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«Dhakhira» Implosée

par Belkacem Ahcene-Djaballah

Savez-vous ce qu'est le projet arabe «Dhakhira» («Mémoire») ? Entre parenthèses, je ne m'y connais pas trop en arabe mais Dhakira aurait été plus juste. Un h de trop ? C'est donc une «banque de données» numérique, un «internet arabe», une «banque de données scientifiques et culturelles interactive», une «organisation suprême» créée par le monde arabe et dont le siège est à Alger. Le texte fondateur a été adopté en septembre 2010 par la Ligue des États arabes (134ème session au Caire). Il a été ratifié par l'Algérie en 2011 (toujours la première !) à travers le décret présidentiel 11/247 (Joradp n° 45 du 14 août 2011). Et, elle est restée dirigée depuis sa création et ce, jusqu'à son décès (2020) par le linguiste Abderrahmane Hadj Salah : Bien sûr, il y a un site web (www.cndhakhira-alarabiyya.dz, mais, svp, évitez de lire sa traduction Google en français) : 7 objectifs, 13 missions, tous ambitieux ! Mais, globalement, on en a peu entendu parler d'elle, sauf lors d'une session en date du 19/9/2011, pour l'installation d'une commission nationale de 12 membres et sauf, il y a peu, fin-décembre 2021, lors d'une rencontre organisée par le Centre culturel islamique de Jijel. Pour la petite histoire, on y a appris, par un conférencier, que lors d'une rencontre organisée en Algérie, un pays arabe avait dépêché un officier de l'armée, croyant qu'il s'agissait de « munitions arabes» («dakhira»). C'est dire l'intérêt porté à la chose régionale ainsi qu'aux efforts entrepris par les administrateurs de l'organisation. Cela m'a rappelé l'histoire de la création, en août 1986, de l'«Académie Algérienne de langue Arabe» dont aucun membre n'avait été désigné (mis à part son président et, aussi, feu Merzac Bagtache - et quelques autres- qui n'y avait jamais siégé) et dont a même précisé par un arrêté interministériel le nombre d'emplois et la classification en avril 2021 (sic !).

Pour notre «Dhakhira», on a donc appris, à travers la récente rencontre à Jijel qu'il y a encore loin de la coupe aux lèvres. On a même deviné l'existence de pôles de résistance ou de concurrence, certains pays voulant développer leur propre approche de la pratique académique et scientifique de la langue arabe dont le développement est objectivement lié à la maîtrise des outils technologiques de pointe, ce qui n'est pas une mince affaire. On le remarque d'ailleurs lors de la numérisation des textes avec une reconnaissance des caractères se soldant par beaucoup de fautes sur les mots en arabe. D'autant qu?il ne faut pas se faire trop d'illusions sur la recherche informatique occidentale, laquelle braquée sur le caractère latin ou ceux assez proches, malgré les immenses avancées de la langue arabe, visibles sur la Toile, continue d'exploiter (ou d'ignorer) un immense déficit en matière de traduction de l'arabe vers les langues latines. Cela verse même dans un certain ridicule tant les erreurs sont incompréhensibles et même grossières et ridicules. Il est vrai qu'en dehors des élites qui pratiquent une langue à la grammaire commune, les peuples sont légèrement parfois , mais divergents souvent, dans leurs langages?le tout demandant toujours un temps d'adaptation bien plus long que celui que met un Algérois pour saisir les nuances oranaises ou skikdies. C'est désormais assez clair, la maîtrise et la généralisation, tout particulièrement à travers, entre autres, un Dictionnaire unifié généralisé dans son utilisation au sein des Universités et dans tous les domaines de la Recherche scientifique, sont devenues un enjeu politique majeur que, peut-être, nous avons perdu de vue à cause de nos querelles culturo-cultuels parfois sans queue ni tête et sans fin. Entre-temps qui c'est qui en profite ? Suivez mon regard ! A noter qu'à Jijel, Said Boutadjine , universitaire, écrivain et traducteur a évoqué le pôle marocain, un autre au Moyen-Orient et enfin un troisième dans les pays du Golfe.

Ps : La transcription généralisée (sous le contrôle du Hca afin d'éviter les erreurs) en caractères tifinagh des dénominations des édifices publics est une très bonne chose, mais attention, ne pas oublier que l'Algérie a des ambitions touristiques et attire de ce fait pas mal d'étrangers. Donc, rester ouverts sur les autres langues étrangères, tout particulièrement celles en caractères latins. Français, anglais ou/et turc, on s'en fout, l'essentiel c'est qu'elles soient correctement écrites.