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Merci, El Khadra !

par Mahdi Boukhalfa

Tout le monde retiendra cette historique consécration d'«El Khadra» vendredi dans la capitale égyptienne, qui a gravi pour la seconde fois héroïquement le sommet du continent en remportant l'édition 2019 de la Coupe d'Afrique des nations. Une belle prestation tout au long de ce harassant, stressant tournoi, à hauteur d'hommes, qui a conforté ce retour décisif d'un nationalisme en perte de vitesse au cours de ces dernières années. «El Khadra», au-delà de sa performance à saluer, a réussi là où les politiques ont échoué : réconcilier le peuple avec lui-même, son identité, réunir les enfants de la nation autour d'un idéal, d'idées nobles, celles des valeurs universelles qu'encouragent si bien le sport et la fraternité.

Au défaitisme ambiant, à l'émigration clandestine érigée en porte de sortie obligatoire d'une situation sociale chaotique vécue par les jeunes s'ajoutaient les incartades et les dépassements d'un régime prédateur. Le mouvement populaire du 22 février, qui n'a jamais été une génération spontanée politique, allait progressivement replacer les espoirs de reconstruction du pays sur des rails plus solides et, plus foncièrement, ramener calme et sérénité au sein de la maison « Algérie ». Au fur et à mesure de leurs amplifications sociales et politiques, les marches du vendredi allaient faire émerger un sentiment de nationalisme sincère, pur, qui n'a plus été observé depuis longtemps. Les prouesses, « inattendues » par beaucoup mais agréablement accueillies par le peuple algérien, de la sélection nationale en Coupe d'Afrique des nations auront cimenté un ensemble national fracturé et émietté par une gouvernance catastrophique qui a mené le pays à une double crise politique et économique.

Les Algériens, enfin réconciliés avec eux-mêmes au détour d'un mérité sacre continental, avec les mêmes objectifs politiques, les mêmes espoirs économiques, les mêmes angoisses sociales quant à un avenir devenu soudain réel, palpable, possible avec les prémices d'un nouvel Etat démocratique, se sont réapproprié l'amour du pays, sa défense. L'équipe nationale de football avec son caractère rageur de la « gagne » montre la voie, toutes proportions gardées, aux politiques, aux décideurs. « Balle au centre » et que l'on discute, tous, sans distinction politique, sereinement de l'avenir du pays, de cette jeunesse, de ses espérances, de sa volonté d'escalader des montagnes pour bâtir un pays où tous les Algériens se reconnaîtront. Et donc qu'il est vital que tous les acteurs politiques et les centres d'influence dans le pays se mettent une fois pour toutes d'accord pour éviter au peuple algérien de perdre encore plus un temps si précieux, si vital pour la régénération du pays. Le faire sortir du gouffre dans lequel il a été plongé depuis si longtemps.

L'exemple de cette réaction salutaire a été donné vendredi 19 juillet au Caire à la classe politique et les décideurs du pays, à quelque niveau qu'ils soient, par cette fringante équipe nationale qui a su se transcender et se forger une personnalité au plus fort de l'adversité pour construire un nouvel et bel ensemble, une entité sportive qui rassemble tous les Algériens, et plus encore avec la communauté nationale à l'étranger qui a montré qu'elle est là, prête à servir le pays. Pour les « politiques », le précédent, l'exemple, est là. Il n'y a qu'à le suivre.