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Rencontre Gouvernement - Partenaires sociaux - Opérateurs économiques: Les incidences de la pandémie au menu

par Ghania Oukazi

Le Premier ministre rencontre aujourd'hui les partenaires sociaux et les opérateurs économiques « à l'effet de mettre en place et de présider une commission de sauvegarde qui aura pour objectif d'évaluer les incidences causées par la pandémie du coronavirus (Covid-19) sur l'Economie nationale».

C'est ce que rapporte un communiqué des services du Palais du Dr Saâdane, rendu public jeudi, qui précise que cette réunion se déroulera à l'hôtel «El Aurassi» d'Alger, en présence de plusieurs membres du gouvernement.

La décision de mettre en place une telle commission a été prise lors du Conseil des ministres du 12 juillet dernier. « Conformément aux instructions de M. le président de la République, la commission élaborera un rapport qui sera examiné comme premier point à l'ordre du jour de la prochaine réunion du Conseil des ministres, du 26 juillet 2020» fait savoir le communiqué en question.

Tâche des plus ardues que de recenser les conséquences de la pandémie du Covid-19 tant l'économie nationale demeure totalement déconnectée des technologies nouvelles et continue de fonctionner avec les moyens et méthodes les plus archaïques. Première entrave de taille, l'absence d'institutions capables d'évaluer, correctement, les situations économiques et financières de chaque secteur. L'inexistence d'instruments fiables pour établir des statistiques conformes aux états des entreprises et des services publics et privés, dans différents domaines laisse planer le doute sur l'efficacité de la commission dont le président de la République a demandé la mise en place. Commission appelée curieusement « de sauvegarde » même si ce grand terme exige, en plus d'un gros pactole d'argent pour, entre autres, alléger les charges des entreprises et préserver les emplois et les salaires, l'application de mesures urgentes pour faire redémarrer la machine économique accablée, déjà, par de lourdes et mauvaises pratiques bureaucratiques depuis toujours et ralentie par le confinement. « La sauvegarde » de l'outil économique en temps de crise exige, surtout, des aptitudes managériales indispensables que doit, impérativement, booster une volonté politique implacable, courageuse et responsable.

L'exigence de mesures d'urgence

« L'édification d'une véritable nouvelle économie passe par le changement des mentalités et la libération des initiatives de toute entrave bureaucratique, la révision des textes juridiques en vigueur, ou leur adaptation en fonction de la logique économique et non des pratiques conjoncturelles, ce qui permettra de mieux exploiter le génie national et de générer les richesses et les emplois, sans exclusion ni exclusive », a plaidé le président de la République lors de la réunion du 7 juillet dernier qu'il a consacrée à l'examen du projet de « Plan national de relance socio-économique». Pour l'immédiat, il n'est pas judicieux de vouloir exécuter un plan de cette ambition. Ceci, tant que le pays est sous l'emprise de la pandémie et évoluera pendant longtemps sous le poids de ses conséquences désastreuses sur l'économie, les finances, la société et le mental de toute une population. « Les pratiques conjoncturelles » évoquées par Tebboune devraient, selon les spécialistes « être revues et corrigées par des compétences politiques avérées qui savent mesurer les degrés des différentes crises et leurs diverses dimensions sur le pays». Dans l'édition du dimanche 15 mars dernier, l'on écrivait que « d'ici à ce que la pandémie se rétracte, le gouvernement Djerrad devra revoir sa copie des priorités -s'il en a une- et recenser les dégâts sur les entreprises qui n'ont plus de matières premières pour raison de confinement des pays qui les produisent comme la Chine. « Plus il fait vite et plus il saura faire face aux nombreuses pénuries de produits qui vont s'annoncer dans peu de temps », disent des économistes (...). L'on susurre par ailleurs que «les vendeurs de produits de première nécessité prévoient d'augmenter le prix de l'huile de trois dinars ». L'on constate quatre mois après, que le pronostic est exact. Les prix de marchandises ont flambé, ont été doublés, triplés et même quadruplés par les commerçants qui veulent rattraper « matériellement » le temps perdu durant les longues périodes de confinement. C'est loin d'être une exagération de faits ou une simple vue de l'esprit. Le premier épicier du coin pourra confirmer cette folie de la mercuriale des prix.

Lors de la réunion du 7 juillet dernier durant, laquelle le président a auditionné les ministres des Finances, de l'Energie, de l'Industrie et des Mines, du Commerce, de l'Agriculture, ainsi que le ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la Prospective, il a été question pour tous de présenter «des exposés sur les mesures pratiques proposées pour la mise en œuvre du Plan d'action du gouvernement, visant l'édification d'une nouvelle économie nationale sous-tendue par la diversification des sources de croissance, l'économie du savoir et la gestion rationnelle des richesses nationales », faisait savoir le communiqué de la présidence de la République.

Ces modes opératoires qui manquent le plus

Lors des débats, est-il noté, «le Président Tebboune a donné des instructions détaillées, à chacun des ministres concernés, à l'effet d'opérer des réformes structurelles, dans la cadre de la politique générale du gouvernement, à même d'assurer une exploitation optimale et transparente de toutes les potentialités et richesses naturelles nationales, à commencer par les mines dont regorge l'Algérie ». Au regard de ces instructions du président, l'Etat n'a plus besoin d'une nouvelle feuille de route pour décrocher l'économie nationale de la rente pétrolière et la rendre productive. L'on rappelle, en effet, qu'en juillet 2016, le gouvernement avait exposé le « Nouveau modèle de croissance économique » en vue, disait-il « d'une transformation structurelle de l'économie, au cours de la prochaine décennie ». Transformation qui devait se faire « en trois phases : de décollage (2016-2019), de transition (2020-2025) et dite de stabilisation (2026-2030)».

Le document portant ce «plan» détaille bien les trois phases en actions à mener et en objectifs à atteindre. Il en est de même pour celui relatif au «Schéma national d'aménagement du territoire (SNAT 2030)» qui s'appuie sur «une stratégie nationale d'organisation des espaces de programmation territoriale (EPT), sur l'émergence des pôles d'attractivité (PA) et sur la création de zones intégrées de développement industriel (ZIDI) et des villes nouvelles à partir desquelles seront mis en œuvre les mécanismes qui permettront de diffuser la croissance sur l'ensemble des territoires».

Avec une 3ème exigence « qui est celle de la préservation et de la valorisation du capital naturel et culturel du pays ».

Les deux documents comportent les mêmes mesures, les mêmes actions, les mêmes objectifs que ceux du plan Tebboune y compris « (...) le changement des mentalités et la libération des initiatives de toute entrave bureaucratique (....) », comme il l'avait souligné durant sa séance de travail.          

Ce sont les modes opératoires qui manquent le plus aux gestionnaires pour leur permettre d'exécuter ces plans.

Pour cette exigence qui n'a jamais été portée, encore moins réalisée par l'ensemble des personnels politiques qui se sont succédé, à ce jour, il est impératif que le gouvernement Djerrad se détache de l'autoritarisme, de la suffisance et du populisme qui ont fait les plus mauvais jours de ce pays. Première remarque évidente : exiger de « la commission de sauvegarde » qui devra être mise en place, aujourd'hui, d'«élaborer un rapport qui sera examiné comme premier point à l'ordre du jour de la prochaine réunion du Conseil des ministres, du 26 juillet 2020 » comme le dit le communiqué du Premier ministère, relève de tout cela. A moins qu'il s'agisse d'un plan de travail qui lui permettra de commencer ses investigations qu'elle ne pourra mener sans relevé de données réelles et vérifiables sur le terrain.