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Les risques majeurs, parlons-en !

par Mohamed Dekakene *

Les activités portant sur le HSE, la SIE (la Sureté Interne d'Etablissement), la protection des biens et des personnes, la protection du patrimoine etc. En somme nous parlons de la gestion des risques majeurs.

Les risques sont-ils gérables ?

Par quoi commencer ? Par ce dernier séisme? du 01 Aout 2014 ? Par celui du 21 Mai 2003 - 2278 morts ? Par l'attaque ducomplexe gazier de Tiguentourine par des terroristes puissamment armés ? Par l'incendie de l'imprimerie de la Banque d'Algérie (Heureusement accidents qui surviennent sur les grands chantiers lors de constructions de grands ouvrages d'art ? Par les hécatombes des accidents de la route ? Par le dernier crash de l'avion d'Air Algérie au Mali ? ET?Par ou finir ?

D'abord pour rappeler que 18 mois après le séisme de Boumerdes du 21 mai 2003 un texte a été voté par les deux chambres du parlement, il s'agit de la loi 04-20 du 25 décembre 2004 relative à la prévention des risques majeurs. A ce jour pas de textes d'application. !!!

La gestion des risques est une affaire de spécialistes bénéficiant d'un pouvoir " réel " d'application des textes réglementaires prévues par les lois en vigueur et dotés de moyens tants humains que financiers. Ceci implique automatiquement:

Une refonte totale dans ces domaines que sont la sécurité, la Sureté Interne, la protection des sites sensibles et en général revoir la " politique " de GESTION DES RISQUES MAJEURS et veiller à ce que cet important chapitre qu'est la prévention des risques majeurs et l'élaboration de plans efficients d'alerte ,d'intervention et d'actions coordonnées " en temps réel " soit pris en charge?. TRES SERIEUSEMENT DE MANIERE PROFESSIONNELLE .SANS IMPROVISATION .Et qu'en est- il des tests de simulation ? Même au niveau d'une petite école primaire dans un petit village ???

Catastrophes naturelles ( inondations ,séismes ,tremblements de terre?),risques technologiques ( incendies, explosions dans des installations de gaz ,) ,risques chimiques ,risques biologiques, atteintes à l'environnement, pollutions, risques industriels ( accidents de travail , éboulements dans tunnel de route ,de métro, glissement de terrain , ect... ect. Autant de risques dits " majeurs ".

bref historique

Les risques sont aujourd'hui une question majeure dans le monde. Le risque est en apparence une question banale : tout le monde est exposé au risque, dès que l'on naît, on prend le risque de mourir, en sortant on prend le risque de " recevoir quelque chose sur la tête " et pourtant c'est une question relativement nouvelle puisqu'elle a véritablement explosé dans les années 1980. Les risques émergent dans les années 1970-80, lorsque montent les inquiétudes quant au devenir de la planète, de ses ressources et de ses possibilités de nourrir une population grandissante, c'est aussi le Club de Rome (1968) qui dit "halte à la croissance". Ces marques d'inquiétude aboutissent d'ailleurs à faire émerger la notion de développement durable. On voit bien la filiation qui existe entre les risques, risques pour la planète, risques pour les ressources, etc. et la réponse qui n'est autre que développement durable.

Cela ne signifie pas qu'il n'y avait pas de risque auparavant, mais on parlait plutôt de danger ou de calamité. Dans l'histoire du climat on décrit des calamités agricoles récurrentes. Ces calamités agricoles (hivers très froids, printemps trop humides ou trop frais, étés pourris.. épisodes de grêle...) pouvaient mettre en péril la vie des populations en affectant la quantité de produits alimentaires disponibles. Pendant longtemps, ces calamités ont été perçues comme des punitions divines, comme l'action de Dieu pour punir les hommes de comportements trop éloignés.

Ce n'est qu'en 1755 que l'analyse du danger apparaît aux hommes. C'est en effet à la suite du tremblement de terre et du tsunami associé qui détruisirent une grande partie de Lisbonne que Rousseau, dans sa correspondance à Voltaire, souligne que ce drame n'est pas le fait de Dieu. Il résulte de l'installation des hommes dans un secteur dangereux. J.-J. Rousseau précise que le même événement survenant au cœur d'un désert n'aurait pas eu les mêmes effets.          C'est là le début de la connaissance du risque.

Le risque : éléments de définition

Il faut distinguer le risque, que l'on peut définir comme la potentialité d'apparition d'une catastrophe, de la catastrophe elle-même, événement dramatique, crise qui se réalise. Cette dernière se gère à l'aide de méthodes d'urgence, de plans préparés avant que la catastrophe ne se produise, à l'image des plans ORSEC ou PPI. La gestion de l'après- crise est susceptible de stimuler l'économie (de nombreuses entreprises peuvent y participer) ou de débloquer des situations foncières ou sociales qui contribuaient avant l'événement à freiner le développement urbain par exemple. Ainsi, après le tremblement de terre, la ville de Lisbonne fut reconstruite par le marquis de Pombal sur le modèle de Londres elle-même reconstruite après l'incendie de 1666. A la suite de la reconstruction, le cœur de Lisbonne qui associe de vastes places et des rues assez larges, s'ouvre vers la mer et les activités du port. Si la catastrophe, porte en elle maints aspects dramatiques, elle permet aussi des avancées. De ville assez fermée sur elle-même Lisbonne est devenue une ville ouverte vers l'Atlantique. Le risque, cette potentialité de crise ou de catastrophe, est géré différemment, il nécessite de tout mettre en œuvre afin que la crise ne se produise pas. Les toutes dernières catastrophes citées plus haut devraient nous inciter à revoir nos systèmes de prévention, d'intervention et revoir nos différents plans et surtout à les tester réellement et efficacement, pas simplement parce que la loi nous y oblige (ça devient alors juste une formalité administrative à accomplir et remplir un p-v).

