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Le fond et la forme du dialogue

par Abdelkrim Zerzouri

La série de rencontres consultatives, éminemment politique, initiée par le président Tebboune avec nombre de personnalités nationales et politiques, en concrétisation du processus de changement global, auquel il s'était engagé, trouve un large écho de satisfaction et d'adhésion au principe de dialogue. Sans exception, tous les invités du président Tebboune ont, jusque-là, répondu présent, dont l'ancien chef du gouvernement Ahmed Benbitour, l'ancien ministre et homme politique Abdelaziz Rahabi, l'ancien chef du gouvernement, Mouloud Hamrouche, l'ancien ministre, Ahmed Taleb Ibrahimi, qui, dans l'impossibilité de se déplacer à cause de sa maladie, a reçu en son domicile le président Tebboune, qui s'est enquis de son état de santé, sans manquer de sonder son avis sur la situation politique du pays, ainsi que le président du parti Jil Jadid, Sofiane Djilali, qui a été le premier responsable d'une formation politique à être reçu par le président de la République, ainsi que l'ancien coordinateur général de l'Instance nationale de dialogue et de médiation (INDM), Karim Younès, et le colonel Youcef El Khatib, ex-chef de la wilaya IV historique, les derniers en date (mercredi 15 janvier) à être reçus à la présidence. Et la liste reste largement ouverte. Hormis quelques avis encore réticents, tout le monde salue les vertus du dialogue, mais l'opinion d'une façon générale, y compris de nombreux « hirakistes », qui ont tenu à nous le faire savoir, reste sur sa faim quant à la teneur des consultations. Des communiqués généralistes sanctionnent l'issue de ces rencontres, louant leurs objectifs visant l'édification d'une nouvelle république répondant aux aspirations du peuple et l'entame d'une réforme globale de l'Etat, à même de consacrer la démocratie dans le cadre d'un Etat de droit préservant les droits et les libertés des citoyens. Des objectifs qui représentent les engagements de M. Tebboune lors de sa campagne électorale, réaffirmés dans son discours prononcé à la cérémonie de prestation de serment en sa qualité de président de la République. Ne pouvait-on pas aborder avec plus de détails tout ce qui a tourné entre le président Tebboune et ses invités ? La question est posée par les citoyens, parmi eux des purs et durs du « Hirak ». Cela donnerait lieu à une bienveillante évaluation des positions des uns et des autres. On a vu, dans ce contexte, des journalistes courir derrière des invités qui viennent de sortir de ces rencontres pour savoir exactement de quoi a tourné la discussion avec le président de la République. Sans vraiment avoir de réponses claires et précises. Le président du parti Jil Jadid, Sofiane Djilali, a rendu public un communiqué long et large, immédiatement après sa rencontre avec le président Tebboune. Si le communiqué officiel reste fidèle aux mêmes dimensions dans son compte rendu, relevant que le président du parti Jil Jadid a «présenté des propositions pour renforcer la concertation et le dialogue », le concerné est allé loin pour étaler en détail la teneur de la rencontre, qu'il a résumée à travers un communiqué bien clair, dont les réponses du président Tebboune à ses préoccupations.

Ainsi, le président du parti Jil Jadid a soumis au président Tebboune la question de la libération de l'ensemble des détenus d'opinion, en citant les cas de Karim Tabou, Fodhil Boumala, Samir Belarbi et Abdelwahab Fersaoui, ainsi que tout autre détenu du Hirak, et le président de la République a affirmé qu'il suivait de près ces questions et que le processus judiciaire en cours permettra une libération rapide de celles et ceux qui sont en détention pour raison d'opinion. Rien que sur le plan d'un apaisement des esprits, cela mérite bien d'être signalé, pourquoi alors occulter le fond pour ne garder que la forme de ces rencontres consultatives ? D'autres questions ont été également abordées lors de cette rencontre, dont l'ouverture du champ médiatique et la Constitution en gestation, avec des réponses rassurantes du président Tebboune rapportées par le président du parti Jil Jadid. D'un avis largement partagé, on aurait pu conclure ces rencontres à travers des communiqués communs pour donner plus de sérieux et de qualité à l'écoute et aux réponses données aux points soulevés.