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«Koursi» shows !

par Belkacem Ahcene-Djaballah

Décidemment, certains corps de métiers n'en finissent pas de faire " suer " les décideurs et les analystes de tous bords, surtout les décideurs, et de les amener, donc, à passer leur temps - de conférences en séminaires et de colloques en interviews - en critiques, récriminations et autres invectives à l'endroit de ceux qui , bien souvent, ont été leurs collaborateurs ou leurs confrères, leurs confidents, leurs amis et/ou leurs complices. Il est vrai qu'en ces temps de fin de règne(s) et d'incertitudes politiques, beaucoup, pressés par le temps et les échéances (on parle, dans les salons, d'un autre remaniement ministériel en ????, et si l'on se fie aux statistiques, cela ne saurait tarder !) font " feu de tout bois ". Soit pour " percer ", soit pour " réussir " leur (s) projet(s), soit pour imposer ,pour longtemps, en tout cas pour un bon bout de temps, leur présence sur la scène, soit pour " faire passer " leur façon de voir et leurs idées. Ce qui n'est pas condamnable en soi si l'on sait ce qu'est réellement -et globalement, car il y a , bien sûr , des exceptions - un homme dit " politique " ou plus simplement un " politicien " : " Chaque politicien est esclave d'une fibre de nature paranoïaque qui lui interdit de reconnaître chez l'autre un mérite ou des qualités supérieures aux siennes. Il se pose lui-même en chef à qui il est dû l'allégeance des autres " ( Redha Malek, " L'empreinte des jours ", Casbah Editions, 2013)

Bien sûr, il y a certainement, chez beaucoup, de la " volonté de bien faire " et des intentions louables. Surtout chez les tout nouveaux (et aussi, paradoxalement, chez certains anciens, trop enfoncés dans le fauteuil décisionnel) .Mais, assurément, peu d'innocence ! Normal. Relisez Le Prince de Machiavel ou, plus proche de notre société politique, Ibn Khaldoun.

A l'exemple d'un responsable d'organisation de travailleurs , sinon assez influente du moins très puissante par le nombre déclaré de ses adhérents ainsi que par ses participations actives à toutes les actions d'Etat, qui , d' abord, s'en est pris , un jour, aux universitaires chercheurs affirmant qu'ils ne mériteraient pas leurs salaires vu? les (faibles ou inexistants, laisse-t-il entendre?et il n'a pas tout à fait tort ) résultats des recherches entreprises. Puis, en compagnie d'une Dame de parti, contre les fonctionnaires négociateurs dans le processus d'adhésion de l'Algérie à l'Omc.

A l'exemple d'un ministre qui s'en est pris aux journalistes qui doivent, professionnellement, selon lui, améliorer la qualité de leur travail, et aux journaux qui doivent améliorer leur gestion et leur gouvernance. Ingérence, quand tu nous tiens?encore !

A l'exemple d'un autre ministre qui annonce et prévoit de grands changements dans son personnel, pensant ou faisant croire que la gouvernance d'un secteur est une affaire seulement de " confiance ", oubliant les programmes à exécuter sans retard. Gaspillage des cadres, bien souvent encore bien jeunes, quand tu nous tiens?encore !

A l'exemple d'un chef de parti néo-islamiste légalisé, pas favorable du tout au principe des quotas (et n'ayant pas " avalé " la désignation de femmes ministres dans le nouveau gouvernement Sellal, alors qu'il rêve d'y retourner) qui s'en est pris aux femmes qui doivent donc continuer à dépendre de leur " homme ".

A l'exemple de l'ancien entraîneur national de l'équipe nationale de foot qui, contaminé par les façons de voir des décideurs nationaux et les dérives comportementales des Algériens (cela m'étonnerait bien fort qu'il n'ait pas demandé l'attribution -gratuite, bien sûr - d'une villa ou d'un grand terrain bien situé pour construction , ou?.), avait refusé d'accorder des entretiens à la presse nationale et de certaines de nos vedettes de foot qui , dans la foulée de leur mentor du moment ,et sur-contaminés, ont " snobé " la presse nationale. Etc?etc. Les exemples pullulent.