Les risques : une réalité multiple Le risque est multiforme

Il se décline à la fois à l'échelle globale (cf. le réchauffement climatique) et à l'échelle locale (glissement de terrains, affaissement...). Il est de nature variée : aux risques naturels s'ajoutent les risques technologiques, qui remettent en question certains aménagements. L'explosion de l'usine AZF de Toulouse a conduit à s'interroger sur la relation entre l'industrie et la ville : faut-il déplacer les zones industrielles installées dans la ville ? (À noter qu'à Toulouse, c'est la ville qui a " rattrapé " l'industrie et aussi comme la plupart des zones industrielles en Algérie ou souvent nous retrouvons des habitations dans la périphérie d'une industrie à risque et quelquefois même à l'intérieur du site). Les risques se déclinent aussi en termes économiques et les récents événements boursiers ont montré que ces risques peuvent jouer à des échelles très différentes. Les risques sont également géopolitiques : les conflits pour les énergies (pour le pétrole, la guerre d'Irak en est une illustration parfaite), les récents bouleversements dans les pays qui ont suivis ce plan de " domestication ", spoliations des richesses et de mainmise après le déclanchement des Operations " Printemps " arabes " - Tunisie, Lybie, Egypte, Syrie et GHAZA alors ! En somme tout un plan bien réfléchi et mis en application. Bref !passons?

La notion de risque est donc extrêmement vaste et mobilise un champ très large de disciplines, depuis l'économie, les disciplines technologiques, la géologie, la climatologie, le droit, la géographie...

Une vulnérabilité accrue des populations

Y a-t-il plus de danger aujourd'hui que par le passé, notamment dans le domaine des risques naturels ? Une analyse fine tend à répondre par la négative : il n'y a pas d'augmentation significative du nombre d'aléas tels que les cyclones en domaine tropical ou que les fortes chutes de pluie dans l'espace méditerranéen. En revanche, la vulnérabilité des populations, c'est-à-dire la sensibilité des populations aux risques, a progressé fortement pour les raisons suivantes :

La croissance de la population, augmente " mécaniquement " le nombre de personnes exposées.

L'urbanisation croissante de la population, plus de 50% de la population vit en ville. Or la ville est un espace complexe du point de vue du risque. Dans le passé, on s'y installait pour plus de sécurité : les remparts étaient une protection contre les menaces. Aujourd'hui, les villes sont perçues comme de plus en plus dangereuses (violences dans les nouvelles cités), Beaucoup de villes comptent des zones industrielles ou sont établies dans des espaces à risques naturels à proximité de cours d'eau, ou sur des zones sismiques (Ex : Hôpital Mustapha Pacha. Alger) soit par une augmentation des risques.

La littoralisation : une part importante de la population se déplace vers les littoraux, or ce sont des espaces potentiellement soumis à des risques naturels à l'image des tsunamis qui menacent les côtes méditerranéennes, celles de Floride, des Antilles ou du Japon.

La " filiation " des risques : un risque naturel est susceptible d'engendrer un risque technologique, un conflit peut susciter ou accroître un autre type de risque. On parle de risque "induit"...

La vulnérabilité des populations est donc beaucoup plus grande qu'elle n'était dans le passé. En outre, les sociétés de pays développés, refusent le risque et espère le risque zéro. Si cet objectif ne peut être atteint, il n'en demeure pas moins qu'il est nécessaire de juguler le risque au maximum. Et dans notre pays qu'en est-il ?

La gestion du risque La prévention

La gestion du risque impose de tout mettre en œuvre pour que la catastrophe ne se produise pas, ce qui n'est pas toujours chose aisée eu égard au nombre de paramètres à prendre en compte. On voit bien là le rôle majeur des politiques, des choix en matière d'aménagement du territoire. La connaissance du risque, l'information et?la formation.

La réglementation ne suffit pas à réduire le risque. Il faut en effet partir du principe qu'il y a (heureusement) un phénomène d'oubli des catastrophes antérieures Il et en effet essentiel de se souvenir du passé et de garder présent à l'esprit cette mémoire du risque, cela peut aider à mieux le gérer. Naturellement le souvenir des crises passées doit demeurer aussi pour les risques difficiles à prévenir tels les séismes, dans ce cas, il faut savoir quels gestes faire lorsque l'événement se produit. La connaissance du risque doit permettre l'information du public.

