme d'auto-consolation mais le constat n'est pas fondamentalement faux. Les militants sahraouis au Sahara Occidental dont l'expression est interdite et réprimée auraient souhaité que la Minurso s'occupe de la question des droits de l'homme. Il reste que l'insistance sur le respect des droits de l'homme dans la résolution devrait renforcer la détermination des Sahraouis et renforcer l'intérêt des organisations des droits de l'homme. Déjà Human Rights Watch souligne que l'insistance sur les droits de l'homme n'aura de sens que si des experts des droits de l'homme de l'Onu ont la capacité d'effectuer des visites régulières sur le terrain. Et on peut penser que les ONG ne vont pas désarmer sur cette question même si la France aura particulièrement pesé pour sauver la mise à Rabat.

LE MAROC AURAIT TORT DE TROP PAVOISER. CERTES, IL A OBTENU GAIN DE CAUSE. WASHINGTON N'AYANT PAS LE SAHARA OCCIDENTAL DANS SES GRANDES PRIORITES A CHOISI DE NE PAS FROISSER SES ALLIES FRANÇAIS ET ESPAGNOLS QUI ONT MULTIPLIE LES SUPPLIQUES POUR ENTRAVER LE PROJET. MAIS LA REACTION PARTICULIEREMENT HYSTERIQUE DE RABAT, DONT LE PALAIS S'EST MUE PENDANT QUELQUES JOURS EN «PARTI ANTI-IMPERIALISTE», LAISSERA DES TRACES. CAR, APRES SA «VICTOIRE», RABAT AURAIT DECIDE DE REVENIR SUR SA DECISION D'ANNULER LES EXERCICES MILITAIRES CONJOINTS AVEC LES AMERICAINS PREVUS A AGADIR. IL EST CLAIR QUE LES EXCES VERBAUX ET LA DECISION JUGEE INTEMPESTIVE D'ANNULER LES MAN?UVRES MILITAIRES LAISSERONT DES TRACES. LA «VICTOIRE» MAROCAINE RESTE A VERIFIER SUR LE PLUS LONG TERME. POUR LES SAHRAOUIS, LE TEMPS N'EST PAS ENCORE A L'EXPRESSION TROP VIVE DE LA COLERE. IL EST AU REALISME.