Il y a, inévitablement, le fait que chacun a, toujours ou presque, pour cible, l'objet de désirs refoulés ou d'ambitions contrariées ou de projets " dormants ".

Démarche :

Presque toujours un corps professionnel (c'est connu : Ne jamais s'éparpiller. Une idée et une cible seulement!):

D'entre toutes les cibles, actuellement, il y a en deux :

- Celle qui le plus " bon et large dos ", c'est bien la presse. Il est vrai, qu'inorganisée, tant au niveau des patrons que des travailleurs, la dispersion est de règle et facilite toutes les interférences.

Il est vrai que les contraintes économiques, objectives ou " provoquées " (surtout par des annonceurs publicitaires publics et privés?ainsi que par des décideurs ou des Appareils manipulateurs) pèsent d'un poids assez lourd dans les décisions ?et même dans les choix éditoriaux ; ces derniers allant jusqu'au sensationnel et au scandaleux.

Il est vrai, aussi et surtout, que l'entêtement des décideurs, en tous lieux et en toutes circonstances, à se terrer ou à inventer des alibis divers, surtout sécuritaires (un évitement hérité des années de plomb puis de la décennie rouge ) , en temps de crises , et à distiller , la plupart du temps par des sources " incompétentes " , tout juste capables de " lire " un texte réduit au strict minimum , des informations au compte-gouttes (non pas fausses mais toujours incomplètes ou en retard ) ??n'arrange pas choses , laisse place à toutes les rumeurs, décrédibilise les institutions touchées et oblige les journalistes et la presse , dans leur ensemble, sauf ceux et celle aux " ordres ", à rechercher des infos souvent chez ceux qui ne nous portent pas dans leur cœur ou, tout bêtement, travaillent bien plus rapidement et mieux que nous : télés, sites web, blogs, radios?qui existent aujourd'hui par milliers. Ce qui augmente les critiques, bien souvent justifiées, il faut l'avouer, à leur encontre.

- L'autre cible, celle qui le plus " bon cul ", c'est la corporation des grands commis de l'Etat (directeurs, conseillers et autres Dg et Pdg du secteur public, ministères et/ou entreprises). Pour un " oui " ou pour un " non ", c'est le coup de pied au c?, sans avertissement ni préavis. La valse va s'accélérant avec le turn-over ministériel ; chacun se débarrassant des équipes en place et ramenant de nouvelles têtes, aux motifs passe-partout : il faut " rajeunir ", il faut plus de dynamisme, plus de cohérence avec le programme présidentiel ou gouvernemental, etc. La valse ne touche que rarement les " élus ", même le plus ignare, du premier cercle de la décision politique? sauf, bien sûr, si des membres du dit premier cercle sont eux-mêmes écartés.

La faute à qui ? La vie politique en pays en voie d' " émergence démocratique " (là où il n'y a pas encore de pouvoirs institutionnalisés bien séparés, et des contre-pouvoirs forts et indépendants) n'est, en fait, au niveau de la répartition des postes de décision, qu'un vaste casino. Il y a ceux, " anciens ", qui misent (toujours) en croyant pouvoir " ramasser ", un jour ou tout de suite, le gros lot, oubliant toujours que la politique, pour paraphraser Mohamed Benchicou (" La parfumeuse. La vie occultée de madame Messali Hadj ", Koukou Editions, 2012), est une " affaire d'habiles croupiers ": des croupiers qui maîtrisent l'art de " manier le râteau ". Il y a, aussi, des joueurs, novices. Ils sont avertis mais n'écoutent pas, et ?? ils y vont. Mirages (universels) du " koursi ", miracles (algériens) de l'ignorance !