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Autodestruction

par Baghli Abdelouahab

Le FLN le plus vieux parti d'Algérie, n'en est pas un. Il a été transformé en un appareil d'Etat.

Ccomposé de structures d'un parti (Secrétaire Général, Bureau Politique, Comité Central, Mouhafadats et Kasamates), doté d'un programme qui se veut républicain, nationaliste et social démocrate, il a puisé ses références dans les profondeurs de l'histoire insurrectionnelle : Etoile Nord Africaine ; Parti du Peuple Algérien, Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques Ni centraliste, ni messaliste, le FLN est né par la déclaration du 1 er Novembre 1954 qui est son extrait de naissance, ainsi que des différents congrès qui ont lieu avant l'indépendance, (celui de la Soummam et celui de Tripoli) et ceux réalisés après la libération du pays.

A l'opposé des autres formations politiques, le FLN a déclaré la guerre à la France. Et c'est grâce à lui et au prix d'énormes sacrifices consentis par la population qui a pleinement adhéré à son objectif révolutionnaire, que le pays a recouvert son indépendance. Au lieu de mettre ce capital d'expériences, acquis chèrement par le frottement contre une interface représentée par un Etat puissant très au point dans la tactique guerrière, dans la subversion ; le F.L.N sera annihilé pour devenir la proie de l'autoritarisme. Au recouvrement de la liberté nationale, le F.L.N.aurait pu continuer la phase de reconstruction, de croissance et de développement répondant à la sentence proverbiale « nous avons fini le jihad el esghar et nous devons retrousser nos manches pour le jihad el akbar ». Le FLN est programmé pour être un parti d'avant-garde. Malheureusement, le parti est confisqué et devient un appareil d'Etat, instrumentalisé pour les besoins sociopolitiques, démagogiques, agissant comme une courroie de transmission, statique, entre un pouvoir qui se sclérose de plus en plus et le peuple qui souffre de plus en plus de la distanciation. Il est vidé de sa dynamique à l'instar du mouvement scout qui est devenu une structure de parade. La différence entre le parti et l'appareil est la perte d'autonomie, valeur qui lui assure la dynamique d'évolution et de maturation. La main mise est sournoise et pernicieuse, elle consiste à avoir la tête de la structure. En effet le poste du Secrétaire Général, ne répond pas à l'émanation de la volonté des militants, il est parachuté d'en haut. A lui seul ce délit pénalise tous les actifs et met à l'ombre toutes les autres potentialités. Plus rien n'est important en aval. Telle une pelote, dont on tient le bout du fil, le reste suit de facto.

Mais cette entrave, cette immixtion donne au S.G. les pleins pouvoirs, elle lui confère un droit d'ostracisme vis-à-vis des militants, il n'a plus peur des militants, triomphaliste, arguant sous sa cape que celui qui l'a désigné est le seul qui peut l'enlever. Ce qui lui importe désormais, c'est l'humeur du prince.

Le la est donné. Suit un enchainement d'attitude perverse qui découle directement de la première atteinte à la réglementation. Ce clientélisme se répandra telle une pandémie à l'ensemble des structures allant de la plus haute instance à celle du plus bas niveau de l'échelle. Les militants ne vont plus se faire valoir pour accéder à la gradation par leur militantisme, leur compétence, mais par leur allégeance, les courbettes?a qui mieux, mieux la subordination.

Le rêve serait de donner l'autonomie à ce parti qui recèle encore d'énormes potentialités humaines. Garantir des élections libres et crédibles au niveau de toutes les structures du parti, sans immixtion, en se référant à l'application stricte du statut et du règlement intérieur. Le processus d'autonomie doit partir à rebrousse poil c'est-à-dire à partir des kasmates. L'onde de départ ne doit pas venir d'en haut c'est-à-dire à partir de la désignation du S.G mais remonter à partir de la base. N'oublions pas que c'est au niveau de la kasma, qui est la cellule de base, que se joue l'avenir du pays. En effet, elle a un rôle primordial. Elle est dans un parti ce que l'A.P.C représente dans la hiérarchie de l'Etat. C'est à elle, qu'échoit l'autorité de choisir et de présenter les listes lors des élections locales et nationales. Une bonne kasma, légitime, constituée de vrais militants, d'hommes intègres, présentera sans aucun doute une liste correcte de candidats, qui représenteront dignement le parti. Ils seront de futurs bons maires, des présidents d'A.P.W. compétents, des membres volontaires dans les différentes assemblées locales ainsi que des députés à la hauteur.

La construction de l'édifice organique continue par étapes ascendantes. L'élection du mouhafad de wilaya doit se faire à son tour par les urnes, par la voix des seuls militants, qualifiés pour être membres dans l'assemblée générale élective.

Le Secrétaire Général sera élu par les militants retenus comme congressistes conformément au statut et du règlement intérieur, et bien entendu et surtout en dehors de toute ingérence, d'aucune tutelle. Avec cette transparence c'est-à-dire une volonté avérée de laisser évoluer l'institution en toute liberté, nous pouvons assurer le retour à la normalité et par voie de conséquence, relever tous les défis. Les autres partis pourront copier ce modèle. Ils verront à leur tour pointer une élite politique.

Ainsi réalisées, ces élections mues par la compétitivité retenue comme critère, aboutiront obligatoirement à l'émergence de la compétence, au sérieux, qui donneront naissance à une classe politique, des hommes d'Etat, des hommes de grande valeur. Le président de la république, le premier ministre, auront le choix à satiété pour recruter des ministres compétents parmi ce vivier d'aptitude. De même, les Rendez-Vous pour les élections présidentielles mettront à contribution des personnalités de valeur, représentants des différents partis que les militants défendront à bras le corps, avec fougue pour les avoir défendus et plébiscités au niveau de leur structure.

On bat le tambour à longueur d'année pour dire qu'il n'y a pas d'homme capable d'assurer la relève. C'est une fausse vérité, le système flanqué dans sa tour d'ivoire a tout fait pour atomiser les bonnes consciences, je réponds qu'il y a des hommes, à condition qu'on leur donne la chance d'émerger.

Ce n'est pas une requête onirique, Il n'y a rien à innover, il suffit d'appliquer ce qui se passe à travers tous les pays du monde.

Pourtant le FLN mérite mieux. Il reste toujours ancré au sein de la population. On peut avancer sans médire que malgré tous les aléas qu'il a subi jusqu' à ce jour, il reste un espoir pour le peuple. Le processus en cours est stérile, il fait fuir les hommes de valeur, il condamne les compétences, il n'enfante et ne s'entoure que de médiocres. Jamais nous ne pouvons construire un Etat sans la compétence, sans l'application de la réglementation, sans la justice

Il était plus qu'évident que le parti FLN allait connaitre un dénouement pareil. La crise liée à la recherche du futur S.G. persiste et risque de durer plus longtemps. Perdu, tel un enfant, le parti n'arrive pas à trouver sa voie. Habitué à être pris en charge, à la délibération hors enceinte, il est à l'attente du Messie. Entre recevoir des ordres et se prendre en charge, le F.L.N. reste perplexe.

Verra ? t ?on un jour sortir la fumée blanche du conclave émise par un accord entre les pairs sans y voir le doigt pointé du divin.

La mue du F.L.N en un parti est plus que nécessaire. Il y va de l'avenir du pays. Le déclic de processus de démocratisation en berne actuellement en Algérie peut commencer par ce premier pas.

Le mot de la fin : Le dire c'est bien, l'appliquer c'est une autre paire de manche.