On ne s'improvise pas expert ! On le devient par des études, des formations complémentaires, des échanges d'expériences, de la recherche ect.

En fait, dans la gestion des risques majeurs et en matière de protection des biens et des personnes le législateur n'a rien laissé au hasard, si ce n'est qu'il a omis de préciser par un article de loi que " LA SECURITE NE DOIT ETRE CONFIE QU'A DES PROFESSIONNELS AVERES ". Oui, tout est là, on ne badine pas avec la sécurité ! Confions la sécurité aux seuls spécialistes , donnons leur les pouvoirs et les moyens et faisons leur porter la responsabilité de la protection des biens et des personnes et veiller à la sauvegarde du patrimoine public et par delà la protection de notre économie ;ensuite quoi qu'il advienne nous leur demanderons des comptes en cas de défaillance du management sécuritaire ;car en fait c'est de cela qu'il s'agit :           Le management de la sécurité n'est pas entre les mains d'experts , de spécialistes , de professionnels chevronnés Nous avions déjà apporté de modestes contributions par des articles portant sur la protection des sites industriels, les risques majeurs et l'environnement durable et attiré l'attention sur les probabilités de survenance de certains dangers aux conséquences incalculables . Notre conscience nous interpelle et à chaque fois que nécessaire on continu d'intervenir, alerter et informer (ne s'agit - il pas du patrimoine de notre pays ?).

A cette occasion, nous citons un autre exemple à méditer dans un domaine plus complexe que le H S E, c'est celui de la gestion opérationnelle de la SURETE INTERNE dans les établissements sensibles.

Il faut savoir que les efforts entrepris par les pouvoirs publics en matière de consolidation et promotion de la Sûreté Interne d'établissement imposent aujourd'hui une action soutenue pour développer cette fonction dont la pérennité demeure liée principalement à une action permanente de suivi.

Les sociétés de gardiennage, de transport de fonds et escortes de produits sensibles dûment agrées apportent sans aucun doute leur participation et mettent leurs services et compétences à la disposition des sociétés désireuses de faire protéger leur patrimoine par des entreprises spécialisées.

L'apport de ces sociétés de gardiennage dans la politique de prévention des risques a pour objectif de mettre en place des dispositifs opérationnels qui répondent aux exigences des plans de sureté interne ainsi que des systèmes performants visant à assurer la protection des personnes, des biens et de l'environnement.

A cet effet il faut savoir que l'information préventive et le renseignement sont des axes importants de cette politique : l'objet de cette contribution aussi, est de permettre de comprendre l'importance des enjeux et la responsabilité de ces sociétés lors de la prise en charge des missions de protection de ces sites stratégiques.      Il faut en être conscient des menaces éventuelles et des risques encourus et surtout être en mesure d'évaluer et mesurer les conséquences qui peuvent en découler et que la " démarque inconnue " fait son apparition et provoque l'incident catastrophique ! Que faire alors pour y parer et quelles sont les mesures à mettre en place pour prévenir ces risques et y faire face ?

La vulnérabilité d'une zone ou d'un point donné est l'appréciation de la sensibilité des éléments vulnérables présents dans la zone à un type d'effet donné.

Ailleurs, sous d'autres cieux les responsables en charge de la protection de leur l'économie nationale, accordent un intérêt particulier aux sociétés de sécurité surtout celles activant dans les secteurs sensibles ( énergie (électricité et gaz), distribution d'eau potable, médicament ,transports , raffineries, etc.?) et font d'elles des auxiliaires à part entière d'un système global de protection et de défense , associé ( bien sur dans une certaine mesure), à des institutions officielles et agissant sous le contrôle de ces dernières.

Mais pour ce faire les exigences dans la qualification des personnels exécutants et (très) particulièrement les responsables de l'encadrement de ces personnels chargés de la gestion des dispositifs opérationnels sont draconiennes (diplôme et expérience avérés dans le domaine (nous parlons bien sur de l'expérience, pas de l'ancienneté !!!

Mais le constat, dans la pratique, est tout autre. On ne devient pas un agent de sécurité et à plus forte raison un " AGENT DE SURETE INTERNE rien qu'on endossant une tenue, tout comme en ne peut confier la responsabilité d'un site sensible à des personnes qui n'ont aucune relation avec l'activité de sécurité et à des degrés plus élevés on ne peut confier la gestion des dispositifs opérationnels (niveau Directeur) à des " non professionnels "(Malaise, crise arrêts de travail et mouvements de grève dans une importante société de sécurité (à ce jour ) et dépendant et opérant dans le secteur des hydrocarbures. Les enjeux sont trop importants et on ne badine pas avec la sécurité. C'est l'apanage et l'affaire de " spécialistes " - Une fonction et un domaine réservés exclusivement aux spécialistes.

En effet, et si un incident majeur aux conséquences incalculables se produisait ? Tout en sachant que : Les conséquences d'une mauvaise gestion sont très graves et le temps de réaction est très court. Nous suggérons d'y méditer sérieusement et? avant la survenance d'incidents, il y va de la pérennité de nos entreprises stratégiques et de la protection de nos installations, de notre population et de notre économie nationale.

* Enseignant - chercheur.